La question du Sahara occidental, occupé par le Maroc depuis 1975, «n’a jamais été un ‘’différend régional’’, comme le prétend le Maroc mais plutôt une question en suspens d’un processus de décolonisation que l’Espagne avait l’obligation d’administrer, sans céder à un autre intérêt que celui des Sahraouis eux-mêmes».
En invalidant les deux accords commerciaux conclus entre le Maroc et l’Union européenne (UE), la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a statué sur une chose «évidente», a indiqué le Docteur et professeur en relations internationales à l’université de Madrid, Sebastian Ruiz-Cabrera. «La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a statué sur une chose évidente. Les accords de pêche et agricoles UE-Maroc ont violé les principes d’autodétermination du peuple sahraoui», a écrit Sebastian Ruiz-Cabrera dans un post sur les réseaux sociaux. «Les entreprises espagnoles qui en ont bénéficié, en paieront-elles le prix ?», s’est-il notamment interrogé.
Evoquant, par ailleurs, l’ampleur du pillage des ressources sahraouies, le Docteur et professeur en relations internationales à l’Université de Madrid a fait savoir qu’en 2019, «les captures dans les eaux du Sahara occidental se sont élevées à 1 067 000 tonnes pour une valeur totale de 496 408 millions d’euros (tandis que) les exportations vers l’UE au cours de la même année se sont élevées à 124 900 tonnes, pour une valeur de 434 437 millions d’euros». «C’est la Cosa Nostra. Un banquet organisé par Bruxelles», s’est-il indigné, soulignant que, le 12 février 2019, le Parlement européen a approuvé le nouvel accord de collaboration sur la «pêche durable» entre l’UE et le Maroc avec une compensation économique de 153,6 millions d’euros pour quatre ans.
Dans ce contexte, Sebastian Ruiz-Cabrera a dit espérer que les arrêts rendus vendredi par la CJUE confirmant l’illégalité des accords commerciaux conclus entre l’Union et le Maroc puissent permettre à la population sahraouie d’exercer son droit à l’autodétermination. «Après la belle sentence de justice d’aujourd’hui (vendredi, ndlr), nous espérons un retour économique pour la population sahraouie afin qu’elle puisse gérer correctement son droit à l’autodétermination», a-t-il indiqué.
En septembre 2021, le Tribunal de l’Union européenne avait prononcé l’annulation des deux accords de pêche et d’agriculture liant le Maroc à l’Union européenne et étendus illégalement au Sahara occidental occupé, affirmant qu’ils ont été conclus en violation de la décision de la CJUE de 2016 et sans le consentement du peuple du Sahara occidental. Les Conseil et Commission européens avaient introduit un recours en appel devant la CJUE en décembre de la même année. Vendredi, la CJUE a rejeté ces recours, synonyme d’annulation des accords signés entre le Maroc et UE et étendus illégalement au Sahara occidental occupé.
Un pur processus de décolonisation
Dans le même sillage, le média espagnol ABC a écrit sur son site internet que la décision de la Cour de justice de l’Union européenne invalidant les deux accords commerciaux conclus entre le Maroc et l’Union européenne (UE) représentent non seulement un revers pour la Commission et le Conseil de l’UE mais aussi pour le gouvernement espagnol qui soutient le prétendu «plan d’autonomie» de Rabat.
Rendus vendredi, les arrêts de la Cour de l’UE «représentent non seulement un revers pour la Commission et le Conseil de l’UE, mais aussi un nouveau revers pour la flotte andalouse, bénéficiaire de la plupart des licences accordées par le Maroc pour pêcher dans les eaux sahraouies, mais remettent également en question le gouvernement de Pedro Sanchez, implicitement désavoué pour avoir soutenu il y a deux ans le (prétendu) plan d’autonomie conçu par Rabat pour assurer le contrôle du Sahara occidental», écrit ABC dans son éditorial.
La question du Sahara occidental, occupé par le Maroc depuis 1975, «n’a jamais été un ''différend régional'', comme le prétend le Maroc mais plutôt une question en suspens d’un processus de décolonisation que l’Espagne avait l’obligation d’administrer, sans céder à un autre intérêt que celui des Sahraouis eux-mêmes», souligne le média espagnol.
Le quotidien espagnol a rappelé que les arrêts de la CJUE annulent les accords commerciaux agricoles et de pêche signés entre l’UE et le Royaume du Maroc au motif que les deux traités ont été conclus sans le consentement du peuple sahraoui. Ainsi, poursuit la même source, «Rabat ne peut pas profiter économiquement, du moins sur le marché européen, des ressources d’un territoire qui ne lui appartient pas et qui, occupé depuis 1975, n’a pas encore organisé le référendum d’autodétermination auquel il a droit en vertu du droit international». Et d’ajouter dans ce contexte que la «solide amitié» avec le Maroc que la Commission européenne insiste à proclamer «doit être compatible avec le respect du droit international et la reconnaissance du Sahara occidental comme territoire souverain, libre de décider de son avenir...»
Outre l’invalidation des deux accords commerciaux entre le Maroc et l’UE, la CJUE, dans un autre arrêt, s’est également prononcée sur l’identification et l’étiquetage des melons et des tomates du Sahara occidental. Elle y souligne, en substance, que cet étiquetage doit indiquer le seul Sahara occidental comme étant le pays d’origine de ces produits, à l’exclusion de toute référence au Maroc, afin d’éviter d’induire le consommateur en erreur quant à leur véritable origine.
Dans ses arrêts de vendredi, la CJUE rappelle d’abord l’ensemble des acquis de 2016 et de 2018 comme une base intangible, à savoir que le Sahara occidental dispose d’un statut séparé et distinct par rapport au territoire marocain et que le peuple sahraoui constitue un sujet de droit international tiers aux relations UE-Maroc, dont le consentement est incontournable.