Après l’adoption des nouvelles lois par l’APN : Les syndicats comptent relancer la protestation

09/03/2023 mis à jour: 04:48
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Malgré les voix refusant son contenu, le projet de loi relatif à l’exercice du droit syndical a été adopté mardi, à la majorité, par les députés de l’Assemblée populaire nationale (APN). Les syndicats autonomes ne comptent pas lâcher du lest. En effet, après une tempête provoquée par son contenu estimé anticonstitutionnel, le projet de loi relatif aux modalités de l’exercice syndical a été officiellement adopté ce mardi par la majorité des membres de l’APN. Après deux jours de débats, l’adoption est tombée sans grande surprise lors d’une séance plénière présidée par Brahim Boughali, président de l’APN, en présence du ministre du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale, Youcef Cherfa, et de la ministre des Relations avec le Parlement, Basma Azouar. Dans le contenu de ce projet, 56 amendements au total ont été soumis à la commission spécialisée. Sur ce chiffre, seulement 32 ont été adoptés et 24 rejetés. Ce rejet a-t-il un impact réel ? Selon les syndicats autonomes qui avaient, rappelons-le, appelé à un débrayage national de refus de ce projet, les 24 amendements rejetés sont de forme et non de fond.

«Réellement, ces amendement n’ont aucun impact sur le contenu que nous contestons et que nous estimons contre les préceptes de la Constitution. Nous savions que le projet allait passer et nous n’avons pas de choix, sauf continuer la lutte pour les libertés syndicales et les droits des travailleurs. Nous allons recontacter le Conseil constitutionnel et juste après le Bureau international du travail (BIT)», déclare Boualem Amoura, secrétaire général du Syndicat autonome des travailleurs de l’éducation et de la formation (Satef). Il appuie ses propos par l’article 34 de la Constitution algérienne, qui consacre les libertés individuelles et collectives, et aussi les articles 03 et 04 de la Convention 87 sur les libertés syndicale du BIT, ratifiée par l’Algérie. Ces deux articles préservent aux organisations syndicales le droit d’élaborer leur statuts et règlements administratifs, d’élire librement leurs représentants, d’organiser leur gestion et leurs activités et de formuler leur programme d’action. Il est clairement écrit dans ces articles que les autorités publiques doivent s’abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l’exercice légal. L’article 04 évoque clairement aussi que les organisations syndicales ne sont pas sujettes à dissolution ou suspension par voie administrative. Bref, en conclusion de tout cela : malgré l’adoption de ce projet de loi, la détermination des syndicats autonomes reste intacte.

Que va-t-il réellement changer ?

Dans la création de ce projet de loi, les hautes autorités du pays veulent redessiner la cartographie syndicale et donner plus de valeur à cette activité à fort impact sur le paysage économique et politique. D’ailleurs, dans le séance plénière, le ministre du Travail a rassuré sur les véritables objectifs de cette désormais nouvelle loi. Pour lui, ce nouveau texte réglementaire est censé donner une impulsion au projet sociétal du pays, encadrer l’action syndicale, renforcer le rôle des organisations syndicales dans la défense des droits et réaliser la justice sociale. «Il fournira une protection juridique aux représentants des travailleurs en permettant également l’émergence d’organisations syndicales fortes sur la scène nationale à travers leur adhésion aux fédérations et aux confédérations. Cette loi garantira aux organisations syndicales leur place en tant que l’une des institutions les plus importantes de la société», en sus de renforcer «la liberté de l’action syndicale et d’activer son rôle dans la défense des droits fondamentaux des travailleurs et le développement de la société», avait-il déclaré. Avec cette nouvelle loi, la question de la représentativité est fixée à 30% au moins de l’effectif total des travailleurs couverts par son statut.

Cette nouvelle loi donne également à l’autorité administrative le droit de demander la dissolution de l’organisation syndicale dans des cas bien définis, tels que l’absence d’activité effective liée au statut du syndicat pendant 3 années consécutives, la violation de la loi en matière d’appartenance ou de soutien à un parti politique, de graves irrégularités financières, refus de se conformer aux décisions judiciaires ou encore la persistance au recours à des grèves illicites ayant un impact sur la continuité et le fonctionnement du service public. Ces deux chapitres sont les plus contestés par les syndicats autonomes. S’y ajoutent la limitation des mandats des secrétaires généraux et coordinateurs nationaux des syndicats limités à deux mandats seulement. Il est à signaler à la fin que les députés MSP ont émis un communiqué justifiant leur refus de ce projet de loi. Ils expliquent que cette loi confisque des droit garantis par la Constitution et les Conventions internationales, qu’elle consacre l’unilatéralité dans le confection de ce projet et installe des freins à la liberté de l’exercice syndical. Le communiqué, dont nous détenons une copie, est signé par le député Ahmed Sadouk, président du groupe parlementaire du Mouvement de la société pour la paix (MSP). 

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