Le Cap Aokas, devenu le repère des délinquants depuis des dizaines d’années, est transformé en un espace de détente familiale par un investisseur privé, bénéficiant d’une concession et de l’aval de la wilaya.
Il est presque 10h. La fine brume maritime du matin se dissipe progressivement pour laisser voir, depuis le Cap Aokas, à 29 km à l’est de Béjaïa, une vue imprenable sur la côte est, du Port éponyme jusqu’au littoral de Melbou.
La route du Cap s’est offert un nouveau look. En ce vendredi 1er juillet, nous découvrons un autre visage de ce bout de chemin de quelques centaines de mètres, rescapé des éboulements rocheux répétitifs et repère de la délinquance. Le chemin traversant le Cap représentait la route creusée dans le mont Imma Tadrart, entre 1864 et 1865, pour servir, jadis, de liaison entre Béjaïa et Sétif. Longtemps abandonnée, la route du Cap Aokas est devenue le lieu de prédilection des délinquants.
La vente des stupéfiants, la commercialisation illégale des boissons alcoolisées et la prostitution constituaient l’essentiel de l’activité délictueuse. Les services de sécurité et ceux de cette municipalité balnéaire l’ont classée comme un point noir. Les descentes policières, néanmoins, sporadiques, dans ce lieu, n’a jamais dissuadé ses occupants nuisibles de décamper. Après une longue procédure administrative, Senoun Mahfoud, a obtenu le feu vert, aidé par une délibération favorable de l’APC d’Aokas, pour l’aménagement et l’exploitation de ce site.
Ce chemin, Mahfoud le connaît depuis son plus jeune âge. Enfant du village mitoyen, Tabelout, il l’empruntait pour se rendre à l’atelier de mécanique automobile où il travaillait. «Je continuais à gagner ma vie à travers mes activités commerciales, jusqu’à ce que, un ami, un Sétifien, m’ouvre les yeux sur cette opportunité d’investir dans le segment du tourisme», dit Mahfoud. «Ce dernier se désolait de voir un aussi beau lieu se dégrader sans en tirer profit pour son exploitant, les commerçants d’Aokas et les visiteurs. Et c’est à partir de là que l’idée de déposer une demander de concession ou d’autorisation d’exploitation de ce lieu magique m’est venu en tête», précise-t-il.
«Le plus dur, c’était de déloger les délinquants qui rôdaient par ici. Il a fallu donc fermer l’accès à l’aide d’un portail métallique imposant et de se montrer dissuasif et déterminé de mener à terme ce projet que les anciens maîtres des lieux voulaient récupérer à tout prix», rappelle Mahfoud. «Ensuite, nous avons entamé une opération de nettoyage qui a duré plusieurs jours, où nous avons évacué plus de 200 camions remplis de toute sorte de détritus», raconte-t-il.
Devant le portail, des toilettes publiques et une aire de stationnement sont en cours d’aménagement. Au milieu de l’exploitation, en face d’un tunnel de 5 m de long, se dresse un rochet surplombant la falaise et sur lequel on peut lire la date de creusement de la route et le nom du maître d’ouvrage de cette époque coloniale : «Cap Aokas. Les ponts et chaussées. 1864 et 1865».
Il serait également appréciable, voire utile, que le gérant pose une plaque résumant l’histoire de ce chemin afin que les visiteurs prennent connaissance de l’ancêtre de la RN9. La bordure qui donne comme un balcon sur la RN9 et la Méditerranée sont longés de cordes en guise de garde-corps, mais qui nécessite davantage de renforcement tout comme l’examen minutieux des roches accrochées à la falaise le long du parcours.
Au fond, une cafétéria et des chaises faisant face à la baie sont installées en prévision des pauses-café et des qaâdates. Le projet propose également aux visiteurs, à l’entrée, des étalages réservés à la vente des souvenirs, des produits artisanaux et des mets traditionnels. «Cela permettra à nos artisans d’écouler leurs produits artisanaux et les mets du terroirs.
Ils peuvent s’installer et occuper un espace pour vendre directement ou bien, on leur achète la marchandise pour la revendre nous-mêmes», explique un jeune s’affairant à installer un barbecue. Quant aux prix qui seront appliqués sur le site, notre interlocuteur, rassure que le gérant va aligner ses prix à ceux pratiqués en ville.
Pour le gérant, «il est nécessaire que les pouvoirs publics accompagnent les investisseurs et les projets comme ceux-ci afin de donner un peu de vie et d’animation à nos communes, surtout en saison estivale. J’appelle d’ailleurs tous ceux qui ont une idée et un peu d’argent à investir ce genre d’endroit et les valoriser».
Après avoir concrétisé sa première affaire, Mahfoud pense déjà à créer une forêt récréative prés du Cap ou dans la bande boisée du littoral à travers un projet qui respecte la nature au profit du grand public.