Le Premier ministre indien, Narendra Modi, a dit hier au Kremlin à son «ami» Vladimir Poutine que continuer de bombarder l'Ukraine n'allait pas «résoudre les problèmes», plaidant pour «un chemin vers la paix par le dialogue», selon des propos recueillis par l’AFP.
Le président russe a déclaré à plusieurs reprises, après plus de deux années de combats et de bombardements, qu'un cessez-le-feu et des pourparlers ne sont possibles qu'en cas de capitulation de l'Ukraine à ses revendications, à savoir que Kiev lui cède cinq régions et renonce à son alliance avec les Occidentaux.
Le dirigeant indien n'a jamais condamné explicitement l'offensive russe. «En tant qu'ami, j'ai également dit que pour un avenir meilleur pour la prochaine génération, la paix est de la plus haute importance », a déclaré N. Modi, aux côtés de Vladimir Poutine. «Je sais que la guerre ne peut pas résoudre les problèmes, les solutions et les pourparlers de paix ne peuvent pas aboutir parmi les bombes, les armes et les balles», a fait valoir Modi, appelant à «trouver un chemin vers la paix par le dialogue».
De son côté, Vladimir Poutine, s'est dit «reconnaissant pour l'attention» porté par le Premier ministre indien au conflit en Ukraine sachant qu’il a répété à maintes reprises vouloir la capitulation de l'Ukraine, en forçant son armée à se retirer des régions dont Moscou a revendiqué l'annexion en 2022 sans les contrôler entièrement. L'Ukraine a rejeté de son côté ces conditions qu'elle juge inacceptables et demande le départ des troupes russes de son sol avant toutes discussions de paix.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky, excédé par le déplacement de Narendra Modi à Moscou, l'a ainsi qualifié de «coup dévastateur pour les efforts de paix». Le Premier ministre indien a toutefois également affiché son mécontentement face à Vladimir Poutine : «Lorsque des enfants innocents sont assassinés, on les voit mourir, le cœur souffre et cette douleur est insupportable», a-t-il déploré.
Avant leur discussion, les deux dirigeants ont visité ensemble une exposition sur l'histoire du nucléaire. Narendra Modi, qui a été reconduit en juin à la tête de son pays, est arrivé lundi à Moscou, tenant un tête-à-tête «informel» d'environ trois heures dans la résidence de Vladimir Poutine à Novo-Ogariovo, près de la capitale russe.
Les Etats-Unis ont préalablement exhorté N. Modi à insister sur la «souveraineté» et «l'intégrité territoriale» de l'Ukraine lors de cette visite qui intervient alors que s’est ouvert hier un sommet de l'OTAN à Washington, auquel Volodymyr Zelensky doit assister. La Russie est un fournisseur clé d'armes et de pétrole bon marché à l'Inde.
Les Etats-Unis et leurs alliés occidentaux ont cultivé ces dernières années leurs liens avec l'Inde, pour contrer l'influence grandissante de la Chine dans la région Asie-Pacifique, tout en faisant pression sur elle pour qu'elle s'éloigne de Moscou. Membre des BRICS aux côtés de la Russie et de la Chine, l'Inde est partisane d'un monde multipolaire et continue parallèlement à développer ses relations dans le domaine de la sécurité avec les Etats-Unis.
La précédente visite en Russie de Narendra Modi, qui a obtenu en juin un troisième mandat à la tête du pays le plus peuplé du monde, remonte à 2019. Deux ans plus tard, fin 2021, il a accueilli Vladimir Poutine à New Delhi.
Si les ventes d'armes russes à destination de l'Inde ont sensiblement baissé ces deux dernières années, l'Inde achète depuis le début de l'offensive russe en Ukraine d'importantes quantités de pétrole russe vendues au rabais.
Mais l'Inde voit aussi d'un mauvais œil le fort rapprochement en cours entre son grand rival chinois et Moscou. Après Moscou, Narendra Modi est attendu à Vienne, pour la première visite d'un dirigeant indien dans la capitale autrichienne depuis 1983.