Un séisme après des bombardements en Afghanistan : La double peine des rescapés

28/06/2022 mis à jour: 02:06
AFP
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J’aurais aimé être parmi les morts»: déjà victimes de bombardements pakistanais il y a deux mois, des habitants de l’est de l’Afghanistan vivent un nouveau cauchemar après avoir été frappés par le séisme.

Mi-avril, dans le district frontalier de Spera, des hélicoptères pakistanais ont bombardé des villages, tuant une cinquantaine de personnes. Le Pakistan affirme que des groupes armés, comme le Tehreek-Taliban Pakistan (TTP), les talibans pakistanais, mènent des attaques depuis le sol afghan, à travers la frontière notoirement poreuse.

Afghan-Dubaï, dans l’est de la province de Khost, a été l’un des villages visés. Gul Nayeb Khan, 30 ans, et sa famille élargie habitent là. Son père, ses sœurs, ses oncles et leurs femmes... Pas moins de 28 membres de sa famille élargie ont été tués dans les frappes pakistanaises.

L’armée pakistanaise n’a pas confirmé avoir mené ces attaques. Mais Islamabad a demandé aux talibans au pouvoir en Afghanistan, avec lesquels les tensions se sont accrues depuis leur prise du pouvoir en août, de prendre des «mesures sévères» contre les militants qui visent son propre territoire. Les talibans afghans, qui sont un groupe distinct du TTP mais en partagent l’idéologie, ont insisté sur le fait que toutes les victimes des bombardements étaient des civils innocents.

Dans la famille de Gul Nayeb Khan, ceux qui ont été blessés commençaient à peine à rebâtir leurs maisons détruites quand le séisme est survenu. «Des membres de ma famille sont morts (lors des bombardements), et maintenant, alors que nous reconstruisions notre maison, elle a été détruite par le tremblement de terre» du 22 juin, qui a fait plus d’un millier de morts, se lamente-t-il en retenant ses larmes.

«Mon cœur souffre tellement. Nous sommes confrontés à tous les malheurs qu’on puisse imaginer. Je pense que j’aurais aimé être parmi les morts, il n’y a pas d’autre moyen», pour échapper à cette malédiction, ajoute-t-il.

Il est venu pour obtenir de l’aide d’urgence distribuée par l’Organisation internationale des migrations (OIM). Dans la localité d’Afghan-Dubaï – nom donné à une époque où le commerce de pignons de pins était florissant dans cette région montagneuse couverte de conifères, et comparé à celui du pétrole –, la distribution de l’aide d’urgence est organisée par un comité local ad hoc et strictement encadrée par des talibans armés.

Elle se déroule au sommet d’une petite colline au centre du village, sur un espace grand comme un terrain de basket-ball. L’aire de distribution est délimitée par des cordes et ceux qui tentent de les franchir sans en avoir le droit risquent des coups de bâton ou de ceinture distribués par les talibans. Gul Nayeb Khan n’a pas eu le droit d’avoir son lot, car son nom n’était pas inscrit sur la liste. Hazrat Omar, 25 ans, espère y avoir droit.

Il habite près d’Afghan-Dubaï et six personnes de sa famille sont mortes dans le séisme. «Il était minuit, nous avons entendu un grand bruit, le toit de notre maison s’est effondré. Comme c’est une zone frontalière, nous avons pensé que le Pakistan bombardait nos maisons comme il l’a fait dernièrement», témoigne-il.

«La vie est très dure»

Dans la queue de ceux qui ont été enregistrés et vont recevoir une tente et un kit d’aide, Sharifullah Khan tient bien son petit ticket donné par l’OIM et aussi un papier d’identité. Il a fui le Waziristan, au Pakistan, quand l’armée d’Islamabad a lancé au milieu des années 2010 des opérations contre le TTP.

Réfugié, il s’est installé de l’autre côté de la frontière, que l’on peut voir courir sur les crêtes des montagnes, à moins de deux kilomètres de là. «Le Pakistan a détruit nos maisons (au Waziristan). Nous sommes venus ici en Afghanistan, et cela fait huit ans que nous n’avons pas reçu d’aide.

Puis le Pakistan nous a bombardés sur le sol afghan. Cela a rendu nos enfants très instables mentalement», relate-t-il. «Et maintenant, après le tremblement de terre, les répliques, les enfants ne peuvent plus dormir la nuit», poursuit-il.

Dans la nuit de dimanche à lundi, la terre a de nouveau tremblé, ont constaté des journalistes de l’AFP à Aghan-Dubaï. «La vie ici est très dure. Nous supportons toutes les difficultés. Les pays voisins et le gouvernement (afghan) devraient aider les gens de cette région (...). Les enfants vivent sans toit et sous la pluie, et personne ne s’intéresse à notre sort», soupire Hazrat Omar.

Hier matin, dès 5h, le soleil à peine levé, des habitants des environs s’approchaient déjà du centre de distribution. Une ONG afghane installait des lots de sacs de farine, tapis et couvertures. Les talibans eux préparaient leurs bâtons. 

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