A genoux, regard plongé dans la mer, Simènou Dangnitché, 48 ans, toute de blanc drapée, plusieurs rangées de perles au cou, aux poignets et aux pieds, vient d’accomplir la dernièreétape de son rituel annuel. «Plus qu’une simple fête, le rendez-vous ici est un pèlerinage, un ressourcement, une reconnexion avec les ancêtres pour les entendre nous parler à nouveau», souffle-t-elle à l’AFP avant de rejoindre un groupe d’adeptes avec lequel elle exécute quelques pas de danse.
Comme chaque 10 janvier depuis une quinzaine d’années, elle se joint à des centaines de fidèles et de dignitaires sur la plage de Ouidah, au sud du Bénin, à la Porte du non-retour, ancien lieu d’embarcation des esclaves, pour célébrer le vodun et ses nombreuses divinités.
Le vodun, appellation locale pour le vaudou, est basé sur les forces de la nature et du lien avec les ancêtres, dont les représentations peuvent être des objets ou des éléments naturels. Cette année, elle se dit «sublimée par l’organisation et la structuration de la fête». Pour cette édition, le gouvernement béninois a en effet décidé de changer un peu la formule, afin de rendre les festivités plus attractives pour les touristes et ainsi dynamiser l’économie du pays. En lieu et place du format habituel, il a opté pour une célébration sur deux jours, les 9 et 10 janvier, sur fond de réorganisation et de meilleure programmation. L’événement a été baptisé «Vodun Days». Selon Kakpo Mahougnon, député et président du Comité des rites vodun du Bénin, le gouvernement envisage même d’étendre la durée de la fête.
Peau neuve
«Nous avons fait un test avec les Vodun Days. Il y a un nouveau modèle pour la fête et pour les festivités vodun. C’est une nouvelle dynamique de présentation de vodun», a expliqué le président Patrice Talon lors d’un entretien avec des médias, dont l’AFP.
«Notre intention est de révéler entièrement au monde ce qu’est le vodun et sa pratique, expliquer le vodun, ses concepts spirituels et sociologiques», a indiqué le président béninois. Pour l’occasion, la ville de Ouidah a fait peau neuve. Tous ses lieux d’attraits ont été réhabilités et réaménagés.
Christopher Swain, un Afro-Américain qui vient chaque année «se ressourcer et se reconnecter spirituellement», note «des changements significatifs» dans la cité. Caravane brésilienne avec le groupe Bantu Afro-Brasileiros, jazz, vedettes béninoises et internationales, le groupe Tabou combo, la nigériane Yemi Alade ou encore le Congolais Koffi Olomidé... Les places publiques de Ouidah ont accueilli diverses manifestations et festivités auxquelles les plus hautes autorités du pays ont participé. Patrice Talon a lui-même été vu en train de danser le compa et le soukous aux concerts, ou encore de s’agenouiller devant les Egungun (revenants) lors des célébrations.
«Ces célébrations symbolisent une évolution majeure dans la valorisation du vodun comme un véritable catalyseur du tourisme» et constitue «un moyen d’attirer davantage la curiosité pour que les gens viennent découvrir le vodun dans son essence», estime Alain Godonou, l’un des responsables de l’Agence des patrimoines et du tourisme. Outre les touristes internationaux, le gouvernement veut mettre l’accent sur le tourisme intérieur pour dynamiser l’économie locale et «révéler le Bénin à nous-mêmes», selon les termes du chef de l’Etat. Interrogé par les médias, Patrice talon n’a pas souhaité donner de détails sur le budget alloué à la promotion et à l’organisation des Vodun Days pour attirer les visiteurs.