Tintin au Congo ressort muni d'une préface sur son contexte colonial

10/12/2023 mis à jour: 08:22
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Tintin au Congo est réapparu discrètement en novembre dans une version inédite, colorisée et dotée d'une nouvelle couverture, accompagnée d'une préface contextualisant l'album glorifiant la colonisation.

Le coffret intitulé «Les colorisés», sorti le 1er novembre, propose également Tintin au pays des Soviets (1930) et Tintin en Amérique (1932). Tintin au Congo, créé par Hergé, est publié dans sa version originale, parue en feuilleton en 1930-1931 dans Le Petit Vingtième, puis en volume en 1931. Bien qu'initialement en noir et blanc, les éditions Moulinsart et Casterman ont ajouté des couleurs.

L'éditeur a fait peu de publicité autour de cette sortie, malgré son importance. Pascal Blanchard, historien spécialiste de l'imaginaire et de la propagande colonialiste, a été informé de cette publication seulement lorsqu'il a été contacté par l'AFP.

«C'est très intéressant et intelligent de leur part de faire ce travail. Car il faut publier Tintin tel qu'il était à l'époque», commente-t-il. Cependant, il souligne le manque d'informations sur la préface sur la couverture et la modification de l'image de la couverture qui a déracialisé le personnage congolais, remplacé par Tintin affrontant un lion.

La version de Tintin au Congo de 1946, plus connue, avait été entièrement revue, avec des changements significatifs, notamment une scène où Tintin donne un cours de mathématiques sur la Belgique au lieu d'une leçon de mathématiques aux écoliers congolais.

La controverse autour de Tintin au Congo, qui dépeint le Congo belge comme une colonie stéréotypée, n'a jamais complètement disparu depuis plus d'un demi-siècle. La principale question est de savoir si les personnages noirs sont simplement caricaturaux ou franchement racistes.

Hergé avait reconnu cette controverse à la fin de sa vie, expliquant qu'il avait dessiné les Africains selon les critères paternalistes de l'époque. La préface de la nouvelle édition a été rédigée par Philippe Goddin, expert en bande dessinée et président de l'association Les Amis de Hergé, qui soutient qu'Hergé n'était pas raciste et brocardait l'ensemble de son monde, Blancs comme Noirs.

Pascal Blanchard est sceptique quant à cette affirmation, estimant que la préface est contestable. Il souligne qu'Hergé a fait un choix politique en ignorant les sources décrivant la violence de la colonisation. Patrick Lozès, fondateur du Conseil représentatif des associations noires (Cran), salue la préface de 2023 mais aurait préféré une deuxième préface signée par un grand historien comme Elikia M'Bokolo, spécialiste congolais de l'Afrique aux XIXe et XXe siècles.

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