Soupçons de financement libyen : Ouverture du procès de l’ex-président français Nicolas Sarkozy

07/01/2025 mis à jour: 19:36
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Le cinquième procès en cinq ans de l’ancien président français, Nicolas Sarkozy(2007-2012), s’est ouvert hier à Paris : il doit répondre cette fois d’accusations de financement illégal de sa campagne de 2007 par la Libye de Mouammar El Gueddafi, rapporte l’AFP. Parmi les 11 autres prévenus, figurent les ex-ministres Brice Hortefeux, Claude Guéant et Eric Woerth, ainsi que Thierry Gaubert, un proche de Nicolas Sarkozy, et l’intermédiaire Alexandre Djouhri. 

L’entourage de Nicolas Sarkozy, 69 ans, assure qu’il est «combatif» et «déterminé» à prouver son innocence face à ce qu’il a toujours qualifié de «fable». Il est accusé, alors qu’il était ministre de l’Intérieur, d’avoir passé fin 2005, notamment avec l’aide de ses très proches, son directeur de cabinet Claude Guéant et Brice Hortefeux, un «pacte de corruption» avec le dirigeant libyen, pour qu’il «soutienne» financièrement son accession à la présidence française. Jugé pour «corruption, recel de détournement de fonds publics, financement illégal de campagne et association de malfaiteurs», Nicolas Sarkozy encourt 10 ans de prison et 375 000 euros d’amende, ainsi qu’une privation des droits civiques (donc une inéligibilité) allant jusqu’à cinq ans. «J’ai la conviction d’une culpabilité» tirée «d’auditions, de témoins, de retraçage de flux financiers, d’éléments d’entraide qui nous ont été fournis par 21 pays», a déclaré le procureur financier Jean-François Bohnert hier sur BFMTV/RMC.  «Notre travail n’est pas un travail politique», a-t-il affirmé. 

«Nous n’avons qu’une seule boussole, c’est la loi.» Nicolas Sarkozy a déjà été condamné en première instance et en appel pour «financement illégal de campagne» à un an d’emprisonnement, dont six mois ferme sous bracelet électronique, une sanction inédite pour un ancien chef d’Etat en France. Il a formé un pourvoi devant la Cour de cassation (juridiction la plus élevée de l’ordre judiciaire français) dans ce dossier lié aux dépenses excessives de sa campagne présidentielle perdue de 2012. 

L’ex-Président ne porte pas encore de bracelet électronique, cela peut prendre  plusieurs semaines. Le procès débutera avec l’appel des 12 prévenus, des parties civiles et des témoins, avant les questions de procédures, qui devraient occuper le tribunal toute la première semaine. Les audiences auront lieu les lundi, mercredi et jeudi après-midi, jusqu’au 10 avril. Nicolas Sarkozy sera, selon son entourage, présent à chaque audience pendant le premier mois, consacré aux soupçons de financement.

 Des volets annexes seront abordés les semaines suivantes. «Il va combattre la construction artificielle imaginée par l’accusation. Il n’y a aucun financement libyen de la campagne», a déclaré son avocat, Me  Christophe Ingrain. Nicolas Sarkozy conteste tout : pour lui, les accusations des Libyens ne sont qu’une «vengeance» s’expliquant par son soutien actif aux rebelles libyens au moment du Printemps arabe qui fera chuter le colonel Gueddafi, tué en octobre 2011.  L’accusation estime que le «pacte de corruption» s’est noué à l’automne 2005 à Tripoli, sous la tente de Mouammar El Gueddafi, connu pour être très généreux avec ses visiteurs étrangers.  Nicolas Sarkozy était alors un ambitieux et très médiatique ministre pensant à la présidentielle. Sa visite en Libye était officiellement consacrée à l’immigration clandestine. 


L’accusation n’a pas pu établir un montant total exact du financement présumé. Mais après 10 ans d’enquête, un «faisceau d’indices» a convaincu les juges d’instruction. Les contreparties supposées ? D’abord une réhabilitation internationale : El Gueddafi sera accueilli en grande pompe en 2007 par Nicolas Sarkozy fraîchement élu Président lors d’une visite controversée à Paris, première depuis trois décennies. Mais aussi la signature de gros contrats et un coup de main judiciaire à Abdallah Senoussi, directeur des renseignements libyens condamné à perpétuité en son absence en France pour son rôle dans l’attentat du DC-10 d’UTA en 1989, qui a coûté la vie à 170 personnes, dont 54 Français. Une vingtaine de proches sont parties civiles au procès. 

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