Selon des experts : La Chine veut augmenter son arsenal nucléaire à un niveau sans précédent

27/04/2023 mis à jour: 22:17
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La Chine cherche à étendre et moderniser son arsenal nucléaire à un niveau sans précédent afin de doper sa force de dissuasion en cas de conflit avec les Etats-Unis, indiquent des experts, dans des propos recueillis par l’AFP. Selon l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), la Chine compte un arsenal de 350 têtes nucléaires, loin derrière la Russie (4477) et les Etats-Unis (3708). 

Mais Pékin pourrait en avoir 1500 d’ici 2035, prédit un rapport du ministère américain de la Défense paru en novembre. «La Chine semble ne plus vouloir se contenter de quelques centaines d’armes nucléaires pour assurer sa sécurité», juge Matt Korda, de la Federation of American Scientists, une ONG américaine qui étudie notamment la prolifération nucléaire. 

Après son premier essai nucléaire en 1964, la Chine s’est contentée de maintenir un arsenal modeste et s’est engagée à ne jamais utiliser une arme atomique en premier, assurant qu’elle n’y aurait recours que si elle-même en est la cible. Pendant la dernière décennie, le président Xi Jinping a encouragé une vaste modernisation de l’armée, qui est passée notamment par l’amélioration de ses capacités nucléaires. «La Chine entreprend actuellement l’expansion et la modernisation de ses forces nucléaires les plus importantes de toute son histoire», affirme David Logan, professeur au Naval War College, un institut de recherche et d’enseignement de la marine américaine. 

Selon lui, ce pays cherche non seulement à augmenter la production d’ogives mais aussi à améliorer sa capacité de les propulser du sol, d’un avion ou d’un sous-marin. La Chine construit par ailleurs «rapidement» des installations de tir de missiles balistiques intercontinentaux et compte plus de 300 silos au total, selon le ministère américain de la Défense. 

Le géant asiatique a répété à maintes reprises qu’il maintient sa force nucléaire «au niveau le plus bas nécessaire à la sécurité nationale». Le mois dernier, dans une déclaration commune avec le président russe, Vladimir Poutine, Xi Jinping a également soutenu qu’aucune guerre nucléaire ne doit «jamais être déclenchée». 

Écueils et nécessités

La Campagne internationale pour l’abolition des armes nucléaires, une coalition d’ONG, estime que la Chine a consacré 11,7 milliards de dollars (10,7 milliards d’euros) à son programme nucléaire en 2021, soit moins d’un tiers de ce que les Etats-Unis auraient dépensé. Plusieurs obstacles entravent toutefois le renforcement rapide par la Chine de son arsenal nucléaire, jugent des experts, elle dispose de moyens limités pour produire les matières fissiles indispensables à la fabrication d’ogives. 

La Russie pourrait potentiellement lui apporter son aide. Pékin et Moscou se sont engagés à renforcer leur coopération nucléaire au cours du récent sommet entre Xi Jinping et Vladimir Poutine. De hauts responsables russes dans le domaine de l’énergie atomique ont accepté d’aider la Chine à se doter de «réacteurs rapides», qui sont censés produire des matières fissiles beaucoup plus rapidement qu’ils ne les consomment. Selon Pékin, l’accord ne concerne que son programme nucléaire civil. 

Mais des experts considèrent qu’il pourrait également servir à constituer des stocks de matières fissiles destinées à des armes nucléaires. «Il serait techniquement possible à la Chine d’augmenter considérablement ses stocks de plutonium avec ses nouveaux réacteurs civils à neutrons rapides utilisant du combustible fourni par la Russie», note Matt Korda. «Cependant, rien n’indique que la Chine a l’intention de faire cela», souligne-t-il. 

La Chine dispose de «réserves très limitées, ce qui empêche une montée en puissance rapide», indique Gregory Kulacki, le responsable Chine à l’Union of Concerned Scientists, une organisation américaine de scientifiques. «D’après les informations publiques sur le rythme de développement du programme de surgénération», constitué par ces réacteurs capables de produire plus d’isotopes fissiles qu’ils n’en consomment, «il sera difficile pour la Chine de produire rapidement le plutonium dont elle a besoin», explique-t-il. 

Si le ministère américain de la Défense a parfois tendance à exagérer la menace chinoise afin d’obtenir des financements supplémentaires, Pékin a également des raisons objectives de vouloir accroître ses capacités. «Les stratèges chinois s’inquiètent de la possibilité que les Etats-Unis effectuent une première frappe» nucléaire qui puisse empêcher la Chine de répliquer, analyse David Logan, professeur au Naval War College. «Le renforcement nucléaire (chinois) vise probablement en partie» à contrer cette possibilité, ajoute-t-il. 

Des experts pensent que Pékin entend en outre faire réfléchir Washington au coût d’une participation américaine à un conflit dans la région. La Chine estime que Taïwan est l’une de ses provinces, qu’elle n’a pas encore réussi à réunifier avec le reste de son territoire depuis la fin de la guerre civile chinoise en 1949. Pékin pense probablement qu’«une force nucléaire plus importante est nécessaire pour dissuader les Etats-Unis de s’impliquer dans un futur conflit potentiel dans le détroit de Taïwan», déclare Ankit Panda, de la Fondation Carnegie pour la paix internationale. 

La Chine considère Taïwan comme une province qu’elle n’a pas encore réussi à réunifier avec le reste de son territoire depuis la fin de la guerre civile chinoise en 1949. Pékin vise cette réunification par la force si nécessaire.
 

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