Embouteillages monstrueux et températures caniculaires, tel est le lot quotidien des malheureux automobilistes qui sont contraints d’emprunter les principaux axes routiers de Béjaïa. Un calvaire sans nom qui les oblige à subir des heures de conduite pare-choc contre pare-choc à cuire littéralement sous un soleil à faire fondre l’acier et le plastique de leurs véhicules.
Avec ses nombreuses stations balnéaires, Béjaïa étant une destination touristique de premier plan, les mois de juillet, août, spécialement les week-end et certains jours de la semaine, cela donne lieu à des bouchons homériques de plusieurs dizaines de kilomètres, ainsi qu’à des situations d’anarchie où tout le monde tente en désespoir de cause de passer coûte que coûte, quitte à rouler sur les accotements à droite comme à gauche, en double comme en triple file.
Cela conduit aussi à des crises de nerfs, des prises de bec et malheureusement à des malaises de la part de personnes âgées, de malades ou de bébés qui n’ont pas les capacités physiques ni morales de supporter une telle épreuve dans des conditions climatiques aussi extrêmes. Aujourd’hui comme hier, les cauchemars des automobilistes s’appellent Taqeriets, Akhenaq ou bien encore Sidi Aïch. Ils sont devenus synonymes de calvaire et de souffrance.
La situation, hélas, n’est pas nouvelle. On en parle à chaque rush estival, même si cela empire d’année en année. Il faut se rendre à l’évidence, la wilaya de Béjaïa ne possède pas de routes. Ses deux axes principaux, la RN9 et la RN26 ont dépassé leur point de saturation depuis très longtemps, d’autant plus que le projet de leur doublement a été purement et simplement abandonné. Celui de la RN26, qui dessert la haute Kabylie et la vallée de la Soummam, s’est arrêté à El Kseur, et celui de la RN9 qui dessert les régions de l’Est s’est arrêté dans la petite ville de Souk El Tenine, à l’entrée de l’étroite vallée de Oued Agrioun.
Le secteur des chemins de fer, qui devait soulager un tant soit peu ces routes étroites et délabrées, est dans le même état d’abandon, d’archaïsme et d’obsolescence. L’unique ligne de la région, qui court de Beni Mansour jusqu’au chef-lieu de wilaya, date du début du siècle dernier et n’a guère changé depuis l’époque héroïque de sa réalisation dans les années 1890, au temps des locomotives à vapeur et des diligences. Là encore, le projet de doublement et de rénovation de la voie pour permettre à des trains électriques de circuler à une plus grande vitesse vient à peine d’être entamé après des années de tergiversations.
Quant au projet du siècle, celui que toute la population attend avec impatience, la fameuse pénétrante autoroutière qui devait désenclaver toute la région et lui permettre de respirer un peu, a d’ores et déjà, très certainement, décroché le record du chantier le plus en retard au monde. Neuf ans après le lancement des travaux, la moitié seulement des 100 kilomètres promis a été livrée à la circulation.
Pourtant, ce ne sont ni les promesses ni les visites sur chantier des différents walis, qui se sont succédé à la tête de la wilaya de Béjaïa durant toute cette période, qui ont manqué. Cependant, les faits sont têtus et la réalité sur le terrain est tout autre. Sur certaines parties du tronçon Akhenaq-Sidi Aïch-Timezrit, les bulldozers en sont encore à peine à décaper les premières couches de terre et les barres de ferraille pointent désespérément vers le ciel sur certains ouvrages d’art. Après tout, il ne coûte rien de promettre chaque soir la lune à ses administrés.
En fait, le taux d’avancement des travaux du projet global serait autour de 80%, mais il n’y aura rien de concret tant que le tronçon névralgique de Akhenaq-Sidi Aïch-Timezrit qui connaît beaucoup de retard et dont le taux d’avancement est également de près de 80%, n’est pas achevé. C’est le nœud gordien du problème.
Plus loin, en direction de Béjaïa, deux tronçons ont été achevés, ou sont en voie de l’être complètement. Il s’agit de l’axe qui va de Timezrit jusqu’à Oued Ghir en passant par Merdj-Ouamane. Les travaux des bretelles et échangeurs en double voie pour permettre de fluidifier la circulation sont terminés à 100% nous dit-on.
En attendant donc la fin des travaux et l’achèvement de la pénétrante autoroutière, du moins jusqu’à Oued Ghir, au début de l’année 2023, si tout va bien, les automobilistes sont priés de prendre leur mal en patience. Pour trouver un peu de répit, beaucoup sont aujourd’hui contraints de voyager de nuit avec tous les risques et les contraintes que cela comporte. S’ils ne peuvent échapper aux supplices des embouteillages, au moins ils sont épargnés par les dards du soleil.