Recueil de poésie la petite ouvrière métisse de Sandrine Malika Charlemagne : La nostalgie comme seule vérité

10/09/2023 mis à jour: 13:45
1848
Photo : D. R.

Des poèmes sans grand détour énigmatiques et sans grandes métaphores démonstratives.

La poésie est le miroir de la vie. Elle répond non seulement aux appels et aux besoins de circonstances, mais célèbre également les moments intenses dans la vie du poète ou ce qu’il ressent à sa proximité. Sandrine Malika Charlemagne est une poétesse qui consacre ses jongleries verbales aux répliques de sa vie mouvementée.

La nostalgie, comme un beau rivage léché sans cesse par la vague, est le mot de ses apaisements et de toutes ses agitations. Elle chante l’Algérie, elle chante la nostalgie d’un pays qu’elle aime et dont elle se nourrit de tout ce qui vient, que ce soit ombre ou lueur, cela suffit pour rouler du feu dans ses textes… Moi au sommet du Djurdjura/Les cheveux poudrés de terre ocre/Les mains tendus vers un fil d’un blanc inviolable, entre ciel et moi/Moi en train de réciter la fatiha…

Ce recueil de poésie édité  chez La Rumeur libre Editions, s’intitule La petite ouvrière métisse. Il évoque le déchirement, un appel des racines qui serait comme un mirage du désert s’il n’y avait pas toutes (ces griffures) sur la peau. S’il n’y avait pas ce ressassement intense, qui ne se fait pas seulement en sursauts sporadiques mais en un grondement incessant, rythmé par les battements de son cœur.

Nourrie à la source de l’histoire de France, de la chanson de Roland à Victor Hugo ; nourrie au patrimoine chrétien avec tout le soubassement émotionnel, Sandrine Malika Charlemagne dont le nom même évoque un long épisode de cette histoire-là ne fait pourtant pas de sa poésie une arme pour combattre. Elle ne fait que secouer les bulles là où flottent le rêve et la réalité.

Loin de tous les raffinements de la cour ou de la nostalgie des conquêtes, elle ne fait que glisser dans la vie concrète de tous les jours, avec ses pages de gaieté et quelquefois des poids de la vie, lourds à porter. Elle raconte le viol, l’amour, l’enfance et… le droit des travailleurs en Amérique autrefois, dans les années vingt…

Frères militants ouvriers/Ils réclamaient justice/celle d’en bas/Celle de l’honneur des sans voix/Ceux dont on méprisait le métier/Ceux dont on profitait jusqu’à l’usure/Dans l’Amérique des années vingt…

Parfois, sa poésie prend de l’élan pour se tourner vers des images féeriques, emblèmes de son pays d’origine... Moi sur une couche de palme suivant le passage d’une cigogne/Entre deux nuages/Moi en train de goutter des figues fraîches/Qu’une vieille femme serait venue m’offrir/De ces gestes si hospitaliers, jamais fabriqués…

Des poèmes sans grands détours énigmatiques, sans grandes métaphores démonstratives. Il n’y a que des souvenirs qui surnagent au fond de soi, engloutis par la mémoire comme des épaves au fond des mers mais qui renaissent à chaque souffle, à chaque palpitation du cœur. L’auteure cependant ne nous donne pas de l’enchantement que dans ses pages de poésie.

Elle est également comédienne sur les planches, coréalisatrice de documentaires, notamment celui consacré à Gilberte et William Sportisse qui s’intitule Deux vies pour l’Algérie. Au cinéma, elle joue notamment dans le film Certifiée halal de Mahmoud Zemmouri. Elle anime également des ateliers d’écriture. Correspondance particulière de Lounès Ghezali


 

Copyright 2024 . All Rights Reserved.