Passeport : Chronique d'une mort annoncée

19/10/2024 mis à jour: 02:02
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Les voyageurs étrangers à l'UE devront désormais scanner leur passeport sur une borne en libre-service à l'aéroport

Qui ne s'est jamais amusé à observer, comme on admirerait une relique ou une antiquité, une vieille carte d'identité trouvée dans une boîte de souvenirs ? 

Double plaisir à la clé : celui d'admirer une photo figurant un visage jeune, et celui de manipuler un modèle papier à l'ancienne, symbole d'une époque révolue. Retrouverons-nous cette sensation dans quelques années, en dénichant, au fond d'un tiroir, un vieux passeport, dont chaque page égayée de tampons ressuscitera le souvenir d'un voyage oublié ?

Cela se pourrait bien. Comme beaucoup de documents, le passeport papier, tel que nous le connaissons aujourd'hui, est menacé par la dématérialisation. La Commission européenne, révèle Euronews, a dévoilé des projets de modernisation du dispositif. Et comme souvent, le smartphone entre en jeu.


Adieu passeport, bonjour smartphone

Actuellement stockées sur la puce d'un passeport ou d'une carte d'identité, les données personnelles, annonce la Commission, pourraient à l'avenir être transférées sur un téléphone, afin de permettre un passage plus rapide des frontières. 


Les voyageurs pourraient alors envoyer leur passeport à l'avance, afin que les vérifications aient déjà été faites au moment de leur passage à la douane. «Pas moins de 600 millions de personnes viennent visiter l'UE chaque année, ce qui représente une charge de travail importante pour les gardes-frontières», justifie la commissaire aux Affaires intérieures, Ylva Johansson. «Ce système permettrait aux gardes-frontières de se concentrer sur les cas plus complexes qui nécessitent un examen approfondi», a-t-elle ajouté, rappelant néanmoins que «le passeport numérique ne serait pas une obligation, mais une opportunité». Avant sa concrétisation, le projet, poursuit Euronews, doit être approuvé par le Conseil de l'UE et les législateurs du Parlement européen.


La dématérialisation, nouvelle lubie des aéroports


Quoi qu’il en soit, la disparition du passeport semble déjà amorcée dans certains aéroports du monde. A Singapour, l'aéroport de Changi dévoile un nouveau système biométrique pour le contrôle des passagers. 

Au lieu de présenter leur passeport, l'identité des citoyens singapouriens et des résidants de longue durée peuvent être contrôlés grâce à la reconnaissance faciale. Un système qui, promet l'aéroport, devrait réduire le temps d'attente aux douanes de 40%. Et que les autorités de l'immigration de Singapour prévoient d'étendre progressivement aux touristes étrangers et aux voyageurs d'affaires.


La technologie est déjà utilisée à l'aéroport d'Abou Dhabi, qui s'est lancé dans une course pour devenir le premier à permettre aux voyageurs de se déplacer sans documents officiels.


L'aéroport, détaillait il y a quelques semaines CNN, développe le projet Smart Travel, qui vise à installer des capteurs biométriques à chaque point de contrôle d'identification de l'aéroport, des comptoirs d'enregistrement aux cabines d'immigration, en passant par les caisses des boutiques duty-free et les portes d'embarquement. 

Les voyageurs soutiennent le passeport numérique. Autre exemple du raz-de-marée digital en cours, les passagers qui volent avec Air Europe peuvent d’ores et déjà, via le système Amadeus TravelReady, faire vérifier leur passeport numériquement avant leur arrivée à l'aéroport. Et ainsi gagner du temps une fois sur place.
La révolution numérique semble donc en marche. 


Si certains passagers regrettent la disparition des collections de tampons obtenus dans chaque pays visité, d'autres en ont déjà fait le deuil, forcés par l'obligation de rendre son passeport expiré pour en obtenir un nouveau.


La majorité des voyageurs, indique en tout cas l'Association internationale du transport aérien (IATA), milite pour une digitalisation des documents lors des déplacements. Dans une enquête réalisée en octobre 2023, 75% des passagers avaient ainsi déclaré qu'ils préféreraient utiliser des données biométriques plutôt que leurs passeports papier et cartes d'embarquement.


En Europe, un nouveau système de contrôle dès cet automne

Ce projet de dématérialisation du passeport annoncé par la Commission européenne s'invite dans l'agenda au moment où l'UE s'apprête à mettre en place un nouveau système d'entrée et de sortie (EES) sur son territoire.


Concrètement, les voyageurs étrangers à l'UE, qu'ils soient titulaires ou non d'un visa, devront désormais scanner leur passeport sur une borne en libre-service à l'aéroport, afin d'entrer dans un pays de l'UE pour un court séjour. Cette borne pourra enregistrer l'identité du voyageur, ses données biométriques (empreintes digitales et photo), et ses dates d'entrée et de sortie du territoire. 
Les données seront stockées pendant trois ans. Initialement prévu à partir du 10 novembre 2024, le dispositif pourrait être légèrement retardé.
 

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