Il baisse, il monte, il baisse : depuis deux mois, le dinar irakien n’en finit pas de fluctuer face au dollar sous l’effet de nouvelles règles sur la transparence des transferts, une instabilité derrière laquelle certains voient la main de Washington. Le taux de change officiel du dollar -- devise de référence en Irak -- reste abonné aux 1470 dinars.
Mais chez les changeurs, le taux est passé de 1.470 dinars mi-novembre à 1600 dinars en début de semaine, avant de se stabiliser, selon l’agence officielle INA. A première vue, cette baisse de la valeur du dinar n’est pas énorme. Mais la nervosité est palpable. Une baisse du dinar signifie un renchérissement des importations, de gaz ou de blé, denrée dont la culture a chuté en Irak en raison de sécheresses à répétition. «La baisse du dinar est due à des contraintes extérieures», justifie auprès de l’AFP Muzhar Saleh, un conseiller du Premier ministre Mohamed Chia al-Soudani. Mais pour certains responsables irakiens, le responsable est tout trouvé: les Etats-Unis. «Les Américains utilisent le dollar comme arme pour affamer les gens», s’est emporté mardi Hadi al-Ameri, patron du parti pro-iranien Fateh qui soutient le gouvernement irakien, selon des propos rapportés par les médias irakiens. Faux, contrecarre l’économiste irakien Ahmed Tabaqchali. «Il n’y a aucune preuve que les Etats-Unis fassent pression sur l’Irak», proche partenaire économique et financier de son voisin iranien, dit-il.
«Choc»
En réalité, les mouvements du dinar sont liés à certaines règles du système de transfert international Swift auxquelles se plient les banques irakiennes depuis la mi-novembre pour accéder aux dollars irakiens aux Etats-Unis. Pour puiser dans son stock de billets verts, l’Irak, qui dispose de réserves en devises étrangères supérieures à 100 milliards de dollars, doit «respecter les mesures de lutte contre le blanchiment d’argent, le financement du terrorisme et celles sur les sanctions, comme celles contre l’Iran et la Russie», explique Ahmed Tabaqchali. Il s’agit de faire adhérer l’Irak «à un système mondial de transferts financiers qui nécessite un haut degré de transparence». Nombre de banques irakiennes «ne sont pas habituées à ce système». «Cela a provoqué un choc», dit-il.
Car les banques irakiennes doivent désormais enregistrer «leurs virements (en dollars, ndlr) sur une plateforme électronique, vérifier les demandes. Ensuite, la Réserve fédérale les examine et si elle a des doutes, elle bloque le virement», poursuit Muzhar Saleh.
Depuis la mise en place de ce mécanisme, la Fed américaine a rejeté «80% des demandes» de transferts des banques irakiennes, car les autorités américaines avaient des soupçons sur les destinataires finaux des sommes à transférer, indique-t-il.