Depuis l’éclatement de la guerre en Ukraine et les perturbations en matière de transport et de logistique observées, les alertes et les avertissements se suivent concernant l’avènement d’une crise alimentaire mondiale et son impact sur certains pays.
Dans une récente étude publiée en ce mois de juin, l’assureur Allianz Trade avertit contre le risque d’un choc alimentaire dans certains pays en Afrique, en Asie et au Moyen-Orient. Ce choc pourrait induire des tensions sociales avec la flambée des prix des produits alimentaires, selon la même source «Si nous ne nourrissons pas les peuples, nous nourrissons le conflit», affirme l’assureur dans son étude.
Et d’analyser : «Le choc sur les prix alimentaires mondiaux représente une inquiétude particulièrement grande pour les pays qui sont importateurs nets d’aliments ou de certains aliments devenus rares en raison de la guerre en Ukraine, à l’instar des grains.» L’assureur estime que 11 Etats sont particulièrement à risque de voir émerger des conflits sociaux dans les prochaines années de ce fait.
Il s’agit de la Tunisie, la Bosnie-Herzégovine, l’Egypte, la Jordanie, l’Algérie, le Liban, le Nigeria, le Pakistan, les Philippines, la Turquie, le Sri Lanka, ce dernier pays traverse déjà sa pire crise économique depuis son indépendance. D’autres pays importateurs nets de nourriture présentent, selon l’assureur, un risque de conflits sociaux, mais moins élevé, comme la Roumanie, Bahreïn, ou le Kazakhstan.
L’Arabie Saoudite et la Chine sont aussi dans cette catégorie. L’assureur va plus loin et fait le parallèle avec l’épisode crisogène de fin 2010-début 2011.Souligant que ce choc réduit l’accès aux ressources, l’assureur ne manque pas de prévenir qu’une telle situation «pourrait même entraîner la chute de certains gouvernements, comme lors des printemps arabes».
Et ce, en référence aux mouvements de contestation populaires au tournant des années 2010 ayant été à l’origine de la chute de plusieurs régimes, tels qu’en Tunisie et en Egypte. A l’époque, faudrait-il rappeler, les prix alimentaires avaient augmenté de 50% alors qu’actuellement, avec le conflit entre la Russie et l’Ukraine, le cours du blé est désormais supérieur à son niveau de 2012.
Depuis l’éclatement de la guerre en mer Noire et les perturbations en matière de transport et de logistiques observées, les alertes et les avertissements se suivent concernant l’avènement d’une crise alimentaire mondiale et son impact sur certains pays. Des représentations onusiennes, des ONG (organisations non gouvernementales) et des cabinets d’expertise internationaux se sont penchés sur cette question, appelant les pays à se préparer à un choc alimentaire.
Le 9 juin, dans son rapport sur «Les Perspectives de l’alimentation», la Fao prévoit une hausse des dépenses mondiales d’importations alimentaires. Lesquelles devraient augmenter de 51 milliards de dollars (à 1800 milliards de dollars) par rapport à 2021, dont 49 milliards du seul fait de la progression des prix.
La Fao estime en effet que la flambée des prix des céréales et des engrais a contribué à aggraver les crises alimentaires, avec pour conséquence attendue en 2022 une hausse dramatique de la facture pour les pays importateurs, qui paieront «plus pour avoir moins».
Deux mois plus tôt, en avril dernier, le Fonds monétaire international (FMI) a également alerté sur «les risques de troubles sociaux» en Afrique subsaharienne en raison de la flambée des prix des aliments.
A titre indicatif, cette région importe 85% de sa consommation de blé, avec des montants particulièrement élevés en Tanzanie, en Côte d’Ivoire, au Sénégal et au Mozambique, selon le FMI.