Lourde peine pour Fethi Ghares

10/01/2022 mis à jour: 04:21
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Photo : D. R.

Engagé dans le hirak, le coordinateur national du Mouvement démocratique et social (MDS), Fethi Ghares, a été condamné à deux ans de prison ferme. Plusieurs personnalités et des partis politiques de l’opposition ont dénoncé le verdict du tribunal de Hammamet (Alger).

Le coordinateur national du Mouvement démocratique et social (MDS), Fethi Ghares, a été condamné, hier, par le tribunal de Hammamet (Alger) à deux ans de prison ferme, assortis d’une amende de 200 000 DA.

Lors du procès qui s’est déroulé le 26 décembre dernier, le procureur avait requis trois ans de prison ferme, assortis d’une amende de 100 000 DA. Un verdict qui a suscité l’indignation chez beaucoup de partis et personnalités politiques de l’opposition, dont certains se sont déplacés hier au tribunal en guise de soutien.

Arrêté à son domicile à Gué de Constantine, à Alger, le 30 juin 2021, avant sa présentation devant le procureur de la République, un jour plus tard, puis son placement sous mandat de dépôt par le juge d’instruction, le premier responsable du MDS a vu son procès programmé le 5 décembre, c’est-à-dire cinq mois après son arrestation, avant qu’il ne soit reporté au 12, puis au 26 décembre.

Fethi Ghares est poursuivi pour «atteinte à la personne du président de la République», «outrage à corps constitué», «diffusion au public de publications pouvant porter atteinte à l’intérêt national», «diffusion d’informations pouvant porter atteinte à l’unité nationale» et «diffusion d’informations pouvant porter atteinte à l’ordre public», comme l’a rappelé le Comité national pour la libération des détenus (CNLD).

Opposant farouche au régime, Fethi Ghares s’est fortement engagé dans le hirak depuis le début. Plusieurs personnalités et des partis politiques de l’opposition ont dénoncé, hier, la lourde condamnation prononcée contre le coordinateur du MDS.

«Il est dans la nature du pouvoir antidémocratique et antisocial de piétiner les lois qu’il a écrites et de réprimer toute alternative de progrès. La condamnation de Fethi Ghares à deux années de prison, prononcée aujourd’hui au tribunal de Baïnem, renforce même le sentiment qu’il est prêt à embraser l’Algérie pour assurer la pérennité de ses intérêts», a écrit sur les réseaux sociaux Yacine Teguia, membre de la direction du MDS.

«Fethi Ghares est sans illusions sur ses méthodes et sur son caractère arbitraire. C’est avec dignité et résolution à mener le combat jusqu’au bout qu’il a accueilli sa condamnation. Il sait que le verdict de l’histoire sera moins clément avec ses persécuteurs. La lutte pour libérer Fethi Ghares doit donc continuer, s’élargir et s’élever qualitativement. Elle est indissoluble du combat pour édifier une IIe République, pour un processus constituant de transition et pour déjouer pacifiquement les manœuvres du pouvoir», a-t-il encore ajouté.

«Renforcer la défiance envers la justice»

Pour le président du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), Mohcine Belabbas, «plus qu’un scandale politico-judiciaire, la condamnation de Fethi Gheras à deux années de prison ferme va renforcer la défiance du peuple algérien envers la justice de notre pays». «Cette décision illustre l’instrumentalisation politique de la justice, dont même les magistrats sont les victimes. Une justice déjà largement malmenée par le placement de dizaines de citoyens innocents dans les geôles du pouvoir sans jugement à ce jour», a encore estimé celui-ci.

Le Front des forces socialistes (FFS) a aussi, dans un communiqué, condamné «vigoureusement» cette sentence qui, selon le parti, «coïncide avec un recul important des libertés individuelles et collectives dans le pays et le recours systématique et de plus en plus fréquent à la criminalisation de l’acte politique».

Le FFS réitère «ses appels pour l’arrêt immédiat de ces pratiques répressives et abusives et exprime son total soutien à tous les détenus d’opinion et les organisations, politiques, associatives ou syndicales, victimes de ces politiques». «Scandaleux et honteux», a, quant à lui, estimé Saïd Salhi, vice-président de la Ligue algérienne de défense des droits de l’homme (LADDH), pour qui, «ce verdict est une preuve de plus, une dérive de trop dans la criminalisation de l’acte politique».

L’ancien député du Parti des travailleurs (PT), Ramdane Taazibt, s’interroge pour sa part si ce «verdict politique» est «un signe de force ou de faiblesse du régime».

«La condamnation de Fethi Gheras à deux ans de prison ferme est une preuve de l’instrumentalisation de la justice par le pouvoir politique pour casser l’opposition, mais aussi un signe de la fragilité du système en place», a estimé, par ailleurs, l’avocate et présidente de l’Union pour le changement et le progrès (UCP), Zoubida Assoul, dont le parti fait face à une menace de dissolution de la part des autorités.

Le collectif de défense du coordinateur du MDS a annoncé son intention d’interjeter appel de ce verdict prononcé par le juge du tribunal de Hammamet. 
 

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