Le chef de la diplomatie britannique, David Lammy, a qualifié hier sur la BBC de «poudre aux yeux» et de «fanfaronnade» la mise en garde de la Russie aux Occidentaux sur la possibilité d’autoriser Kiev à utiliser des missiles à longue portée, selon l’AFP.
Le président russe, Vladimir Poutine, «menace sur le sujet des chars, il menace sur celui des missiles et sur les armes nucléaires. Nous ne pouvons pas nous laisser dévier de notre cap», a-t-il poursuivi, qualifiant le chef du Kremlin de «fasciste impérialiste». Et d’affirmer : «Si nous le laissons faire avec l’Ukraine, croyez-moi, il ne s’arrêtera pas là.»
Le président V. Poutine a affirmé jeudi que si les Occidentaux autorisaient l’Ukraine à frapper le territoire russe avec des missiles à plus longue portée, cela signifierait que «les pays de l’Otan sont en guerre contre la Russie».
Les chefs de la diplomatie américaine et britannique, Antony Blinken et David Lindon Lammy, ont effectué une visite conjointe à Kiev mercredi. «Nous nous adapterons si nécessaire, notamment en ce qui concerne les moyens dont dispose l’Ukraine pour se défendre efficacement contre l’agression russe», a affirmé le lendemain le secrétaire d’Etat américain en Pologne.
Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, réclame à ses alliés la possibilité de frapper en profondeur sur le sol russe des cibles militaires jugées «légitimes», comme des bases aériennes d’où décollent les avions bombardant l’Ukraine. Participant par visioconférence au forum Yalta European Strategy, qui se tenait à Kiev, le conseiller à la Sécurité nationale de la Maison-Blanche, Jake Sullivan, a assuré samedi que le président américain, Joe Biden, qui rencontrera son homologue ukrainien fin septembre lors de l’Assemblée générale de l’ONU à New York, «est déterminé à utiliser les quatre derniers mois (de son mandat) pour mettre l’Ukraine dans la meilleure position possible pour l’emporter».
Le même jour, un haut responsable diplomatique russe, Sergueï Riabkov, a affirmé que l’Occident a pris des «décisions il y a quelque temps» pour permettre à Kiev de frapper la Russie en profondeur. «Washington et Londres font évoluer la situation vers une escalade mal contrôlée. Nous avertissons quotidiennement les autorités contre les conséquences de ce genre d’action», a-t-il affirmé, cité par l’agence TASS. Alors que Volodymyr Zelensky et d’autres dirigeants ukrainiens ne cessent de dénoncer les retards de l’aide militaire occidentale, notamment américaine, Jake Sullivan a assuré que ce problème était dû à une logistique difficile et non à un manque de volonté politique de soutenir Kiev.
«Ce n’est pas une question de volonté politique. C’est une question de logistique difficile et compliquée (...) pour livrer ce matériel sur le front», a-t-il déclaré.
Le cas allemand
Washington autorise actuellement Kiev à ne frapper que des cibles russes dans les parties occupées de l’Ukraine et certaines dans les régions frontalières russes directement liées aux opérations de combat de Moscou. Selon des médias britanniques, Joe Biden, qui craint un conflit nucléaire, est prêt à autoriser l’Ukraine à déployer des missiles britanniques et français utilisant la technologie américaine, mais pas les missiles américains eux-mêmes. En recevant le Premier ministre britannique, Keir Starmer, il a indiqué vendredi qu’il ne «pensait pas beaucoup à Poutine», en réponse à une question concernant les menaces du président russe sur une possible guerre entre la Russie et l’Otan.
Ces discussions interviennent à un moment tendu, en pleine campagne présidentielle américaine. Lors du débat cette semaine face à sa rivale démocrate Kamala Harris, le candidat républicain Donald Trump a refusé de dire qu’il espérait que Kiev gagnerait la guerre contre la Russie. Joe Biden a déclaré mardi que les Etats-Unis «travaillaient» à autoriser l’Ukraine à utiliser des missiles à plus longue portée contre la Russie. De son côté, le chancelier allemand, Olaf Scholz, a déclaré vendredi que son pays ne changera rien à sa décision de ne pas livrer à l’Ukraine de missiles de longue portée.
«L’Allemagne a pris une décision claire sur ce que nous faisons et ce que nous ne faisons pas. Cette décision ne changera pas», a déclaré le dirigeant allemand lors d’une conférence de presse à Berlin. Il n’a cessé de réaffirmer son opposition à ce que son pays, plus grand contributeur européen d’aides financières et militaires à l’Ukraine, livre à Kiev des missiles longue portée Taurus, de fabrication allemande. Interrogé sur ce sujet, le porte-parole d’Olaf Scholz, Steffen Hebestreit, a déclaré que «les armes dont les Etats-Unis et la Grande-Bretagne discutent actuellement sont des armes que nous n’avons pas fournies (...) et à cet égard, il n’y a pas de changement».
Olaf Scholz est «très ferme» sur ce sujet, a-t-il ajouté. Le parti social-démocrate du chancelier a été largement battu dans deux élections régionales récentes par le parti d’extrême droite AfD, opposé au soutien miliaire à l’Ukraine. En août, l’Allemagne a décidé de réduire son budget dédié à l’aide militaire en Ukraine. Actuellement de 8 milliards d’euros pour l’année 2024, elle sera divisée par deux (soit 4 milliards d’euros) pour l’année prochaine.