La question des détenus d’opinion est au centre des préoccupations des formations politiques et personnalités de l’opposition et des défenseurs des droits de l’homme depuis maintenant près de trois ans. Pour certains d’entre eux, leur libération est un préalable à toute éventualité d’adhésion à un quelconque processus ou démarche politique à venir.
Après avoir proposé sa «main tendue», via une dépêche de l’agence officielle le 3 mai dernier, le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a commencé à recevoir, à partir du 9 mai, des chefs de parti politique et des personnalités à la présidence de la République. Il est question, entre autres, de «rassemblement» et de «front interne».
Quelques-uns, parmi ses invités, ont, une nouvelle fois, mis sur la table la question de la libération des détenus d’opinion. Reçu le 2 juin dernier, le premier secrétaire national du Front des forces socialistes (FFS), Youcef Aouchiche, a indiqué, à sa sortie du siège de la Présidence, que la libération des détenus d’opinion, à commencer, a-t-il précisé, par Mohamed Baba Nedjar jusqu’à Smail Chaalal, P/APC de la commune d’Azzefoun, «est un préalable pour tout dialogue». Il a également évoqué l’annulation de toutes les lois liberticides, la levée des contraintes imposées aux partis, syndicats, associations et aux médias.
S’étant également déplacé au siège de la Présidence, le 11 mai, l’ancien ministre Abdelaziz Rahabi a indiqué, quelques jours plus tard sur une chaîne de télévision privée, que «la poursuite des emprisonnements, la fermeture de l’espace médiatique et le blocage de l’activité des partis…sont des conditions qui ne favorisent pas le dialogue».
Il a évoqué un problème d’absence de confiance. Soufiane Djilali, de Jil Jadid, est également allé dans le même sens. Il avait indiqué, le 15 mai sur les ondes de la Chaîne 3 de la Radio nationale, à propos de sa rencontre avec le chef de l’Etat, qu’il avait «insisté auprès du président Tebboune sur la fait que les médias doivent s’ouvrir plus largement sur les débats». «Nous sommes conscients des menaces de déstabilisation, mais les dimensions judiciaire et sécuritaire ne peuvent à elles seules résoudre les problèmes du pays», a-t-il encore ajouté.
Parmi les formations politiques non invitées à la Présidence (ou pas encore), il n’est nullement question d’un quelconque dialogue sans ces préalables. Tout en indiquant que son parti n’a pas encore reçu d’invitation, la présidente de l’Union pour le changement et le progrès (UCP), Zoubida Assoul, a déclaré, lors de l’émission CPP de Radio M, qu’«il faut qu’il y ait des mesures d’apaisement avant de parler d’un dialogue sérieux qui s’inscrive dans une solution durable».
Pour d’autres partis, à l’image du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) ou le Mouvement démocratique et social (MDS), il n’est pas question d’accepter une invitation, «alors que des dizaines de citoyens sont injustement emprisonnés». Tout cela pour dire que la problématique des détenus d’opinion, en plus de ses effets sur l’image de l’Algérie sur le plan international en matière de respect des libertés et des droits de l’homme, est un frein à tout processus de règlement de la crise politique qui s’est installée depuis le début du hirak, en février 2019.
Le président Tebboune va-t-il répondre favorablement à la doléance exprimée par certains partis et personnalités qu’il a reçus ? Si des informations faisant état d’une probable libération des détenus d’opinion à l’occasion du 5 Juillet sont relayées ici et là, il n’y a aucun élément qui plaide pour cela pour l’instant.
Quelques mesures ont été prises par le passé, mais il s’est agi à chaque fois de libération d’un nombre réduit par rapport au total qui dépasserait, selon le Comité national pour la libération des détenus (CNLD), les 300 détenus. Et entre-temps, les interpellations et placements sous mandat de dépôt de militants et d’activistes se sont poursuivis.
Un climat délétère qui entraverait tout dialogue ou processus politique qui se veut «rassembleur».