Les greffiers menacent de durcir leur mouvement de protestation

05/01/2022 mis à jour: 18:37
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Pour le troisième jour consécutif, les greffiers désertent les salles d’audience et les bureaux des tribunaux et cours en signe de protestation contre leur situation socioprofessionnelle. Regroupés lundi devant le tribunal de Sidi M’hamed, à Alger, ils ont exprimé leur volonté de «durcir» leur mouvement de protestation «si les autorités ne prennent pas en compte» leurs revendications, notamment la révision de leur statut, le versement des primes de redevance, la promotion dans la carrière, les salaires et les œuvres sociales.

Depuis jeudi dernier, les greffiers boycottent les audiences et les bureaux dans les tribunaux et cours de nombreuses wilayas, notamment à Alger, où ils sont arrivés à paralyser les activités de plusieurs juridictions, notamment les audiences civiles et les prestations administratives.

Très tôt dans la matinée, ils étaient nombreux à se regrouper à l’extérieur du tribunal de Sidi M’hamed pour clamer leurs revendications, liées surtout à la revalorisation de leurs salaires, à la révision de leur statut particulier, au versement des primes de redevance, estimées à 7% des montants des amendes récupérées par année, non perçues depuis 2017 ainsi que la promotion et l’avancement dans la carrière. «Le nouveau statut en élaboration est contraire à la législation internationale.

Celle-ci prévoit trois grades, alors que les initiateurs du projet en escomptaient plusieurs. Ce texte n’a pas été discuté avec les représentants de la base», s’insurge un des protestataires. Avant qu’une de ses collègues n’intervienne : «Le syndicat n’est pas représentatif de toute la corporation. Il faut élargir le débat à toutes les juridictions. Le projet de statut ne répond pas aux attentes de la majorité des greffiers.

Cela fait des années que nous sommes bloqués dans nos grades et postes. Nous n’avançons pas. Nous ne percevons ni la prime de panier ni celle de transport, alors qu’elles sont prévues par la loi. Nous ne profitons pas des œuvres sociales.» Ils sont nombreux à vouloir exprimer leur colère mais chacun refuse que son identité soit divulguée de peur des «représailles».

«Nous avons tenu à respecter le service minimum en travaillant uniquement dans les audiences pénales, surtout lorsqu’il y a des détenus ou des affaires liées à des délais. Nous ne voulons pas être des perturbateurs, mais nous ne pouvons pas rester en marge du secteur. Si aujourd’hui (hier) nous sommes sortis dans la rue, c’est parce que les autorités n’ont pas répondu à notre plateforme de revendications. Nous sommes prêts à durcir notre mouvement de protestation en paralysant l’ensemble des audiences au niveau national.

Nous nous battons pour nos droits. Savez-vous que les greffiers, qui sont des licenciés en droit, touchent des salaires de 30 000 à 36 000 DA ? Souvent, nous travaillons jusque tard dans la nuit, et le lendemain, nous sommes tenus d’être à l’audience dès 8h. Pourtant, nous n’avons jamais perçu le paiement des heures supplémentaires, ni d’indemnités ou de primes», lance une greffière, sur un ton coléreux.

La promesse d’une revalorisation des salaires non tenue

Lui emboîtant le pas, un ancien syndicaliste, greffier en chef licencié en droit, revient sur le premier mouvement de contestation, observé en début de l’année 2021, qui a duré une dizaine de jours, suscitant un chamboulement dans la programmation des procès et obligeant le ministre des la Justice, alors Belkacem Zeghmati, à recevoir une délégation de la corporation, devant laquelle il s’est engagé à leur faire bénéficier d’une revalorisation de salaires, pouvant atteindre les 85% de leur rémunération, et ce, avec effet rétroactif à partir de janvier 2008.

«De nombreuses réunions ont lieu pour préparer la révision du statut particulier. Malheureusement, le décret portant régime indemnitaire des personnels des greffes de juridiction était déjà prêt. Il a été publié au mois de février (2021) et ne fait pas mention des détails de l’augmentation, ni de la date de son entrée en vigueur.

Pour nous, les engagements du ministre n’ont pas été respectés. Nous sommes donc dans l’obligation de continuer la lutte pour arracher nos droits. Le silence des autorités n’augure rien de bon. Depuis jeudi, c’est le silence radio. Nous ne comptons pas faire marche arrière. Si nous n’obtenons rien, nous serons obligés de durcir notre mouvement de contestation», déclare ce greffier en chef.

Tous les jours de toute la semaine en cours, ils se sont entendu pour occuper les abords des tribunaux et cours afin de se faire entendre. Ils reconnaissent qu’en absence de représentation et d’organisation, ils peuvent tomber sous le coup de la loi, d’autant que le «boycott», pour ne pas dire la grève, a été décidé de manière spontanée, sans préavis.

«Nous n’avons pas de syndicat. Celui qui existe ne nous représente pas. Nous sommes dans l’obligation de passer à des actions de protestation pour nous faire entendre. Les autorités ne nous ont pas laissé d’autres voies. Elles nous ont ignoré et poussé à opter pour des actions de protestation», conclut une des grévistes. 

 

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