Large victoire de l’extrême droite aux législatives : Un pro-russe aux portes du pouvoir en Autriche

01/10/2024 mis à jour: 17:17
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Herbert Kickl est-il un roi nu ? Au lendemain de la victoire historique de l’extrême droite, les tractations en coulisses ont déjà commencé hier pour former une coalition, mais le chef du FPO risque fort d’être exclu du pouvoir. «Vainqueur, et maintenant ?», titre le quotidien Kurier, car personne ne veut s’allier à ce politicien de 55 ans jugé bien trop radical: portant un agenda illibéral et anti-européen, il est opposé aux sanctions contre la Russie. 

Face à ce barrage, il pourrait connaître le même sort que Geert Wilders aux Pays-Bas, qui a dû renoncer à ses ambitions de Premier ministre, ou que le Rassemblement national (RN) français, écarté par le front républicain. A l’étranger, les félicitations des autres formations d’extrême droite ont afflué. «Les temps changent», s’est félicité M. Wilders après l’annonce des résultats, citant onze pays européens où les nationalistes ont le vent en poupe. Dans la Hongrie voisine, le dirigeant Viktor Orban a salué une «nouvelle victoire pour les patriotes». En Italie, le dirigeant de la Ligue Matteo Salvini a parlé d’une «journée historique en faveur du changement» et en France, Marine Le Pen d’«une lame de fond».   


En obtenant 28,8% des voix devant les conservateurs, Herbert Kickl a fait mieux que ses prédécesseurs, Jörg Haider et Heinz-Christian Strache. Sans provoquer la même réaction dans les rues : cette fois, pas de grandes manifestations. «Nous nous y attendions, alors nous ne sommes ni choqués ni ravis», confie à l’AFP Isabella, une quinquagénaire viennoise qui a refusé de donner son nom de famille. Certes, le fond de l’air est «révolutionnaire», comme l’écrit la Kronen Zeitung, le tabloïd le plus puissant du pays. Mais «le jeu de poker qui commence sera dur, long et turbulent». Sachant que les tractations durent en moyenne 62 jours, avec un record de 124 jours en 1999-2000. 
 

Turbulences en vue

La balle est désormais dans le camp du président de la République, Alexander Van der Bellen, issu des écologistes. «La tradition veut qu’il remette le mandat au parti arrivé premier», rappelle Andreas Eisl, chercheur à l’Institut Jacques Delors. Mais il n’a pas caché ses réticences envers Herbert Kickl et a prévenu: le gouvernement doit obtenir le soutien d’une majorité de 92 députés, et ne remettre en cause ni les fondements de la démocratie, ni les engagements de l’Autriche à l’étranger.


Confier au FPO le soin de mener des négociations serait symboliquement chargé : une première depuis 1945 pour cette formation fondée par d’anciens nazis et dirigée par un homme qui veut se faire appeler Volkskanzler, le «chancelier du peuple» - comme Hitler. Le chef d’Etat a aussi le pouvoir de confier la tâche aux conservateurs de l’OVP (26,3%), même s’ils enregistrent la plus lourde défaite de leur histoire. «C’est un vrai enjeu», note M. Eisl: dans ce cas, il prêterait le flanc aux critiques de M. Kickl qui a déjà commencé à se plaindre d’un «déni de démocratie». Ce serait alors le chancelier sortant Karl Nehammer qui serait à la manœuvre, avec la possibilité de pactiser avec le FPO, comme en 2000 et 2017.


Les scandales à répétition ont rendu les conservateurs prudents et contrairement à son mentor Jörg Haider en 2000, Herbert Kickl ne semble pas avoir l’intention de se mettre en retrait, selon l’expert. Une formule inédite pourrait voir le jour selon cet analyste, avec «une coalition tripartite» alliant l’OVP, les sociaux-démocrates du SPO (21,1%) et le petit parti libéral Neos (9,2%). «Entre l’OVP et le SPO, les divergences sont grandes», souligne Johannes Reiter, un retraité de 74 ans. «Ils vont devoir trouver un terrain d’entente mais en fin de compte, cela se fera», veut-il croire. Le parti social-démocrate, très affaibli et divisé, n’a pas de très bonnes cartes pour négocier, même si le bastion de Vienne et les villes se maintiennent. Un élément devrait faciliter la tâche au chancelier : les petits partis, comme l’iconoclaste «Parti de la bière» ou les communistes, n’ont pas récolté suffisamment de voix pour rentrer au Parlement. 

Selon le quotidien Der Standard, M. Nehammer pourrait faire traîner en longueur les discussions avec les autres, avant de finalement se tourner vers le FPO, son partenaire désormais naturel. Ce ne serait pas la première fois que les conservateurs «retournent leur veste», observe Andras Eisl. 

 

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