Bernard Bajolet, ancien patron de la DGSE (direction générale de la Sécurité Extérieure) de 2013 à 2017, date de son départ à la retraite , et ex-ambassadeur de France en Algérie de 2006 à 2008, est au cœur d’un scandale de tentative d’extorsion de fonds d’un montant de 15 millions d’euros auquel il serait mêlé. La victime présumée, un homme d’affaires franco-suisse Alain Duménil, qui a eu des démêlées judiciaires en rapport avec ses activités, accuse l’ancien patron des services de renseignement français de trafic d’influence en utilisant les réseaux de la DGSE pour lui soutirer de l’argent au moyen de chantage. Selon l’enquête publiée par le quotidien français Le Monde qui a jeté le pavé dans la mare, l’homme d’affaires franco-suisse avait été interpellé par des agents de la DGSE affirmant agir au nom de l’Etat, au commissariat de la police des frontières de l’aéroport de Roissy Charles de Gaulle, et lui réclamant le remboursement au Trésor public d’une somme de 15 millions d’euros. Selon le journal parisien, des photographies de sa famille lui ont été exhibées en guise d’intimidation pour faire chanter l’homme d’affaires. Saisi du dossier, le tribunal de Bobigny, en région parisienne, avait ordonné le 18 octobre dernier, la mise en examen de l’ancien patron de la DGSE. De nouveaux éléments à charge contre Bernard Bajolet viennent d’être révélés par le quotidien Le Monde dans sa parution du 4 janvier, où il est fait état de soupçons de «complicité de tentative d’extorsion» doublée d’«atteinte arbitraire à la liberté individuelle par un dépositaire de l’autorité publique». L’information a été confirmée par l’AFP (agence officielle de presse française), mais pas par la DGSE qui observe un silence embarrassé sur cette affaire. La justice française qui enquête sur ce scandale qui éclabousse les services du renseignement français aura à déterminer s’il s’agit d’un acte isolé d’agents indélicats agissant en bande organisée spécialisés dans des affaires d’escroquerie ou si, chose gravissime, il s’agit d’une activité interlope de l’institution destinée à renflouer ses caisses et à financer des activités extra-légales. Lors de son audition devant les juges en octobre 2022, Bernard Bajolet avait reconnu avoir donné son accord pour l’audition d’Alain Dumenil à son arrivée à l’aéroport parisien mais avoue ignorer les détails et la suite réservée à cette affaire. Un argumentaire par trop léger pour convaincre les juges, qu’à un tel niveau de responsabilité, dans une institution aussi sensible , un dossier si explosif qui engage le crédit d’une institution de l’Etat français pourrait passer, avec cette facilité, sous le nez d’un patron des services de renseignement. Par le passé, ces derniers avaient déjà fait parler d’eux dans plusieurs scandales, à l’instar des écoutes téléphoniques de l’Elysée de 1983 à 1986 sous le septennat de l’ancien président socialiste François Mitterand. Un jugement avait été rendu dans cette affaire, le 9 novembre 2005, par le tribunal correctionnel de Paris condamnant 7 anciens collaborateurs du président français. L’arroseur arrosé : Bernard Bajolet qui avait commis un pamphlet sur la corruption institutionnelle en Algérie reçoit en pleine figure le retour de flamme à travers ce scandale d’extorsion de fonds dans lequel il est mis en examen par la justice française.