La Zone de libre-échange africaine (ZlecAf) : Un marché unique pour éradiquer la pauvreté

19/02/2023 mis à jour: 05:27
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Au moins 35 présidents et quatre Premiers ministres participeront au 36e Sommet de l’UA, qui se tiendra au siège de l’organisation continentale à Addis-Abeba. Azali Assoumani, président des Comores, petit archipel de l’océan Indien d’environ 850 000 habitants, doit prendre la présidence tournante de l’UA, à la suite de Macky Sall, le chef de l’Etat sénégalais. Le projet de la ZlEcaf a été signé en mars 2018 à Kigali (Rwanda) par 54 pays et ratifié par 44 pays. Initialement, la zone de libre-échange devait être effective dès le 1er juillet 2020, mais la fermeture de la plupart des frontières à cause de la pandémie de coronavirus a repoussé le calendrier. Elle doit réunir 1,3 milliard de personnes et ainsi devenir le plus grand marché mondial avec un PIB combiné de 3400 milliards de dollars, selon l’ONU. Pour l’heure, le commerce intra-africain ne représente que 15% des échanges totaux du continent. La Zlecaf doit, selon ses promoteurs, favoriser le commerce au sein du continent et attirer des investisseurs. Selon la Banque mondiale, d’ici 2035, l’accord permettrait de créer 18 millions d’emplois supplémentaires et «pourrait contribuer à sortir jusqu’à 50 millions de personnes de l’extrême pauvreté».

L’Algérie l’a ratifié officiellement en 2021 et s’est, depuis, déclarée prête à investir les marchés de cette zone de libre-échange, par l’achèvement de la route transsaharienne, l’ouverture de postes-frontaliers terrestres, le lancement d’une ligne maritime avec la Mauritanie et de nouvelles lignes aériennes vers d’autres capitales africaines, le renforcement de la présence des marchandises algériennes en Afrique de l’Ouest et la création de succursales de banques algériennes dans plusieurs pays de la région.

Selon la Banque mondiale, la ZLECAf représente une véritable occasion de stimuler la croissance, de réduire la pauvreté et d’élargir l’inclusion économique dans les pays concernés. Sa mise en œuvre permettrait de sortir 30 millions d’Africains de l’extrême pauvreté et d’augmenter les revenus de près de 68 millions d’autres personnes qui vivent avec moins de 5,50 dollars par jour. Il permettrait aussi d’augmenter les revenus de l’Afrique de 450 milliards de dollars d’ici à 2035 (soit une progression de 7%) tout en ajoutant 76 milliards de dollars aux revenus du reste du monde. Il permettrait également d›accroître de 560 milliards de dollars les exportations africaines, essentiellement dans le secteur manufacturier, de favoriser une progression salariale plus importante pour les femmes (+10,5%) que pour les hommes (+9,9%) et d’augmenter de 10,3% le salaire des travailleurs non qualifiés et de 9,8% celui des travailleurs qualifiés. La Banque mondiale ajoute que dans le cadre de la 
Zlecaf, l’extrême pauvreté diminuerait sur l’ensemble du continent, les améliorations les plus importantes se produisant dans les pays où les taux de pauvreté sont aujourd’hui très élevés. L’Afrique de l’Ouest connaîtrait la plus forte diminution du nombre de personnes vivant dans l’extrême pauvreté, avec une baisse de 12 millions (plus d’un tiers du total pour l’ensemble de l’Afrique). La baisse serait de 9,3 millions en Afrique centrale, de 4,8 millions en Afrique de l’Est, de 3,9 millions en Afrique australe. Les pays dont les niveaux de pauvreté initiaux sont les plus élevés enregistreraient les plus fortes baisses. En Guinée Bissau, le taux de pauvreté passerait de 37,9 à 27,7%, au Mali, le taux passerait de 14,4% à 6,8% et au Togo, le taux passerait de 24,1% à 16,9%.

Des obstacles à lever

Toujours selon la Banque mondiale, la création d’un marché à l’échelle du continent exigera une action volontariste pour réduire tous les coûts commerciaux. Il faudrait pour cela adopter des lois et réglementations permettant aux marchandises, aux capitaux et aux informations de traverser librement les frontières, de créer un environnement commercial compétitif à même de stimuler la productivité et l’investissement, et de promouvoir la compétitivité vis-à-vis de l’extérieur ainsi que les investissements directs étrangers pour favoriser la productivité et l’innovation des entreprises nationales.

Reste que d’importantes obstacles freinent la bonne tenue de la 
Zlecaf. Il y a des pays qui sont un peu hésitants sur certains points, notamment sur le protocole de libre-circulation des personnes et des biens. Certains pays africains craignent que l’ouverture des frontières n’entraîne un afflux de personnes qu’ils ne peuvent pas contrôler. De plus, persiste la question des réductions des droits de douane, notamment pour les pays les moins développés. Par ailleurs, la guerre entre la Russie et l’Ukraine et les sanctions internationales ont ébranlé les économies africaines et plongé nombre d’entre elles dans de graves difficultés et le continent reste toujours le théâtre d’affrontements armés, notamment dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) ou dans le bassin du lac Tchad. La guerre au Tigré (nord de l’Ethiopie) – qui a fait plusieurs centaines de milliers de morts, selon l’UA – a pris fin en novembre dernier, avec la signature d’un accord de paix sous l’égide de l’Union africaine. Le Mali, le Burkina Faso et la Guinée, trois pays dirigés par des militaires issus de coups d’Etat, ont demandé le 10 février la levée de leur suspension de l’UA. 

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