La dévaluation monétaire, un recours incontournable ?

20/06/2023 mis à jour: 12:20
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Photo : D. R.

Le recours à une dévaluation monétaire est souvent provoqué par un excès du volume de la masse monétaire par rapport aux données économiques et financières réelles d’une nation ou par un déséquilibre persistant de la balance commerciale. 

Dans la plupart des pays, la maîtrise de l’évolution de la masse monétaire et la surveillance de la stabilité des prix sont en général du ressort de la banque centrale. La banque centrale assume donc un rôle déterminant dans la gestion et l’évolution d’une économie. Elle définit et mène une politique monétaire adaptée à la réalité économique et financière du pays et aux objectifs de développement et de croissance retenus. 

Elle est responsable de la création monétaire. La Banque centrale surveille également la stabilité des prix et tente de maintenir l’inflation à un niveau acceptable pour éviter des effets négatifs sur le niveau de consommation des ménages et la politique d’investissement des entreprises.

En outre, par son rôle, la banque centrale possède une autorité sur les banques de second rang. Elle veille sur l’équilibre et le bon fonctionnement du système bancaire et gère le financement des besoins de trésorerie des banques. 

L’importance des attributions d’une banque centrale et l’impact de sa politique sur l’évolution économique et sociale ont conduit beaucoup d’économistes et hommes politiques à préconiser une indépendance réelle de la banque centrale par rapport au pouvoir l’exécutif.

En Algérie, les missions principales d’une banque centrale ont été confirmées par l’ordonnance 03.11 du 26/08/2003 relative à la monnaie et au crédit. Ces missions ont été confiées à la Banque d’Algérie. Elle doit veiller à la stabilité des prix et de la monnaie, maintenir les meilleures conditions favorables à la croissance et au développement et prendre les mesures correctives nécessaires. 

Ce sont objectifs assez complexes, difficiles à réaliser en même temps.

La stabilité des prix est donc un objectif fondamental dans la gestion économique pour éviter l’inflation et ses conséquences négatives sur le plan économique, monétaire et social.

L’inflation est une hausse généralisée des prix des biens et services. Cette hausse est continue et évolutive. Le pouvoir d’achat de la monnaie subit une perte continue qui se répercute sur le niveau de vie des citoyens. L’inflation a plusieurs causes. 

L’existence d’une demande de biens et services très importante par rapport à l’offre, créant un déséquilibre entre la production et la demande et conduit à une hausse des prix et à un déséquilibre de la balance commerciale. 

L’augmentation des coûts de production, résultat d’une augmentation des prix des matières premières, des salaires et des impôts…

L’existence d’une masse monétaire assez importante et disproportionnée par rapport aux possibilités de l’économie.

La lutte contre l’inflation passe par une connaissance parfaite de ses principales causes afin d’éviter les fausses solutions et l’enlisement de la crise.

La banque centrale (Banque d’Algérie, chez nous) possède plusieurs instruments pour lutter contre la hausse des prix et la perte de la valeur de la monnaie, notamment : 

a) Une politique monétaire adaptée aux spécificités de l’économie en vue de retrouver l’équilibre offre/demande, 
b) L’augmentation du taux d’intérêt pour favoriser l’épargne et réduire la demande,
c) La réduction des dépenses publiques grâce à une politique budgétaire maîtrisée,
d) Le renforcement des capacités de production des entreprises pour améliorer l’offre en réduisant les coûts de production, favoriser la concurrence et la lutte contre le gaspillage des ressources.

Le ciblage de l’inflation est une autre option qui permet à la banque centrale de se fixer comme objectif le maintien de l’inflation à un taux réduit et stable. Selon plusieurs économistes, cette pratique a des effets positifs sur l’évolution économique et n’a que très peu d’effets négatifs sur les revenus.

En ce qui concerne la valeur d’une monnaie, l’un des instruments primordiaux utilisés par les banques centrales pour freiner l’évolution de la masse monétaire, réduire l’inflation et favoriser les exportations, est la dévaluation de la monnaie. 

La dévaluation est une baisse de la valeur d’une monnaie par rapport aux monnaies de référence, en général, le dollar et l’euro. Elle consiste à agir sur le taux de change officiel pour corriger la perte de valeur de la monnaie.
Le but d’une dévaluation est de contrôler le volume de la masse monétaire, de maîtriser l’inflation et de corriger le déficit commercial. 

Dans les cas de notre économie, le recours à la dévaluation du dinar est fréquent. Le volume de la masse monétaire, l’inflation, les déséquilibres de la balance commerciale et les déficits budgétaires sont les principales causes du recours répétitif à la dévaluation du dinar. En général, une dévaluation vise en premier lieu l’amélioration de la compétitivité des entreprises dans le but d’augmenter les exportations et pouvoir corriger ainsi le déficit de la balance commerciale. Mais cet objectif était par le passé difficilement réalisable. L’entreprise algérienne était peu compétitive et ne pouvait accéder facilement au marché extérieur pour une multitude de difficultés.                                                          
Espérons que les dernières mesures retenues par la politique économique actuelle vont donner des résultats, relancer et développer les exportations. Les premiers résultats de cette politique sont très encourageants. L’objectif d’atteindre un montant de 10 milliards USD d’exportations hors hydrocarbures est parfaitement réalisable. 

Le constat dans la majorité des pays nous indique que la lutte contre l’inflation et la dévaluation monétaire ne conduit pas automatiquement et rapidement au redressement économique souhaité. D’autres mesures et actions sont prises et appliquées durant plusieurs années pour pouvoir corriger les déséquilibres et relancer la croissance.  
L’option la plus intéressante consiste à réunir un ensemble de mesures pour améliorer d’une manière significative la compétitivité des entreprises et les orienter vers l’exportation. 

Ces mesures concernent l’amélioration du management des entreprises, la formation permanente, l’utilisation et la maîtrise des nouvelles technologies, l’amélioration de la réglementation, la modernisation du secteur bancaire et la stabilité des options et choix économiques à moyen et long terme.

En outre, la qualité de la gouvernance et de ses institutions influe considérablement sur la situation économique et son évolution. Une analyse objective du fonctionnement des institutions est indispensable pour corriger leurs insuffisances et les transformer en facteurs de développement.      

Par Brahim Lakhlef
Économiste, auteur de plusieurs ouvrages et contributions sur la gouvernance, la qualité des institutions et le management des entreprises.
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