La chronique littéraire / Littérature et cinéma

20/07/2024 mis à jour: 18:47
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Pour nous, enfants du XXe siècle, le cinéma fut une merveilleuse invention. Avec la littérature, il aura frappé nos esprits, influencé nos idées et nourri nos réflexions. 

Films et livres sauront faire de nous des porteurs de débats, de curiosité et d’imaginaire, avec ces yeux émerveillés que saura porter à l’écran Youcef Chahine dans Alexandrie pourquoi ? Beaucoup parmi les films qui nous ont le plus marqués, ont réuni nos deux passions, la littérature et le cinéma, puisque adaptés de livres. 

Le vieil homme et la mer d’Ernest Hemingway, Guerre et paix de Léon Tolstoi, Le Tambour de Gunter Grass et Al Ard d’Abderrahmane Charqawi seront aussi de grandes œuvres cinématographiques, grâce, respectivement, à John Sturges, Serguei Bondartchouk, Volker Schlöndorffet, encore, Youcef Chahine. La liste serait très longue à citer, puisque d’après des statistiques de 2020, un film sur cinq serait une adaptation d’une œuvre littéraire. 

En Algérie, les œuvres phares qui auront connu une adaptation à l’écran, grand ou petit, se comptent malheureusement sur les doigts d’une main. Pourtant, ce n’est pas faute de livres de qualité. Vent du sud d’Abdelhamid Benhedouga, L’Opium et le bâton de Mouloud Mammeri, La Grande Maison et L’Incendie de Mohamed Dib et La Colline oubliée furent ainsi de grands succès pour leurs réalisateurs respectifs, Mohamed Slim Riad, Ahmed Rachedi, Mustapha Berkouk Badi et Abdelhamid Bouguermouh, auxquels on peut rajouter Les rameaux de feu d’Ifticene, d’après Le grain dans la meule de Malek Ouary. 

Par ailleurs, à l’étranger, plusieurs romans de Yasmina Khadra furent portés à l’écran dont Morituri, en 2007, sera coproduit par l’Algérie, citons aussi le célèbre roman Les Vigiles de Tahar Djaout, réalisé en Belgique, par Kamel Dehane, sous le titre de Les suspects et Maintenant ils peuvent venir d’Arezki Mellal, réalisé par Salem Brahimi. On peut s’interroger sur, d’une part, le peu d’œuvres littéraires algériennes portées à l’écran par le cinéma national et, d’autre part, sur l’absence d’autres auteurs algériens retenus au plan international. Pourtant, de nombreuses œuvres littéraires, tant des années passées que celles récentes, peuvent donner lieu à d›excellents films et ne demandent pas de très grands moyens, à l’inverse des grandes productions historiques réalisées ou en projet. Le cinéma étant un porte-voix ou plutôt un «porte-image», spécifique et influent, la portée du discours littéraire verrait s’ouvrir devant elle de nouveaux horizons. 

Or, ce discours est souvent confiné dans le seul espace livresque, comme lieu d’expression et de fonctionnement, un confinement parfois doublé de celui linguistique. Le cinéma, par le pouvoir de l’image, semble plus propice à porter, aux yeux de ceux qui ont font un outil de démonstration, certaines idées, les leurs, plutôt que d’autres. Ce qui pose encore une fois la question de la liberté et de la pluralité des points de vue. Le cinéma, pourtant, comme la littérature devrait être un espace de liberté créative, à la seule condition, allant de soi, de qualité et d’assomption. 

C’est cette liberté qui pourra être garante d’une évolution sociale véritable, en adéquation avec les exigences d’une époque complexe, remplie de défis et d’enjeux sur tous les plans et d’abord sur le plan humain. 

Car, au cinéma comme en littérature, l’homme est au centre de toutes les problématiques qui traversent l’histoire et on ne peut faire fi de cette dernière. Donner aux hommes et aux sociétés des outils de réflexion et un véritable esprit critique pourrait être l’objectif commun de la littérature et du cinéma, au travers, notamment, des adaptations cinématographiques. Celles-ci pourraient être le miroir dans lequel, de manière intelligente, tout homme et toute société pourrait se mirer, non pas au travers d’une vision idéalisée, qui a, par ailleurs, son rôle à jouer mais d’un reflet honnête, conséquent et utile pour tous.

 Par ailleurs, et au vu des évolutions de production et de consommation de fictions audiovisuelles, on peut très bien adapter des œuvres littéraires en séries vidéos disponibles sur une plate-forme dédiée et même aller plus loin, en utilisant les outils de l’intelligence artificielle pour ces adaptations. Tout ainsi démontre que l’adaptation de la littérature au cinéma, toutes formes et contenus confondus, y compris sur internet, constitue une aubaine particulière pour l’expression, la créativité, l’innovation et la promotion des idées et des visions les plus saines et les plus justes, dans un monde qui dépassant le grand village de Mac Luhan est devenu un simple (mais si complexe dans ses ressorts et implications) écran tactile.

Par Ahmed Benzelikha

 

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