Islam en France : Fermeture de comptes bancaires pour les associations musulmanes ?

14/06/2022 mis à jour: 00:22
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Des institutions musulmanes reconnues au plan régional ou national dénoncent un «apartheid bancaire» qui les vise.

Dans un communiqué publié en ce début du mois de juin, le conseil des mosquées du Rhône (CMR) lance un appel au président de la République contre «l’apartheid bancaire qui vise certaines institutions musulmanes de France et leurs bienfaiteurs depuis quelques années», écrit dans un communiqué Kamel Kabtane, président du Conseil des mosquées du Rhône (CMR).

Il ajoute : «Ainsi, des dizaines de mosquées en pleine construction (ou extension) ont subi la fermeture de leurs comptes bancaires. Par ailleurs, des fermetures massives de comptes bancaires de particuliers ayant participé à la construction de mosquées ont été observées récemment dans les filiales de certaines banques, sans justification aucune». Ce phénomène inquiète le CMR qui ne comprend pas le pourquoi de «ces pratiques discriminatoires qui visent particulièrement les institutions musulmanes ainsi que leurs bienfaiteurs et parfois leurs proches».

On sait que depuis le vote de la loi dite de «lutte contre le séparatisme» par le gouvernement français à l’instigation du président Emmanuel Macron lors de sa précédente mandature, les fonds qui irriguent les associations musulmanes peuvent être sévèrement contrôlés. Pourtant le CMR regrette cet état de fait. Le CMR indique avoir à plusieurs reprises, «interpellé les pouvoirs publics sur ce point, mais rien n’a été fait. Ces fermetures massives de comptes bancaires, qui mettent à mal la construction de mosquées et paralysent leurs actions et leurs projets, ont suscité l’émoi au sein de la communauté musulmane de France».

«Des pratiques abusives et injustes»

En réponse à la loi censée mettre un terme aux abus des financements occultes de l’islam, le CMR juge cependant qu’on ne peut pas «continuer à mettre les français musulmans au ban de la société et en même temps, les taxer de séparatisme».

Le CMR demande ainsi au président de la République, «garant des droits fondamentaux de tous les Français» d’intervenir afin «que cesse cette ignominie juridique qui prive des institutions cultuelles et des citoyens français de leurs droits fondamentaux».

En novembre 2021, le même CMR avait une première fois exprimé «sa profonde inquiétude face à ces pratiques, qu’il déplore et qu’il juge abusives et injustes, et ce, d’autant plus qu’aucune infraction qui justifierait ces fermetures de compte, n’a été relevée». Souhaitant que l’Etat veille à mettre en terme à ce qui est considéré comme des «abus», espérant que des «dispositions» seraient prises «pour interdire ces fermetures injustifiées et rétablir le droit inaliénable de disposer d’un compte en banque pour tout citoyen français».

Une situation discriminatoire

Le Conseil français du culte musulman (CFCM) avait aussi dénoncé à la fin de l’année dernière la fermeture ces derniers temps de comptes bancaires d’associations musulmanes gestionnaires de mosquées, qualifiant cette situation de «discriminatoire», selon le site d’information en ligne Spahirnews .

Ces fermetures sont «constatées sur l’ensemble du territoire national», a signalé l’instance qui reproche le caractère autoritaire de décisions qui les place dans une situation de précarité, alors qu’aucune infraction justifiant un tel acte n’a été relevée.

«Il semblerait que les versements en espèces seraient la cause principale de ces fermetures. Or ces versements proviennent des collectes organisées lors notamment de la prière du vendredi et du mois de ramadan», observe le CFCM, cité par Saphirnews : «Sans ces dons des fidèles, des nombreuses mosquées ne pourraient pas assumer leurs dépenses de fonctionnement. Il faut rappeler que ce type de collecte n’est pas propre uniquement au culte musulman».

Le CFCM affirme avoir proposé aux responsables associatifs «des propositions de bonnes pratiques pour les collectes de dons à même d’améliorer la confiance mutuelle entre les associations musulmanes et les institutions bancaires».

Toute une famille bloquée d’accès bancaire, selon M. Gaci

Le porte-parole du CMR Azzedine Gaci, recteur de la mosquée de Villeurbanne avait pris la parole lors d’un prêche posté le 1er juin dernier sur sa page Facebook. Il avait parlé du compte BNP d’un homme se retrouvant bloqué après avoir fait un don de 10 000 € à une mosquée en construction dans la métropole de Lyon. Selon M. Gaci, ceux de son père, de son frère, de sa sœur et de son oncle, auraient été fermés, soit au total cinq comptes.

En février dernier, lors de la séance inaugurale du Forum de l’islam de France (FORIF) dont l’existence semble pour l’heure en pointillés, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin avait annoncé qu’il prendrait «rétablir le droit inaliénable de disposer d’un compte en banque pour tout citoyen français», selon le recteur de la mosquée de Villeurbanne, propos rapporté par Saphirnews.

Azzedine Gaci qui sur son compte Twitter écrivait le 2 juin dernier : «On ne veut pas que les pays étrangers financent la construction des mosquées en France et on fait peur aux donateurs qui participent à la construction de ces mosquées. On ne cesse de mettre les Français musulmans sur le banc de la société tout en les taxant de séparatisme. A ne rien comprendre». 

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