L’activité de recherche clinique est très limitée en Algérie. Elle représente 0,02% de l’ensemble des études dans le monde et 0,79% en Afrique, malgré tout le potentiel et les atouts disponibles pour en faire un pays attractif aux essais cliniques.
Le ministère de l’Industrie pharmaceutique a délivré depuis janvier 2021 plus d’une vingtaine d’autorisations au profit de promoteurs, entreprises pharmaceutiques multinationales et locales, pour la réalisation d’études cliniques pour l’évaluation des produits pharmaceutiques et dispositifs médicaux, dont deux essais sont en cours.
Les études en question, dont la majorité sont observationnelles, portent sur des produits indiqués dans le traitement de plusieurs pathologies, notamment les cancers, le domaine prédominant de la recherche clinique, les maladies orphelines, inflammatoires ou auto-immunes. D’autres études concernent les dispositifs médicaux qui sont désormais soumis à l’homologation par l’Agence nationale des produits pharmaceutiques. Un registre des études cliniques est désormais mis en place pour la première fois et le registre des volontaires est en cours d’élaboration.
Des études de bioéquivalences sont également au programme du ministère de l’Industrie pharmaceutique, dont l’objectif est de se préparer à l’exportation. Ces études cliniques, validées par les comités d’éthique des différents établissements hospitaliers publics, portent sur un total de 6249 volontaires, essentiellement des patients.
Ces autorisations ont été délivrées conformément à l’ordonnance n° 20-02, du 30 août 2020 modifiant et complétant la loi 18-11 du 2 juillet 2018 relative à la santé et ses textes d’application, régissant la recherche clinique, dont l’article 381 issu de cette modification qui stipule : «Les études cliniques sont subordonnées à l’autorisation du ministre de l’Industrie pharmaceutique qui se prononce dans un délai de trois (3) mois, sur la base d’un dossier médical et technique et d’une déclaration de réalisation d’étude clinique sur l’être humain, présentés par le promoteur.»
Comme elles sont également soumises à l’avis du comité d’éthique médicale, «un organe indépendant créé au niveau des services extérieurs de la santé», est-il précisé et «ses activités sont supervisées par les services compétents du ministère de la Santé».
Ainsi, un avant-projet de décret exécutif relatif aux essais cliniques est en cours d’examen au secrétariat général du gouvernement. Que comporte ce texte de loi ? Cet avant-projet, explique le Dr Nadia Bouabdellah, directrice générale de la production, du développement industriel, de la promotion de l’exportation et de la recherche, a pour objet de définir les études cliniques, fixer les conditions de délivrance de l’autorisation de réalisation de ces études cliniques, déterminer les modalités d’élaboration et de réalisation du protocole d’études cliniques, ainsi que de déterminer les normes et méthodes applicables aux études des produits pharmaceutiques et dispositifs médicaux.
«Ce qui constitue le cadre réglementaire pour encadrer toutes les étapes de ces études cliniques qui doivent être conçues et réalisées selon les standards internationaux», a-t-elle expliqué. Elle signale qu’il y a aussi un autre projet de texte relatif aux conditions d’éligibilité des personnes sollicitées pour des études avec bénéfice individuel direct pour leur santé.
Le Dr Bouabdellah a précisé que le projet de décret prévoit un comité intersectoriel des études cliniques, composé d’experts multidisciplinaires qualifiés, qui participeront à l’évaluation des études cliniques. Lesquelles permettront, selon elle, de créer des emplois, d’être une source supplémentaire de financement hospitalier et d’impacter positivement le budget de l’Etat en optimisant les dépenses pharmaceutiques grâce à l’accès gratuit à l’innovation.
A ce titre, ce projet de texte permet, a-t-elle ajouté, de mettre à disposition des patients ainsi que des professionnels de la santé de nouvelles capacités de diagnostic et d’améliorer et de perfectionner l’arsenal thérapeutique que les patients attendent à travers des études cliniques.
Le Dr Bouabdellah a indiqué que dans le cadre de la promotion des études cliniques, de la recherche et du développement, le projet de décret prévoit des «dispositions permettant d’orienter la recherche biomédicale vers les besoins des patients en prenant en compte des mesures assurant une totale protection des droits, de l’intégrité et de la dignité des personnes se prêtant à une quelconque étude clinique sur le sol national». Et de signaler qu’«elles ne contribueront pas seulement à l’amélioration de la qualité des soins mais aussi au développement de l’industrie pharmaceutique nationale et de la promotion de la recherche, faisant ainsi de l’Algérie un pôle d’innovation, en harmonie avec les standards internationaux».
Par ailleurs, ce projet de décret prévoit un arrêté du ministre fixant le cahier des charges relatif aux modalités et procédures de création de centres de bioéquivalence et d’agrément des différents prestataires de services dans le domaine de la recherche biomédicale. En attendant sa promulgation, ledit projet de loi fait l’objet d’opposition par le ministère de la Santé, qui a déposé en novembre 2021 au SGG un avant-projet de loi modifiant et complétant la loi 18-11 relative à la santé, qui a déjà été modifiée par l’ordonnance présidentielle n° 20-02 du 30 août 2020.
En plus explicite, le ministère de la Santé entend se réapproprier les prérogatives qui étaient les siennes dans la loi sanitaire publiée en juillet 2018, à savoir les produits pharmaceutiques, particulièrement la nomenclature des médicaments essentiels et les études cliniques.
«Ces deux axes reviennent normalement sous la responsabilité du ministère de la Santé qui élabore la politique de santé et met en place des programmes de prévention. Ces études cliniques peuvent concerner les études stratégiques, par exemple, telle que la tuberculose. Cela n’est pas du ressort du ministère de l’Industrie pharmaceutique, qui est par contre chargé de mettre en place un environnement adéquat pour la fabrication et la disponibilité des médicaments», signale-t-on au ministère de la Santé.
Ce dernier affirme que les essais «cliniques n’ont jamais été bloqués» et considère que le décret en examen au SGG «ne pourra être appliqué même s’il est publié, puisqu’il y a des étapes pour réaliser ces essais qui dépendent directement du ministère de la Santé», a ajouté la même source.