Rédha, Ilyès et Houari. Ce sont les prénoms de trois de nos valeureux soldats ravis brutalement à la vie ce dimanche 20 mars, après avoir vaillamment tenu tête à un groupe terroriste à l’extrême sud du pays, près de Timiaouine, dans la wilaya de Bordj Badji Mokhtar, à la frontière avec le Mali.
«Dans le cadre de la lutte antiterroriste et suite à un accrochage avec un groupe terroriste sur la bande frontalière dans la région de Timiaouine, au secteur opérationnel Bordj Badji Mokhtar, en 6e Région militaire, trois militaires sont tombés au champ d’honneur, dimanche 20 mars 2022», indique, en effet, un communiqué du ministère de la Défense.
Il s’agit, poursuit la même source, «du sous-lieutenant de carrière Ikhlef Rédha, du caporal contractuel Tareb Ilyes et du caporal contractuel Ali Abdelkader Houari». Le président Tebboune a réagi à cette triste nouvelle, à travers son compte Twitter, adressant un message de sympathie aux familles des trois soldats. «A Allah nous appartenons et à Lui nous retournons.
Mes sincères condoléances aux familles des martyrs du devoir national et à la famille de l’ANP, suite au décès du sous-lieutenant de carrière Ikhlef Rédha et des caporaux contractuels Tareb Ilyes et Ali Abdelkader Houari, morts en martyrs en défendant l’intégrité du territoire national. Paix à l’âme de nos valeureux chouhada», a écrit le chef de l’Etat dans ce tweet posté ce dimanche et relayé par l’APS.
De son côté, le chef d’état-major de l’ANP, Saïd Chengriha, a présenté lui aussi ses «sincères condoléances» et fait part de sa «profonde compassion» aux familles et proches des défunts, en leur souhaitant «tout le courage et la force en cette dure épreuve».
Il convient de rappeler qu’il y a près de deux mois, le 27 janvier 2022, deux éléments de l’ANP avaient trouvé la mort dans des conditions similaires près d’In Guezzam. Ils avaient péri «suite à un accrochage avec un groupe terroriste sur la bande frontalière dans la région de Hassi Tiririne, au secteur opérationnel d’In Guezzam», rapportait un communiqué du MDN.
La même source précisait que cette opération avait permis «la neutralisation de deux terroristes et la récupération d’une mitrailleuse lourde calibre 12,7 mm, de deux pistolets-mitrailleurs de type Kalachnikov, d’un véhicule tout-terrain et d’une quantité de munitions de différents calibres».
Dans son message de condoléances aux familles des deux soldats, le général de corps d’armée, Saïd Chengriha, avait tenu à «réaffirmer la ferme détermination de l’Armée nationale populaire à poursuivre les opérations de lutte contre les résidus des groupes terroristes et la sécurisation de nos frontières du fléau du terrorisme et du crime organisé sous toutes ses formes, à travers l’ensemble du territoire national et dans toutes les circonstances».
Capacité de nuisance
Mais quels sont justement ces groupes terroristes qui continuent à sévir dans la région ? Au vu de la porosité de nos frontières sud, tout porte à croire que ceux qui se permettent des incursions de ce genre sont les mêmes qui activent au Mali et qui étendent leurs actions destructrices à toute la zone sahélo-saharienne. Et manifestement, ces groupes conservent toute leur capacité de nuisance. Pourtant, les principales organisations terroristes au Sahel ont subi des coups assez importants ces dernières années.
Pas moins de trois têtes d’affiche de la mouvance djihadiste dans la région ont été éliminées. Le 3 juin 2020, Abdelmalek Droukdal, alias Abou Moussab Abdelwadoud, chef d’Al Qaîda au Maghreb islamique (AQMI), a été abattu par l’armée française près de Tessalit, au nord du Mali. Le 15 septembre 2021, c’est au tour du chef de l’EIGS, l’Etat islamique au Grand Sahara, d’être mis hors d’état de nuire.
Il s’agit de Adnan Abou Walid Al Sahraoui, de son vrai nom Lehbib Ould Ali Ould Saïd Ould Joumani, tué dans un raid de la force «Barkhane». Autre perte importante : celle de Yahia Djouadi, alias Abou Ammar Al Jazairi, un haut cadre d’AQMI dont il était le «coordinateur financier et logistique», tué le 26 février dernier dans une opération de la force «Barkhane» à une centaine de kilomètres de Tombouctou.
Mais même étant touchées à la tête, ces organisations continuent ainsi à semer la terreur parmi les populations de la région. Cela n’a rien de surprenant pour qui connaît les méandres du Sahel, cette géographie âpre, insaisissable, immense no man’s land où se mêlent terrorisme transfrontalier, groupes rebelles, contrebande à grande échelle et trafics en tous genres.
Une récente opération de l’armée malienne permet de donner une idée de la taille et de la dangerosité de ces groupes. Le 19 février 2022, les Forces armées maliennes (FAMA) annonçaient avoir éliminé 57 terroristes dans la région de Tessit, au nord du Mali, autrement dit à nos frontières. Les 57 terroristes ont été neutralisés suite à une opération de l’aviation malienne.
Huit soldats maliens ont laissé leur vie dans cette opération d’envergure. «L’état-major des armées informe l’opinion que l’aviation des Forces armées maliennes est intervenue dans l’après-midi du 18 février 2022 auprès d’une patrouille accrochée par des hommes armés non identifiés dans le secteur d’Acham, à l’ouest de Tessit», assurait un communiqué officiel de l’armée malienne.
Et d’ajouter : «La destruction totale de la base terroriste, consécutive à de violents combats aux alentours de la forêt refuge, a fait 8 morts, 14 blessés, 5 portés disparus et des véhicules détruits côté FAMA. Les frappes aériennes ont neutralisé des colonnes de motocycles qui tentaient de submerger l’unité accrochée. Le ratissage a permis de dénombrer 57 terroristes neutralisés et divers matériels détruits.»
Un autre fait révélateur de l’activisme mortifère de ces groupes armés : début mars, «plusieurs dizaines de civils et de combattants du Mouvement pour le salut de l’Azawad (MSA) ont été tués par les terroristes dans la région de Ménaka», a soufflé à l’AFP une source militaire malienne.
Selon le MSA, l’un des signataires des Accords de paix d’Alger de 2015, «les assaillants sont des membres de l’Etat islamique au Grand Sahara, affilié au groupe Etat islamique». Les hommes de l’EIGS, précise-t-on, «opèrent essentiellement entre le Mali, le Niger et le Burkina Faso, dans la zone dite ‘‘des trois frontières’’».