L’idée de l’introduction de l’Intelligence artificielle (IA) a jailli lors de l’une des journées d’étude, inscrite dans le programme de la célébration du mois du mois du patrimoine 2022, (18 avril -18 mai, ndlr), initiée par l’ENSCRBC (Ecole nationale supérieure de la conservation et la restauration des biens culturels) à Tipasa.
Un débat fructueux et animé s’est installé entre les professeurs, les docteurs, les chercheurs, les archéologues, les architectes, les scientifiques et les étudiants. La mise en valeur des monuments historiques, les sites archéologiques, l’art rupestre et les œuvres d’art plastique, à travers l’utilisation des technologiques modernes, aura été le point nodal des interventions des participants.
Le Dr Bouache Mourad, chercheur installé à la Silicon Valley (USA), responsable du département de l’intelligence artificielle chez l’entreprise américaine Intel, a ouvert, lors des débats, des perspectives, favorables pour le développement économique, notamment le tourisme, une création des richesses et emplois en Algérie.
Des exemples de sites archéologiques à restituer avaient été évoqués, à l’instar du Mausolée Royal de Maurétanie, située le long du littoral à l’Ouest d’Alger, et à 12 km à l’Est de Tipasa. Cette sépulture royale qui remonte au Ier siècle avant J.-C. se caractérise par une technique de construction berbère, néanmoins le revêtement extérieur est punique. Notre pays est pourvu de très nombreux monuments qui illustrent le passage des civilisations dans son territoire.
L’architecte et archéologue Jean-Claude Golvin avait recensé les monuments historiques berbères, en plus du Mausolée Royal maurétanien, en l’occurrence, la Soumâa d’El-Khroub, le Medracen, le Mausolée de Beni Rhénane (Beni-Saf), le Tombeau de Tin Hinan (Hoggar), les Djeddars (Tiaret). Emballés par l’idée de la numérisation des sites archéologiques, les universitaires réunis à l’ENSCRBC de Tipasa étaient unanimes pour commenter la possibilité d’utilisation pour une première expérience, par l’exploitation de l’IA, afin de restituer le Tombeau de la Chrétienne.
C’est un monument archéologique circulaire qui domine le littoral de la capitale à Tipasa. Ses dimensions s’articulent sur une hauteur de 32,40 m, un diamètre de 60,90 m et une circonférence de 185,50 m. A l’extérieur, il est constitué de colonnes de type ionique d’une part et, d’autre part, de 04 fausses portes dont chacune a été mise sur chaque point cardinal.
Or, selon une archéologue spécialiste de la wilaya de Tipasa, experte en la matière, Fawzi Doumaz, qui était membre du CNRA (Centre national de recherches archéologiques), actuellement directeur du musée des sciences en Italie, avait tenté une reconstitution du Mausolée Royal de Maurétanie. Afin de prendre des photos aériennes du monument, il devait ramener un drone.
On lui a interdit de le faire. On lui avait même refusé de louer un drone pour entamer son travail, qui consistait à numériser tous les patrimoines archéologiques. Il avait réussi quand même à numériser les mosaïques et certains sites.
Numérisation
Les travaux réalisés au sol au niveau du Tombeau de la Chrétienne avaient été effectués. Malheureusement, la mission de numérisation du monument s’est arrêtée quand la décision du refus d’utiliser le drone avait été prise. Une photo aérienne du site aidera à réaliser un excellent travail. Il est impossible, selon un spécialiste, de restaurer ou de reconstituer le monument à l’emporte-pièce.
L’intelligence artificielle permet de numéroter toutes les pierres qui composent le Mausolée Royal de Maurétanie, dans le but d’entamer sa reconstitution, sachant que ce travail exige la présence de spécialistes de la période numide et de l’art, un connaisseur de l’Histoire de l’art punique, l’Histoire grecque, en raison de l’existence des chapiteaux ioniques. La restitution architecturale du site avait été effectuée en essayant de le reconstituer. Une porte d’entrée permet aux visiteurs de pénétrer à l’intérieur du monument. Elle se trouve sous la fausse porte Est.
Néanmoins, selon des spécialistes, le Mausolée Royal de Maurétanie avait été bombardé par un Dey turc au XVIIe siècle. Il croyait qu’à l’intérieur de ce gigantesque monument, des trésors étaient dissimulés. Les forces turques avaient alors bombardé la porte Est, devenue à ce jour la porte d’entrée dans le labyrinthe du monument, qui avait été érigée près d’une faille tectonique qui relie la localité de Sidi-Rached jusqu’à la ville côtière de Ain-Tagourait (ex-Bérard).
Séismes
Le mausolée avait été secoué par plusieurs séismes. Les Français, lors de la colonisation, ne se sont pas privés de construire leurs fermes dans la Mitidja avec des pierres du Tombeau de la Chrétienne, arrachées illégalement du monument. Pour le rappel, voilà les raisons qui expliquent la présence éparse, de surcroît dans le désordre de plusieurs pierres sur le sol, appartenant au monument archéologique qui a subi des saccages et agressions depuis des siècles.
La numérisation et la restauration du Mausolée Royal de Tipasa nécessitent des moyens. A l’aide de l’IA, la restitution du monument s’effectuera en moins de temps. Il s’agit des techniques qui aident à effectuer l’inventaire, après avoir fait le thésaurus, avec la contribution d’une équipe d’archéologues pourvus d’une riche expérience.
La numérisation est, par conséquent, une excellente action, car, en cas de disparition d’une quelconque pièce du monument, la numérisation a déjà inventorié les données. Une équipe de développeurs, une start-up, la création d’un algorithme dédié au Mausolée Royal de Maurétanie, autant d’actions sont déjà menées par le chercheur algérien de la Silicon Valley.
C’est une technologie qui favorise un gain de temps précieux. A l’avenir, si l’Etat décide de reconstituer les monuments ayant subi des agressions humaines ou naturelles, grâce aux inventaires réalisés par la numérisation, les travaux de mise en valeur des sites et monuments historiques ne seront pas entravés. Il n’en demeure pas moins que dans ce cas précis, l’archéologie oriente ces équipements de la numérisation.
Par ailleurs, dans l’intérêt de la recherche, les techniques de l’IA, de la numérisation ou de la digitalisation feront avancer rapidement les travaux pour la connaissance du passé de ces précieux vestiges.
Dans le cadre des fouilles d’urgence, imposées pour réaliser des projets à utilité publique sur le site. L’utilisation de l’IA permet de gagner du temps et d’avancer utilement dans les travaux. L’IA devient alors un allié incontournable dans les grands chantiers.
Un salut. Il y a des sites archéologiques qui font face à des menaces. Les sites archéologiques se fragilisent au fil des années. La numérisation garantit leur pérennité. Des prospections autour du Tombeau de la Chrétienne sont incontournables, si les scientifiques veulent dévoiler tous les secrets qui identifient le passé, encore enfouis autour de ce monument.
En plus de la numérisation, de l’IA, il existe des appareils spécialisés dans la radiographie des murs et des sols. Le CNRA devra s’impliquer sérieusement dans cette aventure pour enrichir les connaissances pointues, inhérentes à l’Histoire ancienne de ces trésors encore inconnus en Algérie, en mesure de créer des richesses incommensurables que renferme notre pays.
Selon une archéologue experte et ayant participé à plusieurs missions de fouilles et d’exploration des sites archéologiques dans tout le pays, intéressée par la numérisation et l’intelligence artificielle dans le domaine de l’archéologie, «j’estime que le but de la restitution architecturale des monuments historiques consiste à reconstruire méthodiquement, en partenariat avec les meilleurs scientifiques, archéologues, architectes, historiens, l’image du monument archéologique».
Rigueur et patience
«Naturellement, ce travail exige de la rigueur et de la patience, afin de respecter le moindre détail de toutes les formes et les dimensions des objets archéologiques, l’avancée rapide de l’innovation technologique constitue une précieuse opportunité pour le progrès humain, avec des impacts significatifs sur le tissu social, économique et culturel, qui nécessitent une réflexion approfondie», ajoute notre interlocutrice.
«L’intelligence artificielle est en mesure de devenir un grand allié pour la préservation du patrimoine archéologique et historique de notre pays, il y a lieu donc d’analyser les données des satellites pour découvrir d’anciennes structures souterraines et enseigner par la suite à une machine comment les reconnaître» enchaîne-t-elle. Il s’agit d’une technologie qui pourra dévoiler les irrégularités et des objets microscopiques qui ne peuvent pas être détectés par l’œil humain. Ces projets pionniers seront très probablement utilisés à l’avenir pour contrôler les territoires afin de préserver les paysages culturels.
Ces technologies permettent de sauver de manière préventive, ce qui n’a pas encore été découvert, précise-t-elle. L’intelligence artificielle permet aussi d’exploiter des données à un niveau qu’aucun humain ne pourrait jamais atteindre, », conclut-elle.
L’introduction de la digitalisation dans les sites archéologiques et les monuments historiques constitue une passerelle dans la mémoire, en illuminant le passé. Entretenir le devoir de mémoire est incontournable, un objectif pour les scientifiques et chercheurs algériens, afin de faire apprendre l’Histoire du pays, en reconstituant les vestiges des anciennes civilisations.
L’algorithme sera conçu par les informaticiens algériens. L’enrichissement de l’IA par des données, pour la première fois dans le domaine de l’archéologie, grâce à la performance des outils de l’informatique, autant d’atouts qui invitent les citoyens et les touristes étrangers à voyager dans le lointain passé, naturellement, dès que ces vestiges seront restitués.
Ces nouvelles technologies contribuent à l’identification de toutes les pièces, car les archéologues ignorent certaines informations. L’intelligence artificielle est en mesure de donner beaucoup plus de caractéristiques, des précisions, une image la plus précise sur la datation du monument, comme si c’était un puzzle à compléter.
En Algérie, un nombre incalculable de pièces archéologiques sommeillent. La digitalisation aura le mérite de faire un coup de projecteur sur ces précieux objets, patrimoines des différentes civilisations qui sont passées en Algérie. La restitution inédite de certains sites archéologiques constitue des matières de publication dans les conférences internationales. L’expérience scientifique qui sera entamée à l’avenir au niveau du monument du Tombeau Royal de Maurétanie de Tipasa sera utilisée dans les mausolées implantés dans les wilayas et autres sites historiques.
C’est le début d’un rêve, d’un espoir pour l’environnement patrimonial pour l’Algérie. L’aboutissement de cette conjugaison entre l’archéologie et l’intelligence artificielle suscitera un intérêt pour les touristes du monde entier, créera les emplois et moult richesses.
Des perspectives prometteuses pour le développement économique, social et culturel du pays. Le secteur de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique bénéficiera de ces expériences menées par les élites algériennes, y compris celles qui sont établies à l’étranger.
Les start-ups seront mises à contribution dans cet élan. Le patrimoine culturel national, de surcroît archéologique, demeurera une curiosité qui va attirer les touristes étrangers grâce, à juste titre, à l’avènement de la digitalisation, de la numérisation, de l’intelligence artificielle.
Les sites et monuments culturels ressuscités par les scientifiques vont redorer le blason de ces trésors archéologiques en Algérie. La digitalisation, l’IA, des techniques qui libèrent les initiatives et les énergies pour la mise en valeur de l’environnement patrimonial. Des informaticiens, archéologues et architectes algériens reconnaissent et affirment que l’Algérie deviendra un pays pionnier dans ce domaine.
Ce travail impactera positivement le développement national. «Ces initiatives menées par les jeunes universitaires et chercheurs, de surcroît médiatisées, vont sensibiliser les spécialistes, mais aussi le public en général, sur l’Intelligence artificielle et les nouvelles technologies liées à la numérisation appliquées, de plus en plus au patrimoine culturel, matériel et immatériel de notre pays», nous déclare le Pr Bouchenaki Mounir, ex-D.G/Adjoint de l’Unesco et ex-D.G du CPM (Comité du patrimoine mondial).
Déjà, Dr Yacine El-Mahdi Walid, et Dr Soraya Mouloudji, respectivement ministre délégué, chargé de l’Economie, de la Connaissance et des Starts ups, et ministre de la Culture et des Arts, viennent de prendre attache avec le Dr Bouache Mourad afin d’accompagner ce projet innovateur en Algérie, inhérent à la reconstitution du Mausolée Royal de Maurétanie (Tombeau de la Chrétienne, ndlr), et des vestiges de l’environnement archéologique et historique, à travers l’utilisation des techniques de l’IA, un autre atout pour le développement économique, social et environnemental en Algérie.
Unesco. Classement des sites historiques de la ville d’Oran : Finalisation du dossier de candidature
Le dossier de candidature de classement des sites historiques et du patrimoine de la ville d’Oran «a été élaboré et totalement finalisé pour être présenté à l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, les sciences et la culture (Unesco)», a annoncé jeudi la ministre de la Culture et des Arts, Soraya Mouloudji.
Dans une déclaration à la presse en marge de sa visite à Oran, la ministre a mis en relief la richesse du dossier technique de candidature pour le classement des sites historiques et du patrimoine de la ville d’Oran à présenter à l’Unesco, soulignant qu’il englobe différents sites remontant à l’ère ottomane et les forteresses de défense historique de la ville d’Oran.
Après avoir assisté, au niveau de l’espace aménagé dans le quartier populaire «Derb», à une activité récréative destinée aux enfants, organisée par la fondation du Théâtre régional d’Oran, Mme Mouloudji a déclaré : «Nous avons lancé un appel pour désigner le théâtre régional d’Oran afin de le classer monument culturel national.»
Elle a indiqué, à ce propos, qu’une commission compétente se réunira dans les prochains jours pour classer cet édifice culturel. La ministre avait auparavant inauguré la maison de la Culture d’Oran où elle a assisté à une exposition d’art plastique.
Elle a ensuite visité une exposition de photographie au musée d’art moderne et contemporain (MAMO) et le théâtre régional d’Oran, avant d’inspecter le chantier d’aménagement du théâtre de plein air Chekroun Hasni. A la fin de sa visite, Mme Mouloudji a présidé, au siège de la wilaya, une rencontre à huis clos avec les directeurs de la culture des wilayas dans l’Ouest du pays et les commissaires des festivals culturels de la région. APS