L’Algérie a réduit fortement les impacts environnementaux de la chaîne énergétique par son modèle de consommation axé sur le gaz naturel, un «produit propre».
L’Algérie, premier pays qui a commencé à exporter le GNL au monde depuis 1964 –32 ans avant le Qatar (en 1996) et 45 ans avant la Russie – a expédié vers les marchés internationaux 80% de sa production en 1980, 79% en 2005 et 58% en 2019, selon les chiffres dressés dans une étude présentée en juin 2022 par l’ancien ministre de l’Energie, Abdelmadjid Attar.
Au fil des ans, les exportations ont donc baissé. Ce qui n’a toutefois pas impacté le rôle et la place de l’Algérie sur la scène mondiale du gaz. C’est aujourd’hui l’un des acteurs majeurs du marché. L’Algérie a d’ailleurs réussi à occuper la première place en Afrique en tant que plus grand exportateur de GNL pour la première fois depuis 2010, dépassant ainsi le Nigeria qui avait conservé cette position pendant plus d’une décennie.
Les experts attribuent ce succès à «l’expérience historique de l’Algérie dans l’exploitation du gaz pour le développement de ses différents secteurs économiques, ainsi qu’à son système d’exportation diversifié, le plus important du continent en termes de capacité».
L’Algérie est également le deuxième fournisseur de gaz vers l’Europe après la Norvège, avec 26 milliards de mètres cubes, en raison de la crise ukrainienne qui a entraîné un recul des approvisionnements russes vers l’Europe de l’Ouest en particulier.
En somme, selon le ministre de l’Energie et des Mines, Mohamed Arkab, la sécurité énergétique de l’Algérie est axée sur la garantie de la couverture énergétique du pays sur le long terme et sur la contribution à la sécurité énergétique mondiale en termes de régularité, de stabilité et de fiabilité.
Un modèle de consommation à revoir
Cependant à long terme, le modèle énergivore de consommation actuel est à revoir via le recours aux énergies renouvelables. En effet, le bilan énergétique national du ministère de l’Energie et des Mines pour 2022 fait ressortir que le gaz naturel représente 40% de la consommation nationale d’énergie, dont les deux tiers sont tirés par les ménages, les tertiaires et l’agriculture.
Avec un marché national, en croissance de 7 ou 8% par an, la consommation interne reste donc prioritaire avant toute exportation de gaz. «Pour le moment, nos réserves de gaz, qui sont d’environ 2300 milliards de mètres cubes, sont suffisantes pour honorer nos engagements contractuels d’exportation jusqu’en 2030.
Au-delà de 2030, avec l’arrivée à échéance de la plupart de nos contrats, il serait difficile de les reconduire, car à cet horizon il ne nous restera plus qu’environ 1400 milliards de mètres cubes comme réserves, ce qui va juste pouvoir nous garantir une sécurité énergétique jusqu’en 2040-2050, y compris la réinjection dans les gisements comme Hassi Messaoud et Hassi Rmel», analyse l’expert en énergie Saïd Beghoul contacté à ce sujet.
Et de poursuivre : «Les exportations pourraient s’arrêter vers 2030-32, sauf, peut-être pour quelques livraisons en quantités très limitées de GNL vers un ou deux clients européens. Je dis cela, s’il n’y aura pas une augmentation des réserves en urgence et en grands volumes d’ici 2030. Maintenant, si on arrive à augmenter de manière significative nos réserves, on peut repousser nos engagements jusqu’à 2040, voire 2050.»
Ce qui veut dire qu’il n’y a pas d’autres choix que de s’orienter vers l’économie d’énergie et l’efficacité énergétique. Ce qui a poussé les pouvoirs publics à accélérer le processus de transition énergétique. La nouvelle approche consiste en effet, selon le professeur Noureddine Yassaa, Commissaire aux énergies renouvelables et à l’efficacité énergétique (Cerefe) cité par l’APS, à valoriser les ressources énergétiques nationales, fossiles ou renouvelables, localement, en créant de la valeur ajoutée, de la richesse et de l’emploi dans le cadre d’une politique de diversification de l’économie.
Cette approche «favorise l’exportation des produits dérivés ou manufacturés au lieu d’exporter le gaz naturel brut». Autrement dit, il s’agit d’inciter les partenaires industriels étrangers à s’implanter en Algérie en bénéficiant de l’accès à une énergie abondante, abordable, propre et durable.
Mais aussi des avantages accordés dans le cadre du nouveau code sur l’investissement. «Les volumes de gaz ainsi dégagés continueront à approvisionner les partenaires conformément aux engagements en la matière», a expliqué M. Yassaa. Et d’insister sur le rôle central du gaz naturel comme «allié incontournable» des énergies renouvelables, notamment pour alimenter les secteurs énergivores.
Ce qui illustre tout l’intérêt pour l’Algérie de déployer massivement les énergies renouvelables, compte tenu des potentialités qu’elle recèle, de façon à préserver le gaz naturel en tant que levier de création de la valeur ajoutée. «Le gaz naturel a toute sa place dans le système énergétique mondial : toutes les projections crédibles montrent que le couple gaz naturel-énergie solaire occupe une place répondante dans le futur système énergétique mondial.
En attendant le développement des technologies de stockage à grande échelle, notamment les batteries de stockage et l’hydrogène vert, le gaz naturel permettra aux énergies renouvelables intermittentes, solaire et éolienne, de se développer tout en assurant la stabilité et la fiabilité des services énergétiques», a encore souligné le responsable du Cerefe.
Le ministre a d’ailleurs insisté, pour sa part, sur cette question à maintes reprises, notant que l’Algérie a réduit fortement les impacts environnementaux de la chaîne énergétique par son modèle de consommation axé sur le gaz naturel «produit propre».
Dans ce cadre, faudrait-il rappeler le programme d’investissement dans le domaine des hydrocarbures, estimé à plus de 40 milliards de dollars, aussi bien dans l’exploration, la production que les infrastructures de transport.
Ce dernier permettra de maintenir un niveau de production nationale de gaz naturel de plus de 110 milliards m3/ an, dont plus de 50% seront destinés à l’exportation, sachant que la part du gaz naturel du pays, dont l’Algérie est un des principaux exportateurs, «représente 5% du marché mondial», selon le ministre.