Sommet de l’Otan : L’intégration de l’Ukraine et de la Suède au menu

11/07/2023 mis à jour: 03:43
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Le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg

La demande d’adhésion de Kiev, le blocage de la Turquie de l’intégration de la Suède à l’Organisation Atlantique Nord. Tels sont, entre autres, les principaux dossiers qui seront abordés lors du sommet de l’Otan qui se tient à partir d’aujourd’hui à Vilnius, la capitale lituanienne.

Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, est attendu à Vilnius pour demander l’intégration de son pays à l’Otan  une fois la guerre terminée. Il est soutenu par les pays de l’est de l’Europe pour qui il est crucial que l’Ukraine rejoigne l’Alliance pour dissuader Moscou de lancer de nouvelles offensives à l’avenir. 

Mais Washington est réticent à l’idée d’aller beaucoup plus loin qu’une promesse sans précision de calendrier. «Je ne pense pas qu’elle (l’Ukraine, ndlr) soit prête à faire partie de l’Otan», a déclaré le président américain, Joe Biden, dans une interview diffusée dimanche par la chaîne américaine CNN, relevant qu’il n’y a pas d’unanimité parmi les alliés sur la perspective de faire entrer Kiev «au beau milieu d’une guerre».

Et d’observer : «Nous serions en guerre contre la Russie, si c’était le cas.» Une adhésion aurait des «conséquences très négatives» pour la sécurité européenne, a aussi mis en garde le Kremlin lundi, qui la considère comme une «menace» contre la Russie exigeant une «réponse claire et ferme». Au sommet de Bucarest en avril 2008, les dirigeants des pays de l’Otan ont refusé à l’Ukraine et à la Géorgie le statut de candidat officiel, malgré un «soutien ferme» du président américain George W. Bush. L’organisation s’est engagée toutefois à les accueillir à plus long terme.

L’Ukraine a d’ores et déjà obtenu vendredi de Washington la promesse de lui livrer des bombes à sous-munitions, une arme très controversée. Ces armes, interdites dans de nombreux pays, sont vivement critiquées, car elles tuent à l’aveugle en dispersant des petites charges explosives avant ou après l’impact et sont accusées de faire de nombreuses victimes civiles collatérales.

La Russie y a vu un «aveu de faiblesse». Le président Biden, qui a défendu sa décision «difficile», a fait une visite éclair hier au Premier ministre britannique Rishi Sunak, qui a appelé samedi à «décourager» l’utilisation de ces armes interdites par la Convention d’Oslo de 2008 signée par son pays. Entre-temps, plusieurs membres de l’Alliance (Etats-Unis, Royaume-Uni, Allemagne, France) négocient de possibles engagements de fournitures d’armes sur le long terme pour aider l’Ukraine à se défendre.

Des accords de partage de renseignement, de formation et de reconstruction de l’industrie d’armement ukrainienne pourraient aussi être envisagés. Mais d’autres pays voient que ces engagements ne peuvent pas se substituer à une éventuelle adhésion de l’Ukraine à l’Alliance. «La meilleure garantie de sécurité pour l’Ukraine est une adhésion pleine et entière à l’Otan une fois que la guerre est finie», a indiqué le Premier ministre letton Krisjanis Karins.

En parallèle, la Suède attend l’accord de la Turquie pour devenir le 32e membre de l’Alliance. Ankara a donné son vert à l’adhésion de la Finlande en avril, mais bloque jusque-là celle de Stockholm.

Le casse-tête turc

Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, s’entretiendra au sommet de l’Alliance avec son homologue américain, a annoncé dimanche dans un communiqué la présidence turque, qui précise que les deux dirigeants se sont entretenus par téléphone dimanche au sujet notamment de l’adhésion de la Suède à l’Alliance et de la livraison à la Turquie des avions de combat américains F-16. «Notant qu’il n’est pas correct d’associer la demande de F-16 de la Turquie à l’adhésion de la Suède, le président Erdogan a remercié le président américain Biden pour son soutien à la demande de F-16 turque », ajoute le communiqué.

Pour certains observateurs, le feu vert turc à l’entrée de la Suède dans  l’Alliance est conditionné à la livraison des F-16 à Ankara. «J’essaye de rassembler une sorte de consensus où on renforce l’Otan via les capacités militaires à la fois de la Grèce et de la Turquie, et on autorise la Suède à entrer. Mais ce n’est pas encore fait», a indiqué le président américain dans l’interview à CNN où il s’est dit «optimiste» au sujet d’une prochaine adhésion de Stockholm.

Une rencontre entre le président turc Erdogan, le Premier ministre suédois, Ulf Kristersson, et le secrétaire général de l’Otan, Jens Stoltenberg, était prévue hier à Vilnius, pour tenter de débloquer la situation et d’obtenir une promesse turque juste avant l’ouverture du sommet qui s’étend jusqu’à demain.

Mais quelques heures avant ces entretiens, la Turquie a imposé une condition à l’entrée du pays nordique dans l’Otan : Ankara soutiendra l’adhésion de la Suède à l’Alliance, si Bruxelles rouvre les négociations d’adhésion de la Turquie à l’Union européenne (UE), a affirmé le président turc, Recep Tayyip Erdogan. «Ouvrez d’abord la voie à l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne et, ensuite, nous ouvrirons la voie à la Suède tout comme nous avons ouvert la voie à la Finlande», a-t-il déclaré, alors que les négociations entre Ankara et l’UE sont à l’arrêt depuis plusieurs années.

Il a également réitéré ses exigences envers la Suède qu’il accuse de mansuétude envers les militants kurdes réfugiés sur son sol. Comme il a réclamé des dizaines d’extraditions de militants que son pays qualifie de «terroristes». La Suède et sa voisine la Finlande ont mis fin à des décennies de non-alignement militaire et demandé à rejoindre l’Otan à la suite de l’intervention russe en Ukraine. La Finlande a officiellement rejoint l’Alliance en avril.

Un peu plus tard dans la journée, le chancelier allemand Olaf Scholz a estimé qu’il n’y a pas de lien entre les négociations d’adhésion de la Turquie à l’UE et l’entrée de la Suède dans l’Otan, comme l’a revendiqué le président turc. «Il ne faut pas la considérer comme un sujet lié», a-t-il observé lors d’une conférence de presse à Berlin, estimant que «rien ne s’oppose à une adhésion de la Suède à l’Otan», à laquelle le président turc fait barrage. 
Autre dossier non moins important qui sera mis sur la table : la contribution financière des Etats membres aux dépenses de l’Alliance.

Après l’annexion de la Crimée par la Russie en 2014, les pays membres de l’Otan se sont engagés à tendre vers l’objectif de consacrer 2% de leur PIB aux dépenses militaires d’ici 2024.

Selon les derniers chiffres de l’Alliance, 11 des 31 pays membres devraient atteindre ou dépasser ce seuil cette année. Jens Stoltenberg s’est dit confiant dans le fait que ce chiffre «augmente de manière significative l’année prochaine». Les alliés ont renégocié à la hausse cet engagement. Le seuil de 2% sera désormais un minimum. Mais certains pays estiment qu’il leur faudra de nombreuses années avant d’y arriver.

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