Plus de 70 km du littoral de la wilaya de Boumerdès ne sont pas protégés contre la pollution due aux rejets des eaux usées dans la mer ou les plages. Sur les 90 km de côtes, seulement 20 km sont à l’abri de ce phénomène qui s’amplifie au fil des ans à cause notamment de l’urbanisation anarchique.
Ce constat émane de la direction de l’hydraulique qui a rendu publiques récemment à la maison de l’environnement des données importantes sur le secteur. Faute de stations de relevage et d’épuration des eaux usées, des cités entières déversent, en effet, les eaux domestiques dans la mer ou les espaces protégés par la loi 86-2 du 3 janvier 1986 relative à la protection et la mise en valeur du littoral. Le problème semble n’épargner aucune localité balnéaire de la région ; de Boudouaou El Bahri jusqu’à Afir en passant par Corso, Boumerdès, Figuier, Zemmouri, Cap Djinet et Dellys.
Les égouts qui ruissellent vers la plage font partie du triste décor, même le célèbre site du Rocher noir n’y échappe pas. «L’APC a dégagé une enveloppe de 35 millions de dinars pour aménager le site, mais les travaux de raccordement au réseau d’assainissement n’ont pas touché toutes les maisons. Le chantier patine depuis plusieurs semaines alors qu’il devrait être achevé avant la saison estivale», martèle un habitant de ce quartier, le plus ancien de la ville.
La direction de l’hydraulique fait état de 700 points de rejets à travers la wilaya, précisant que 24 sont collectés par 40 km de canalisation. La wilaya compte à présent 15 stations de relevage et trois stations d’épuration des eaux usées. Ce qui est insuffisant pour ne pas dire insignifiant pour une wilaya de plus d’un million d’habitants et une superficie de 1456 km2. En 2007, les autorités avaient recensé 28 921 fosses septiques à travers 32 communes de la région, soulignant que 24 348 ont été éradiquées, dont 603 en 2023. Les programmes d’urbanisation n’ayant jamais cessé. Combien de fosses ont été réalisées depuis ? Sources de multiples désagréments, l’impact sur l’environnement et la vie des habitants est indéniable. Pour pallier ce problème, d’importants projets ont été inscrits, mais la réalisation ne suit pas. Les projets gelés à cause de l’inertie de certains responsables sont multiples. Il n’y a pas longtemps, le directeur de l’hydraulique, Abdelkader Ziouche, a annoncé la levée de gel pour la station d’épuration de Boudouaou El Bahri, en souhaitant qu’il en sera de même pour celles prévues à Ouled Haddadj, Hamiz, Benchoud et Legata.
Des projets en perspective
Même les projets prévus dans le cadre du schéma directeur d’assainissement des trois bassins versants de la wilaya (Bas Sébaou, Hamiz et Bas Issers) tardent à voir le jour, malgré la fin des études qui ont coûté 100 millions de dinars au Trésor public. En matière d’AEP, la situation semble s’améliorer au fil des années. Outre la station de dessalement de Cap Djenet dont les travaux avancent bon train, 9 nouveaux forages sont en cours de réalisation afin d’atténuer la pénurie qui affecte encore plusieurs localités de la région.
Selon l’ADE, 18% des foyers de la wilaya sont approvisionnés en eau quotidiennement, un tiers est alimenté 1j/2 alors que 33% le sont durant un jour sur quatre ou plus. La production journalière de l’eau servie pour la wilaya est estimée à 191 000m3 alors que les besoins sont évalués à 253 000m3, dont 33 000 pour le secteur industriel. Entre autres contraintes, les responsables du secteur évoquent la limitation des ressources, la vétusté et le sous-dimensionnement des réseaux, l’absence de schéma directeur de l’AEP et le manque de numérisation des plans de réseau.
Là aussi, ce ne sont pas les projets qui manquent. Sept opérations ont été lancées en 2023 et 11 autres, d’un coût global de 2,1 milliards de dinars, le seront incessamment pour réduire le déficit et améliorer l’AEP dans les agglomérations affectées par la pénurie. Ces projets portent sur l’extension et la rénovation de centaines de kilomètres de réseaux ainsi que la réalisation de plusieurs réservoirs et de stations de pompage.
Autre préoccupation : augmenter les superficies irriguées à 3000 ha à travers la wilaya. Le défi n’est pas des moindres surtout lorsqu’on sait que 80% des systèmes d’irrigation sont obsolètes. Cela est constaté aussi bien au niveau du périmètre de Hamiz qu’au Bas Sébaou, Sidi Daoud, Chender et Cap Djenet où les barrages d’eau sont envasés et les équipements d’irrigation endommagés.
La direction de l’hydraulique a alloué 276 millions de dinars pour remettre les choses en marche, élargir les superficies irriguées et réhabiliter 18 retenues collinaires. Habitués aux promesses sans lendemain, les agriculteurs espèrent que ces projets soient concrétisés sur le terrain pour continuer à travailler leurs terres.