L’éditeur et photographe Samir Djama expose une imposante collection de photos sur toiles, et ce, jusqu’au 8 octobre prochain à la galerie Baya du palais de la culture Moufdi Zakaria à Alger.
Si par le passé l’artiste photographe Samir Djama a participé à quelques expositions dans un cadre intime, aujourd’hui, il signe sa première exposition de photos sur toiles individuelle. Intitulée «Ombres et lumières, La passion du patrimoine», l’exposition en question grandeur nature se décline sous la forme d’une série de photos à thèmes suavement sélectionnés. Quatre vingt photos en couleurs et en noir et blanc attirent le regard de tout visiteur. Les sujets sont à la fois captivants et parlants. Le cadrage est des plus étudiés.
Le jeu de l’ombre et de la lumière est tout simplement fabuleux. Ayant une expérience riche d’une quarantaine d’années dans la photographie, Samir Djama est également directeur de la maison d’édition algérienne «Colorset», spécialisée dans le livre du patrimoine.
Cet éditeur et imprimeur dans la chaîne graphique, détient tous les secrets de la photo artistique. L’ensemble des ses clichés s’inscrivent dans la consolidation de l’histoire du patrimoine matériel de l’Algérie. Il faut dire que la photographie chez les Djama est une affaire de famille. C’est son frère aîné, Nadir qui l’a initié à la photographie à l’âge de trois ans. Dans un témoignage poignant, Nadir Djama affirme : «Pour Samir, toutes les maisons comportaient nécessairement, une chambre noire à côté de la cuisine et de la salle de bain. Les bains photos, les films, les cuves de développement, les photos suspendues pour le séchage… étaient son quotidien.
Sa petite main a grandi, a lâché la mienne pour aider au travail. J’étais sévère et je volais lui transmettre tant la vie est angoissante. Après l’université, il a plongé, avec mérite et succès, dans le monde qui est le notre, la photographie et l’édition. Le fruit est là et je suis comblé par cette trajectoire».
Poteries séculaires
Ainsi, l’artiste photographe Samir Djama commence par exhiber une douzaine de photos, représentant d’anciennes poteries, datant de plus de 70 ans. Il nous confie qu’il y a cinq ans, un ami lui a offert ces vielles poteries qu’il a d’abord nettoyées avant de les dispatchées dans sa maison. «Un jour, j’ai pris une poterie pour l’observer à la lumière. A partir de là, les poteries m’ont interpellé. Je me suis dis pourquoi ne pas faire une série. Elles sont à l’état pur. Je n’ai pas voulu les toucher. Je n’ai fait que les nettoyer», précise-t-il. La Casbah d’Alger est également immortalisé à travers son tissu architectural, ses venelles, ses portes, ses heurtoirs ou encore ses femmes en haik maculées de blanc ou encore en karako, finement brodés de fil d’or. Des portraits d’écoliers d’Alger, posant avec leurs tenues traditionnelles sont à l’honneur.
Ces âmes angéliques se sont prêtés au jeu du mannequinant, dans leurs écoles, lors de la célébration de y ennayer. Pour notre artiste photographe, sa présence ce jour là a été une louable coïncidence. Dans un autre registre, la fantasia - cette tradition équestre pratiquée essentiellement au Maghreb, se manifestant par la simulation d’assauts militaires - s’impose au regard avec ces cavaliers, munis de fusils à poudre, chevauchant des montures richement harnachées. Samir Djama rappelle qu’il a pu fixer cette série de photos lors du dernier festival du cheval à Tiaret.
Hommage à Mohamed Kouaci
Dans son exposition, Samir Djama a voulu rendre un hommage posthume au défunt photographe algérien Mohamed Kouaci. Ce dernier est né 1922 à Blida et il est mort en 1996 à Alger. Combattant de l’ALN durant la guerre d’indépendance de l’Algérie, il est considéré comme un des pionniers de la photographie en Algérie. Pour rappel, il était le seul photographe du journal El Moudjahid, organe officiel du FLN, ayant joué un rôle considérable dans la reconnaissance internationale de la cause algérienne. Il a réalisé un nombre important de clichés sur les Algériens réfugiés en Tunisie, les camps d’entrainement de l’ALN et des portraits des présidents tunisiens et algériens, Habib Bourguiba, Ahmed Ben Bella, Houari Boumédiène ou de l’écrivain anticolonialiste Frantz Fanon.
Certains de ses clichés sont exposés au musée du Mémorial du martyr à Alger. L’éditeur Samir Djama annonce la sortie prochaine, d’un beau livre, retraçant la biographie de Mohamed Kouaci. Comme pour mieux montrer à la nouvelle génération les anciennes techniques de photographie, Samir Djama présente une installation d’une collection d’anciens appareils de photos et un ancien agrandisseur avec lesquels il a travaillé. «J’ai fait, dit-il, du développement, de la diapositive. Je suis un excellent technicien. J’ai une très grande maitrise dans la partie labo et la partie éclairage. A travers mon ancien matériel, je voudrais faire un clin à d’œil à la jeunesse algérienne». En somme, l’exposition «Ombres et lumières, La passion du patrimoine» de Samir Djama a le mérite de présenter des photos techniquement justes sur tous les plan : Une belle sélection, une bonne composition, une bonne mise au point, un jeu d’ombre et de lumière idéal.
C’est pourquoi, une virée du côté de la galerie «Baya» du palais de la culture Moufdi Zakaria de Kouba à Alger s’impose.