Réunions à New York et Genève sur La Libye : Bachagha et Dbeyba s’arrachent le soutien international

27/06/2022 mis à jour: 07:47
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Photo : D. R.

Réunion aujourd’hui du Conseil de sécurité sur la Libye. Rencontre demain à Genève entre les présidents du Parlement et du Conseil d’Etat, Aguila et Mechri, pour une assise constitutionnelle des élections. Entre-temps, Bachagha et Dbeyba s’arrachent le soutien international !

Il paraît que le communiqué sur la Libye, publié par la France, l’Allemagne, l’Italie, la Grande-Bretagne et les Etats-Unis, dans la nuit du vendredi 24 au samedi 25 juin, constituera le socle de leur politique prochaine sur ce dossier.

La principale décision, non dite explicitement, c’est d’enlever l’argent du pétrole des mains des gouvernants, pour que ces fonds ne polluent plus la scène politique. Une commission internationale, dirigée par un Libyen, gérera ces fonds et veillera à faire une distribution équitable et transparente.

Pareille décision mettrait Dbeyba sur la touche, lui qui mise sur l’argent du pétrole pour améliorer son image de marque, en créant une multitude de primes. Les rencontres d’aujourd’hui et demain à New York et Genève planteraient ce décor.

Genève et New York

D’abord, Genève, qui abrite demain et après-demain une rencontre, supposée être la dernière, entre le Parlement et le Conseil d’Etat en Libye, en présence des présidents Aguila Salah et Khaled Mechri, ce qui permettrait de dépasser les derniers obstacles autour du socle constitutionnel nécessaire à la tenue des élections générales en Libye. Selon les échos, les jeux sont pratiquement faits.

Les multiples rencontres des représentants du Parlement et du Conseil d’Etat ont déjà réduit les divergences. La rencontre de Genève pourrait aboutir à un accord, surtout que le Conseil d’Etat ne s’attache pas spécialement à Abdelhamid Dbeyba, parce que pareil accord signerait la fin de ce dernier, puisqu’il renforcerait le statut des deux Chambres et éliminerait automatiquement le gouvernement Dbeyba.

Reste la question de la relève et si elle sera assurée par le gouvernement Bachagha, plusieurs alternatives restent encore possibles. Cela dépend en partie de la réunion d’aujourd’hui au Conseil de sécurité à New York.

La communauté internationale discutera, aujourd’hui au Conseil de sécurité, des derniers développements de la question libyenne. Il sera surtout question de trouver un mécanisme pour une distribution équitable et transparente des revenus du pétrole entre les régions libyennes. La problématique a été soulevée depuis le 23 octobre 2020 et l’accord de cessez-le-feu en Libye, sans jamais être appliquée.

Il s’agissait depuis d’installer une commission, présidée par un Libyen, qui percevrait l’argent du pétrole et le distillerait de manière restrictive. C’était l’une des conditions de Haftar pour signer le cessez-le-feu avec Ahmed Myitigue, l’adjoint de Fayez Al Sarraj. Myitigue est l’oncle de Fathi Bachagha qui ne fait qu’assurer la relève. Il a fallu deux ans à la communauté internationale pour arriver à la conclusion que tant que l’argent coule à Tripoli, il continue à servir la classe politique, leurs milices et leurs élections, non la population libyenne. D’où cette décision qui se prépare en silence.

État des lieux

Les derniers développements de 2021/2022 montrent bien que le clan Khalifa Haftar/Aguila Salah, celui-là même qui a lancé la guerre contre Tripoli en 2019, est parvenu à diviser Misrata et l’Ouest libyen, entre un groupe favorable à l’enterrement de la hache de guerre, celui de Fathi Bachagha et un autre attisant les rancœurs contre Haftar, celui de Abdelhamid Dbeyba.

Le clan Bachagha est celui-là même qui a signé le cessez-le-feu du 23 octobre 2020 et qui travaille à unifier l’armée libyenne à partir de la commission militaire "5+5". 

Par contre, Abdelhamid Dbeyba est allé jusqu’à dire en public, devant des miliciens : «Nous ne pouvons oublier ceux qui ont attaqué Tripoli et tué nos jeunes, qui sont des martyrs.» C’était pour haranguer ses troupes le mois dernier, lorsque Bachagha a tenté de s’installer à Tripoli.

Par ailleurs, la multiplication des incidents armés entre des milices, à l’intérieur de Tripoli, montre bel et bien que Dbeyba n’a plus la main, comme ce fut le cas au début de son installation au pouvoir en mars 2021. Le plus récent des incidents date d’avant-hier soir à la place Souk Thelath (le marché du mardi). Dbeyba a demandé une enquête.

Par ailleurs, les données sur le terrain montrent que Dbeyba n’arrive plus à sortir dans un rayon dépassant les 50 kilomètres autour de Tripoli. Il mise sur le rapprochement autant que possible de la communauté internationale, en exprimant ses dispositions à appliquer toutes les recommandations de l’étranger, en plus de multiples promesses d’instaurer des primes non remboursables en faveur des Libyens, comme celles du mariage, du salaire unique, des études à l’étranger et la liste est longue.

Son ministre de l’Economie a promis des indemnités en cas de levée de la subvention sur le pétrole. «Il semble que la communauté internationale a décidé de mettre fin à cette dilapidation des fonds libyens, et cela va dans le sens des requêtes de l’Est et du Sud», remarque le politologue Ezzeddine Aguil. Mais, cela va-t-il permettre de gouverner en Libye ? That’s the question !

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