Il devient de plus en plus probable que la visite que devrait effectuer Abdelmadjid Tebboune en France aura lieu au cours du premier trimestre 2024.
Ce déplacement présidentiel qui revêtira l’aspect d’une visite d’Etat est présenté par la presse française, sourcée auprès de l’Elysée, comme un événement majeur inscrit dans un agenda officiel, bien que la partie algérienne ne s’est pas encore prononcée sur le sujet.
Reportée deux fois durant l’année 2023 en raison des nouvelles «crispations», toujours impromptues mais cycliques, survenues entre l’Algérie et la France, cette rencontre au sommet est, dit-on dans les milieux politiques, le résultat d’un nouveau rapprochement algéro-français qui promet du bon dans les relations bilatérales.
Du moins, c’est ce que laissent croire certaines indiscrétions françaises sur le désir de Macron de rétablir une passerelle solide, fructueuse et durable avec l’Algérie.
C’est dans cette optique qu’il faut replacer les mouvements diplomatiques et les échanges assez réguliers qui ont eu lieu entre les deux pays, notamment durant ces derniers mois, et qui attestent de ce climat de réchauffement dont il est question.
Une volonté réciproque et partagée de tourner la page des «contentieux» circonstanciels qui ont installé sérieusement, il faut le dire, une grosse embrouille dans les relations allant, côté algérien, jusqu’au rappel de son ambassadeur pendant plusieurs mois.
La décision brutale et unilatérale prise par le gouvernement français de réduire de 50% le nombre de visas aux Algériens a été très mal perçue par Alger, qui a également manifesté une indicible colère dans l’affaire de l’opposante politique Amira Bouraoui qui avait, grâce à la connivence des services français, réussi à quitter le territoire national malgré une ISTN.
Et si on ajoute toute la campagne haineuse développée par l’extrême droite à l’encontre de notre pays, ponctuée par les tentatives de remise en cause de l’accord algéro-français de 1968 sur l’émigration, menées par l’ex-Premier ministre Edouard Philippe en sa qualité de membre de la coalition présidentielle donc proche du président Macron, on saura que les nuages sombres qui ont plané sur les rapports entre les deux pays sont principalement venus de l’Hexagone où les forces extrémistes anti-algériennes ont trouvé un terrain d’expression favorable pour accentuer les divisions.
A l’image du travail de sape effectué par l’ancien ambassadeur français en Algérie, Xavier Driencourt, qui ne rate aucune opportunité de «réconciliation» pour jeter de l’huile sur le feu et semer le doute, en fait pour briser tout élan tendant vers une vraie reprise dans laquelle les intérêts bien compris de chaque pays seront préservés.
C’est donc pour lever les équivoques majeures, aplanir sur des bases saines le terrain des relations bilatérales déjà balisé par une histoire commune, et penser à un avenir qui profitera à nos deux sociétés, politique, commercial, culturel, stratégique et sécuritaire, que le président Tebboune aura comme mission à réaliser lors de cette visite qu’il avait lui-même inscrite dans le contexte d’une visite de travail et non «touristique» avant qu’elle ne soit déprogrammée pour les motifs cités plus haut.
Si ce déplacement du chef de l’Etat n’est pas encore officialisé par les instances algériennes, il est pour la presse française retenu pour acquis, comme l’attestent les nombreux échanges de personnalités entre les deux pays, et particulièrement les séjours effectués par les représentants français à Alger, qui dénotent un tant soit peu l’insistance française et son réel désir à voir les divergences de fond trouver rapidement des solutions par le biais de cette visite à laquelle Macron en personne accorde une grande importance.
Il est souligné dans cette optique la venue d’un nouvel ambassadeur français à Alger, Stephane Romatet, qui dénote la conviction ressentie de l’autre côté de la Méditerranée de renouer les liens sur la base d’une efficacité diplomatique évidente. Le diplomate a d’ailleurs présenté ses lettres de créance quelques jours après son installation et a été, moins d’un mois après, reçu en audience par le président Tebboune auquel il a transmis un message de son homologue français à l’occasion du 69e anniversaire de la Révolution de Novembre 1954.
Il est relevé par ailleurs la rencontre au Quai d’Orsay entre les deux secrétaires généraux des Affaires étrangères, Lounes Magramane côté algérien et Anne-Marie Descotes partie française, tandis que le responsable de la direction Afrique et océan Indien du Quai d’Orsay était en visite dans notre capitale pour les dossiers africains. Cette valse de concertations au plus haut niveau est fortement soulignée par le séjour qu’a effectué le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, début novembre, au cours duquel il a rencontré Abdelmadjid Tebboune et son homologue algérien Brahim Merad.
On ne sait pas si l’invitation de Macron a été confirmée, l’occasion a été propice pour le ministre français de défricher le terrain des discussions en abordant plusieurs dossiers cruciaux pour la remise à niveau des relations bilatérales et sur lesquels se pencheront les deux Présidents.
Pour la France, ce «dégel» est un signe qu’avec l’Algérie il y a de fortes possibilités de travailler sur les dossiers en toute confiance dans l’intérêt réciproque. Selon, les milieux politiques de l’Hexagone, même soumis à une forte pression pour l’infléchir de ses objectifs, Macron tient beaucoup à ce rapprochement avec l’Algérie. Il tient surtout à rétablir la place économique française dans un pays où elle est en perte de vitesse face à la redoutable concurrence de la Chine et de la Turquie, qui y ont investi de manière notable dans plusieurs domaines stratégiques.
Les bonnes intentions de la France sont certes affirmées politiquement, reste le concret sur le terrain, quoique le «retour» de Renault pourrait, entre autres, constituer un point positif, si les investissements français venaient réellement à se réaliser.
Par A. Merad