Rencontre sur le parcours de la moudjahida et femme de lettres : Zoulikha Benzine, une battante «au tempérament rassembleur»

16/09/2024 mis à jour: 12:20
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Le parcours de Zoulikha Benzine doit être connu de tous. Partout dans le vaste pays. Le collectif Les Journées littéraires d’Oran (JoLi Or), en partenariat avec l’espace Histoire et Mémoire de la ville d’Oran, s’attelle à la tâche. 

Il accueillera, jeudi 19 septembre (16h30) à l’espace Histoire et Mémoire de la ville d’Oran, l’historienne Malika El Korso qui présentera Lettres à Zoulikha, édité par l’association Les Amis de Abdelhamid Benzine. 

La rencontre et vente-dédicace sera modérée par Mansour Kedidir, auteur et chercheur au Centre de recherche en anthropologie sociale et culturelle (Crasc), a annoncé un communiqué du collectif. 


La moudjahida et femme de lettres Zoulikha Benzine, épouse Inal et sœur de Abdelhamid Benzine, est décédée en 2012 à l’âge de 71 ans. Le recueil de ses lettres est publié une décennie après sa disparition. 
Aux manettes de ce travail exceptionnel : Souâd Inal, la fille de la moudjahida. 


Dans sa préface, elle nous donne un aperçu du parcours de sa mère : «Zoulikha Benzine, née quatre ans avant la bombe atomique qui dévasta Hiroshima, a très tôt été imprégnée du sentiment national grâce à ses deux aînés Hamoud et Abderrahmane, et ce qu’elle entendait dire du combat de l’aîné Hamid –qu’elle ne connaîtra réellement qu’à l’indépendance.» Native d’El Kseur (Béjaïa), où son père exerçait le métier d’oukil judiciaire, Zoulikha fréquente l’école coranique et l’école primaire française de Aïn El Arous. S’engageant très jeune dans la zone ouest d’Alger, elle connaîtra les affres de la prison (Serkadji). 


«Lourde tâche»

L’historienne Malika El Korso a proposé aux lecteurs du recueil une étude historique des 175 lettres qui lui étaient soumises. Dans le préambule, elle parle d’une «lourde tâche» d’autant qu’elle n’a pas connu d’«assez près» la militante, une «femme discrète» qu’elle a rencontrée à l’occasion d’un colloque de l’association Les Amis de Abdelhamid Benzine. 
L’auteure évoque la valeur archivistique et historique d’un corpus regroupant des lettres envoyées à différentes périodes (1955 et du 16 octobre 1957 à avril 1962). 

«Nous n’arrivons pas à trouver un angle d’attaque qui soit à la fois pertinent et historique. En tournant et retrouvant la question dans tous les sens, en compulsant plusieurs fois les lettres, en les lisant une énième fois et en les mettant de côté autant de fois à force d’approches non abouties, nous finîmes par trouver la clef du problème. Cette clef s’appelle Zoulikha. Elle est au centre pratiquement de toutes les correspondances, même si ses écrits à elle se comptent sur les doigts d’une seule main», relève l’historienne. 


Pour cette dernière, les correspondances sont des «documents spécifiques par les liens qu’elles révèlent, leur ton, leur contenu, leur émotion, l’espoir qu’elles véhiculent, les informations sur le vécu individuel et collectif des détenues, sur leur famille, sur le ressenti en prison, dans les camps. La plupart des lettres témoignent d’une telle richesse de sentiments qui en constituent l’essence (…). A la valeur historique variable d’une lettre à une autre, d’un auteur à un autre, s’ajoute la valeur humaine qui s’inscrit en creux à chaque ligne qu’il faudrait mettre un jour en valeur». 


La lecture des lettres permet à l’historienne de brosser un portrait très fidèle de la moudjahida et femme de lettres, très proche de Kateb Yacine et d’Issiakhem : «Zoulikha est attachante, attentionnée, lucide, une battante, d’un tempérament rassembleur (…).» 

En plus du travail très pointilleux de l’historienne, le recueil est fort intéressant par l’étude sur les images de prison menée à Nadira Laggoune-Aklouche, critique d’art. 
 

 

*L’accès est libre à l’espace Histoire et Mémoire de la ville d’Oran. Adresse : boulevard El Amir Aek, à la perpendiculaire du Bd de la Soummam 
 

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