4 millions d’Ukrainiens avaient afflué vers différents pays d’Europe en trois mois, l’année dernière. Les gouvernements européens avaient trouvé des solutions urgentes pour gérer ce flux. Sans inquiétude, ni paranoïa.
Pourquoi donc cet alarmisme, cette diabolisation, aspergés de discours haineux quand il s’agit d’arrivées massives, fussent-elles, de migrants subsahariens et d’Afrique du Nord sur les côtes nord de la Méditerranée ?
C’est une des multiples questions que l’on s’est posées pendant deux jours à Rome, en présence d’une vingtaine de journalistes d’Afrique de l’Ouest, du Maghreb et d’Europe et d’une représentante du gouvernement italien, d’organisations et d’experts dans le domaine de la mobilité humaine. Tout est dans le récit, le traitement médiatique du phénomène, parce que c’en est un. D’où le thème central de cette rencontre «Améliorer la narrative de la migration».
D’emblée, les différents intervenants rappellent la nature de la «question migration» : c’est une question éminemment politique, «compliquée» par des non-dits. «C’est un instrument, un levier aux mains des politiques qu’ils utilisent à des fins politiciennes, notamment l’extrême droite.» Sinon, pourquoi les gouvernements occidentaux ont su géré un flux de 4 millions d’Ukrainiens en trois mois, l’année dernière, sans panique, ni angoisse ?
«Ces gouvernements sont alarmistes et leurs médias, pour faire diversion, par xénophobie ou tout autre raison, amplifient leurs récits, leurs histoires, quand ils sont appelés à parler de migrants non européens.» Conséquences, même le grand public est entraîné dans cet environnement de peur, de panique et d’inquiétude. «Cela implique un effet toxique sur le public.»
Seuls 10 à 15% de migrants dans le monde sont en situation irrégulière
«Il n’y a pas péril en la demeure, on est loin de l’invasion des Subsahariens et d’Africains du Nord, au contraire, l’Europe aura besoin d’Africains dans les années à venir», rassurent les intervenants, malgré la manipulation des chiffres, les récits mensongers et l’amplification du discours droitiste des médias et des politiques occidentaux.
Il faut savoir que dans le monde, sur 281 millions de migrants (qui apportent beaucoup aux pays d’accueil), dont 47% de femmes, seuls 10 à 15% sont en situation irrégulière. 169 millions de migrants dans le monde travaillent.
On n’en parle pas. «On ne parle qu’en mal de cette minorité qui, si elle bénéficiait de droits de régularisation et d’intégration, offrirait ses compétences et ses bras aux pays d’accueil.» Pour l’Afrique, «80% de Subsahariens se déplacent dans leur continent. 20% seulement vont en Europe».
Les chiffres ne mentent pas, malheureusement, ils peuvent être manipulés par les esprits malsains. Justement, pour dédramatiser la situation de la migration et balayer l’esprit alarmiste et mensonger des uns et des autres, il faut un nouveau plaidoyer pour une nouvelle politique migratoire.
Et pour ce faire, il est important de changer, d’améliorer le récit des médias, avoir la juste vision de la migration, déconstruire les activités de la désinformation, sortir des clichés, être créatif, former la mentalité du grand public, accorder de l’importance aux mots !
«L’Europe aura besoin des Africains dans les années à venir, c’est cela la vérité !» s’accordent à dire les experts, invités par l’agence onusienne l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) de Rome.