Dominique de Villepin dénonce une tentation de faire de l’Algérie le bouc émissaire d’un certain nombre de problèmes français.
L’ancien Premier ministre français, Dominique de Villepin, réagit aux violentes attaques contre l’Algérie conduites par des acteurs de la droite et de l’extrême droite en France et reprises à leur compte par des membres du gouvernement français. Intervenant, hier, sur le plateau de Franceinfo, ce poids lourd de la politique français énumère tous les points de discorde à l’origine de la tension actuelle entre l’Algérie et la France, en apportant une réponse nécessaire dans laquelle il renvoie les meneurs de ces attaques à la réalité. «Cela fait, malheureusement, de longs mois pour ne pas dire des années, que l’on voit la relation avec ce grand pays ami et frère qu’est l’Algérie se dégrader jour après jour. Et de dégradation en dégradation, on en vient à des accusations qui, évidemment, dépassent, et de loin, toute réalité», déplore-t-il.
De Villepin dénonce, dans la foulée, une tentation de faire de l’Algérie le bouc émissaire d’un certain nombre de problèmes français. «La tentation aujourd’hui, ici en France, c’est de faire de l’Algérie le bouc émissaire d’un certain nombre de problèmes. Et c’est particulièrement vrai en matière d’immigration. L’Algérie n’a pas à porter cela et nous avons à trouver avec les Algériens des réponses et des solutions», précise-t-il.
Et ces solutions, selon lui, ne passent pas par le faux débat autour de l’Accord de 1968, remis au-devant de la scène par le nouveau Premier ministre français, Michel Barnier, et son ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau. «Vouloir brandir aujourd’hui le symbole de l’Accord de 1968, dont nous savons tous qu’il est une des conséquences des Accords d’Evian, c’est vouloir ouvrir une guerre avec l’Algérie ? Une guerre des mémoires ? Tout cela est absurde, il y a d’autres chemins», assène-t-il.
L’ancien Premier ministre français précisera qu’«aujourd’hui, nous ne réglerons la question de l’immigration des Algériens détenus dans des centres de rétention administrative et que nous voulons renvoyer chez eux qu’en accord avec l’Algérie». Selon lui, «cela implique le dialogue, ça implique le respect et ça implique la capacité d’assumer cette histoire qui est partagée et qui est si importante des deux côtés de la Méditerranée».
A propos du contentieux mémoriel entre Alger et Paris, Dominique de Villepin souligne : «Qu’il y ait, en regardant en arrière – et ce travail est fait par de nombreux historiens –, des crimes de guerre, voire même des crimes contre l’humanité, c’est une chose.»
Sur la reconnaissance par Emmanuel Macron de la «souveraineté du Maroc sur le territoire sahraoui» et «son soutien au plan d’autonomie marocain», l’invité de Franceinfo critique la démarche. «Le président de la République (Emmanuel Macron, ndlr) a voulu renouer avec le Maroc en acquiesçant sur la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental. Nous aurions dû faire tout cela dans le cadre des Nations unies et en liaison avec l’Algérie. On ne peut pas aujourd’hui faire avancer un règlement diplomatique de quelque question que ce soit sans le faire avec tous», souligne-t-il.
Pour rappel, le président Abdelmadjid Tebboune, lors de son entrevue avec des journalistes diffusée samedi par la Télévision nationale, a qualifié la demande de révision de l’Accord de 1968 «d’étendard derrière lequel marche l’armée des extrémistes en France». Il avait également évoqué les effets de l’invasion française en 1830 sur les Algériens, appelant, à cet effet, à la reconnaissance des crimes coloniaux.