Règlement de la crise libyenne : Accord entre El Menfi, Haftar et Salah pour une solution entre Libyens

21/08/2023 mis à jour: 01:17
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De gauche à droite, Mohamed Younes El Menfi, Khalifa Haftar et Salah Aguila - Photo : Montage El Watan

Les belligérants libyens sont enfin d’accord, suite à la réunion à Benghazi pour décider seuls du sort de leur pays. L’envoyé de l’ONU a été remercié pour ses efforts, mais prié de limiter son rôle au renforcement des consensus interlibyens. Interrogations sur la réaction de Debeiba, écarté jusque-là du processus menant aux élections.

La visite, avant-hier 19 août, à Benghazi, de Mohamed Younes El Menfi, président du Conseil présidentiel, et sa rencontre avec Khalifa Haftar, l’homme fort de l’Est libyen, et Salah Aguila, le président de la Chambre des représentants (Parlement), constitue un tournant dans la relation entre les belligérants libyens.

El Menfi n’a pas rencontré Haftar depuis sa première visite à Benghazi suite à sa nomination à Genève à la tête du Conseil présidentiel en février 2021.

Le président du Conseil présidentiel a certes joué, à plusieurs reprises, le médiateur entre le Parlement et le Conseil supérieur de l’Etat. Mais, c’est la première fois qu'il fait le déplacement à Benghazi, rencontre les leaders de l’Est et affirme son adhésion à une issue libyo-libyenne au processus menant aux élections.

La déclaration finale de la réunion rejette toute participation à une quelconque commission spéciale, en dehors du cadre national interne. La réunion d’avant-hier a certes remercié Abdoulaye Bathily, l’envoyé spécial de l’ONU, pour ses efforts.

Mais le communiqué final est une sorte de mise en garde, à peine voilée, à l’ONU concernant son rôle en Libye. El Menfi, Aguila et Haftar ont explicitement insisté dans le communiqué publié suite à leur réunion, qu’ils «ne participent à aucune réunion ou commission en dehors du cadre national interne».

Ils ont appelé Bathily à «ne prendre aucune mesure individuelle en rapport avec le processus politique». Pareils propos rejoignent la position du président du Parlement Aguila Salah, qui avait souligné la semaine dernière dans une Interview sur RussiaToday que Bathily ne gouverne pas la Libye pour pouvoir changer ou nommer.

«Il est là pour veiller à l’exécution de l’accord politique (celui de Sekhirat décembre 2015) qui dit que le Parlement et le Conseil de l’Etat veillent à la formation du gouvernement», avait-il martelé. Mohamed Younes El Menfi est venu à Benghazi pour assurer son adhésion à une issue libyo-libyenne à ce différend qui a trop duré et exaspéré la population.

El Menfi a rapporté tout ce qui concerne ses entretiens à Benghazi au chef du gouvernement, Abdelhamid Debeiba, au président du Conseil supérieur de l’Etat, Mohamed Takala, et à l’envoyé de l’ONU, Abdoulaye Bathily.

Réactions variées

Abdoulaye Bathily a prudemment réagi sur son compte Twitter suite à un entretien téléphonique avec El Menfi. L’envoyé spécial de l’ONU a salué l’association par le Conseil présidentiel de la délégation de l’ONU au processus de réconciliation interlibyenne. Bathily a réaffirmé son engagement à renforcer les efforts des Libyens pour faciliter la voie d’élections générales et pacifiques.

Bathily et les pays occidentaux ont déjà exprimé la semaine dernière leurs réserves par rapport à la feuille de route des élections, préparée par la commission 6+6, associant le Parlement et le Conseil supérieur de l’Etat.

Les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, la France, l’Allemagne et l’Italie avaient publié, la semaine dernière, un communiqué émettant des réserves sur cette feuille de route.

Les réserves portent surtout sur le point concernant la mise en place d’un gouvernement qui sera chargé d’organiser des élections, même si cela n’est pas explicitement dit. En pratique, Bathily et les Occidentaux pensent que le gouvernement Debeiba devrait être associé aux préparatifs des élections.

Toutefois, le Parlement et le Conseil supérieur de l’Etat considèrent que ce gouvernement a obtenu leur confiance et qu’ils peuvent la retirer à tout moment, puisqu’il s’agit d’un organisme dépendant d’eux. Au niveau international, le ministère égyptien des Affaires étrangères a été le premier à publier un communiqué saluant les résultats de la rencontre de Benghazi.

L’Egypte a réitéré la position exprimée le 9 août, soutenant les institutions libyennes et l’attachement à une solution libyo-libyenne suite aux communiqués de Bathily et des pays occidentaux après les échanges entre le Parlement et le Conseil supérieur de l’Etat sur la question des élections. La position égyptienne a été confortée par la récente venue d’El Menfi à Benghazi et sa disposition à coordonner entre les institutions libyennes.

Par ailleurs, l’éventuel éloignement du gouvernement Debeiba du processus coïncide avec l’affaiblissement de sa position suite aux derniers affrontements sanglants des 14/15 août, traduisant son incapacité à contrôler les milices à Tripoli. 55 décès et 146 blessés ont été enregistrés lors de ces accrochages.

Ces affrontements ne sont pas fortuits, puisque la rivalité entre milices couve depuis un temps déjà. Laquelle tension a fait attirer l’attention de tous les observateurs sur le renforcement du rôle des milices à Tripoli et leur influence dans la sphère politique.

«Un facteur à prendre avec toute l’importance requise», souligne le juge libyen Jamel Bennour, pour qui «ce qui compte ce n’est pas uniquement la tenue des élections mais, surtout, la reconnaissance de l’autorité des élus. Sinon, nous ne sortirons pas de la crise». 

 

 

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