Réda Bendris (natif de Sétif, âgé de 46 ans et père de 3 enfants) est un pur produit de l’école de football sétifienne. Il a commencé sa carrière de joueur chez l’ESS en 1988 pour s’arrêter fatalement en 2004, suite à une vilaine et persistante blessure qui l’a éloigné des terrains.
Il a été sélectionné plusieurs fois chez les Verts en jeunes et capé en seniors sous Abdelghani Djadaoui (2001). Celui qu’on appelait des années durant à l’ESS «le libéro de charme» et en décidant d’embrasser le noble métier d’entraîneur, Réda Bendris n’a pas changé ses traits de caractère qui faisaient sa force de joueur : analyste, attentif, sobre et calme. Fort de caractère, l’homme n’est pas du genre à abandonner sa mission ou son engagement au premier malentendu ou revers. Connu également comme joueur pour avoir de tout temps su calculer les trajectoires du ballon, il a admirablement réussi le transfert pédagogique en bien calculant l’itinéraire gagnant pour son équipe en lui faisant gagner du galon. La preuve : l’US Souf, avec 10 points d’avance et à deux journées de la fin de l’exercice, est arrivée au palier de l’élite avec l’art, la manière et beaucoup de mérite.
Interview réalisée par Salim Oussaci
- D’abord félicitations pour le remarquable parcours réalisé avec votre club, l’US Souf, couronné par une accession historique en Ligue 1 de football professionnel...
Le remarquable parcours réalisé par mon club n’est pas le fruit d’une seule personne fut-elle ma modeste personne. Je me dois de rendre hommage à tous ceux qui ont eu une part dans cette réussite sportive que je souhaite la plus longue possible pour cette sympathique équipe, cette ville et, mieux, cette région porteuse et prometteuse de notre grand pays.
- Pouvez-vous aujourd’hui nous retracer vos conditions de travail du début, les moments forts, de faiblesse et de doute ?
Je ne vous cache pas que notre mission était très ardue au départ pour avoir renouvelé l’effectif à 90% et qu’il fallait axer notre travail sur la cohésion du groupe. Ensuite, il y a eu la difficulté du climat suffocant de notre ville de Souf au début de la préparation au mois d’août avec de nouveaux joueurs qui devaient d’abord s’y habituer. Notre début était quand même fort mais au fil des journées, il devenait un peu difficile pour avoir eu à vivre un passage à vide et heureusement que nous l’avions passé au début. Pendant cette période de baisse de régime, expliquée par un manque de moyens financiers laquelle situation a connu le départ de plusieurs de nos joueurs qui avaient décidé de nous quitter par manque de patience.
Cette période-là était cruciale pour la suite du parcours. Nous avions passé une période de doute ayant cumulé deux défaites, deux nuls et une élimination de l’épreuve populaire. Tout cela pour n’avoir pas perçu quelques mois de salaires. J’avais insisté en tirant la sonnette d’alarme pour faire bouger les choses positivement car sentant que le coup était jouable avec un minimum de moyens mais avec l’engagement de tout le monde pour y arriver. J’avais même annoncé ma démission sur les ondes de la radio nationale pour ne pas cautionner la perte d’une accession qui nous tendait ses bras. Après j’avais senti une réelle prise de conscience collective surtout de la part de l’environnement immédiat du club (dirigeants, joueurs, même ceux ayant quitté le club, et supporters). Je ne pouvais pas rester insensible à cette sollicitation collective. Après avoir réglé certains problèmes d’ordre organisationnel, nous nous sommes encore une fois fait le serment de tout faire pour ne rien regretter et aboutir à l’objectif d’accéder.
- Passée cette période de doute, à quelle partie du championnat avez-vous réellement senti que l’accession était jouable ?
Très sincèrement, c’était après avoir affronté les clubs qui étaient annoncés au départ du championnat comme favoris à l’accession et vu nos résultats probants face à eux, que nous avions compris que le coup était jouable et qu’il était dans nos cordes de jouer crânement nos chances d’accéder. A la fin de la phase aller, nous avions changé notre objectif initial de jouer le maintien et décidé d’opérer un recrutement ciblé de trois joueurs de qualité pour asseoir et conforter notre dispositif défensif et booster notre force de frappe offensive. Les joueurs recrutés ont donné entière satisfaction. Sachez encore que l’engagement du président, Youcef Sakhri, à régler de sa poche certains engagements financiers et mon retour au club ont eu un changement radical avec effet positif sur la marche triomphale (18 matchs sans défaite) vers l’accession.
- Avez-vous eu des problèmes de blessures de joueurs ou de suspensions ayant eu des répercussions négatives sur votre objectif revu à la hausse après la phase aller ?
Dieu merci, nous n’avions pas eu de graves blessures, ni de suspensions relativement longues (2 cartons rouges durant toute la saison) de nos joueurs. Je ne peux que me réjouir de vous dire que lors de notre dernier entraînement, nous avions eu 27 joueurs sous la main. Cela est une preuve que notre travail était étudié et méthodique répondant aux exigences scientifiques modernes et que nous avions choisi des compétiteurs disciplinés. Il faut également saluer le degré de conscience et le professionnalisme de nos joueurs qui n’ont à aucun moment triché. Le résultat est là réellement.
- Avec du recul, ne pensez-vous pas que votre élimination de l’épreuve populaire a été finalement salutaire pour vous ?
Tout à fait. Même si cette élimination, fut-elle amère, était motivée par l’absence de plusieurs joueurs titulaires qui étaient en rupture avec l’équipe. Notre élimination a été le facteur déclencheur décisif afin de tout mettre en œuvre pour foncer droit sur une accession et de ne plus avoir de souci de disperser la concentration collective du groupe et des matchs en retard engendrant des cumuls harassants et éreintants.
- Juste après votre dernier match officialisant votre historique accession parmi le gotha de l’élite footballistique professionnelle, le président de la République a adressé un message de félicitations à toute l’équipe, ses dirigeants et à travers vous à toute région de Oued Souf. Un commentaire ?
Nous avons reçu avec beaucoup d’honneur, de joie et de plaisir le message d’encouragement de Monsieur le président de la République. Cela dénote également que notre Président suit avec attention la jeunesse et ce qu’elle pratique comme activité sportive particulièrement pour les clubs de l’Algérie profonde. Cela nous encourage à améliorer le rendement individuel et collectif pour réaliser de nombreux objectifs sportifs.
- Êtes -vous satisfait de l’engagement pris avec le club de l’USS et du devoir accompli ?
Il nous reste encore deux autres journées de championnat à accomplir pour finir la saison qui fut longue et difficile. Tout modestement, je pense avoir tout donné pour ce club et pour cette ville pour vivre des moments de joie et de liesse. Je ne regrette pas d’avoir accepté de travailler à Oued Souf pour la bonté de ses habitants qui nous ont adoptés dès notre arrivée dans cette sympathique ville et sa région.
- Comment voyez-vous l’avenir de l’équipe, que vous avez dirigée une saison durant, dans le palier supérieur ?
Laissons d’abord les joueurs savourer leur accession méritée au palier professionnel après d’énormes efforts consentis. C’est aux dirigeants de se pencher et de se projeter dès la fin de l’exercice actuel à chercher des sources de financement consistants et durables et de recruter des joueurs aux postes qui souffrent de carence en réfléchissant aux moyens de récupération adéquats pour le niveau professionnel. Le bilan technique de l’équipe est éloquent. Sur 28 matchs joués, nous avons réalisé 17 victoires, 9 nuls et 2 défaites. Notre ligne offensive a marqué 42 buts et en a encaissé 18. Il faut du renfort pour jouer à l’aise au palier supérieur.
- Votre message à votre entourage ayant accompagné votre marche victorieuse vers le professionnalisme..
D’abord, je suis très heureux d’avoir contribué à offrir ces moments de joie populaire intenses aux habitants de la ville de Souf et à nos fidèles supporters. Je réitère ma reconnaissance et mes remerciements au président du club, Youcef Sakhri, qui a mis à maintes reprises la main à la poche puisant de l’argent propre de sa famille pour venir en aide au club dans les moments difficiles.
Ensuite, aux acteurs sur le terrain qui n’ont jamais rechigné à l’effort, ni baissé les bras et pieds sur les différents terrains alors qu’ils n’ont pas été régularisés depuis 8 mois. Evidemment, mon staff technique et mon cher collègue assistant, l’entraineur des gardiens, Sofiane Mechhoug, qui fut pour moi durant tout notre parcours le conseiller, le confident et le régulateur du groupe.
Aux différents staffs : administratif, médical, logistique qui ont réalisé un beau travail collectif. A tout ce beau monde, je dédie ce titre de champion et notre accession au palier professionnel pour la saison prochaine. Un grand merci également à votre quotidien El Watan qui m’a encouragé personnellement en me permettant d’exprimer mes sentiments envers tout le monde en cette opportunité historique.