Quinze jours après les incendies de juillet, qui ont ravagé les forêts du littoral de Toudja et de Béni Ksila, sur la côte ouest de Béjaïa, l’activité touristique reprend timidement…mais sûrement. Les quelques propriétaires de restaurants et de supérettes épargnés par les flammes ont rouvert leurs enseignes, malgré que leur esprit soit toujours marqué par cet horrible épisode.
Pour les autres, l’heure est à la réparation des dégâts causés par le sinistre. Le long des 30 km séparant Sakket et Béni Ksila, la végétation luxuriante bordant les abords de la RN24 est remplacée par une étendue de terre recouverte de cendre et de toute sorte de bois calcinés. Beaucoup de repères ont disparu. Comme les champs de vigne près du lit de Oued Das, en contrebas de la Route nationale, et des chênes et autres oliviers imposants bordant cet axe. L’odeur du brûlé, encore incrustée, chatouille les narines. Les services de la wilaya, de leur côté, ont engagé un volontariat pour le nettoyage des traces «superficielles» de l’incendie dans cette partie de la région de Béjaïa. «Ces incendies ont causé beaucoup de morts. On ne se remet pas de son anxiété rapidement après une telle catastrophe, mais la vie doit absolument reprendre le dessus», dit Amar, un jeune affairé à retaper son échoppe de fortune, abîmée par le feu et la fumée.
De loin, les plages reprennent petit à petit des couleurs. Quelques familles et des groupes d’amis sont installés sur les rivages pour profiter de la fraîcheur de l’air marin, contemplant la houle d’une mer capricieuse en ce début du mois d’août. «Il y a quelques jours, il n’y avait plus personne sur les plages.
Presque vide, la RN24 n’était empruntée que par les automobilistes résidant dans les environs. Ces jours-ci, l’arrivée des Algérois originaires de la région et surtout des émigrés, qui affectionnent particulièrement cette côte, a changé un peu la donne», explique un riverain, les yeux rivés sur les plaques d’immatriculation des voitures de passage. D’aucuns constatent qu’il y a de plus en plus de véhicules immatriculés à l’étranger, notamment en France, sillonnant les routes de Béjaïa. Ils remplissent également les parkings des grands espaces commerciaux et ceux des résidences et villages touristiques de la côte ouest.
( La plage de OUED-DAAS )
Les émigrés sauvent la saison
Pour notre riverain, «c’est une aubaine pour nos commerçants. La venue de nos émigrés redynamisera le commerce, ne serait-ce le temps d’une saison estivale. Ils dépensent sans compter pendant leur séjour en famille. Et comme les temps sont également durs en Europe, je connais parmi eux des émigrés qui achètent et emportent en rentrant des vêtements, des petits appareils électroménagers et des objets de souvenir, faisant profiter également les petits artisans».
A ce propos, on a enregistré dimanche passé l’arrivée sur le quai du port de Béjaïa de 1279 émigrés en provenance de Marseille à bord du car-Ferry Corsica-Linea. Il a aussi embarqué pas moins de 519 véhicules. Selon l’entreprise portuaire de Béjaïa (EPB), un autre bateau, le Jean Nicoli, a amarré jeudi 10 août au port de Béjaïa, en provenance de Marseille avec à son bord, 956 véhicules et 2609 passagers.
Auparavant, au milieu du mois de juillet dernier, le Ferry algérien, Tassili II de la compagnie maritime nationale Algérie Ferries, a accosté au port de Béjaïa avec à bord, 1139 passagers et 285 voitures. Les aoûtiens débarqueront ce 19 août lors de la quatrième rotation, à bord d’un autre bateau, EL Djazaïr II, appartenant à la même société, qui contrairement à sa concurrente, n’est pas dotée davantage de rotation pour assurer le service toute l’année.
Cette saison, la compagnie a programmé seulement 5 rotations, jusqu’au mois de septembre prochain à destination de Béjaïa. D’ailleurs, un employé dans le domaine du tourisme, qualifie cette saison estivale de 2023 «d'assez exceptionnelle».
Ce dernier a expliqué ce déplacement massif des émigrés à au moins deux facteurs : l’un est social et l’autre économique. Bien que la plupart des Algériens établis en France, par exemple, se plaignent toujours de la cherté du billet, que ce soit par avion ou par la voie maritime, «beaucoup d’entre eux ont décidé de renter à tout prix après une longue période d’absence du pays, à cause de la Covid-19 qui les a séparés trop longtemps de leurs familles», dit-il. «Aussi, je pense que ce qui les a également encouragés, c'est l’avantage financier, notamment, sur le prix des billets par bateau qui ont été revus légèrement à la baisse suite à une décision gouvernementale. La compagnie nationale applique pratiquement un prix promotionnel sur toutes ces formules, et ce, sans tenir vraiment compte de la variation des saisons», explique-t-il.
Il faut reconnaître qu’avec un euro fort, échangé au marché noir entre 220,00 et 225,00 DA, faire des acquisitions ou simplement son marché en Algérie devient plus intéressant, estime-il.
Et ce, «sans perdre de vue, dans ce contexte, le problème de l’inflation qui a gagné de nombreux pays européens, dont la France, obligeant nos émigrés à se serrer davantage la ceinture dans l’hexagone», conclut-il.
(Plage Saket)