Le pôle financier de Sidi M’hamed (Alger) s’est saisi de l’enquête sur la gestion de l’opération rénovation des hôtels Mazafran, Sables d’Or, complexe Sidi Fredj et l’hôtel El Marsa, dont les travaux ont coûté à l’Etat près de 800 millions de dinars. 45 personnes, dont les responsables de ces établissements et le président du groupe HTT, ont été placées en détention provisoire.
Sans bruit et loin des regards des médias, le juge de la troisième chambre du pôle financier de Sidi M’hamed, à Alger, a entamé depuis quelques jours l’instruction sur un important dossier lié à l’opération de rénovation de trois hôtels publics, situés sur la côte ouest de la capitale : Le Mazafran à Zéralda, le complexe de Sidi Fredj avec l’hôtel El Marsa et la Résidence Marina, plus connue sous le nom de «H3», à coups de milliards de dinars.
Plus d’une quarantaine de personnes physiques, parmi lesquelles de nombreux cadres du secteur mais aussi de sociétés publiques et privées, ont été inculpées à ce jour. Cette instruction avait été ouverte par le tribunal de Chéraga et concerne les procédures de passation de contrats pour la réhabilitation de ces établissements engagées par les autorités publiques depuis 2011, soit plus de dix ans. Des retards qui ont induit de lourdes incidences financières.
Deux expertises ont été ordonnées par la justice pour situer les responsabilités des uns et des autres dans cette affaire, à commencer par l’étude infructueuse réalisée par le premier bureau étranger auquel elle a été confiée. Trois autres bureaux ont été sollicités, dont deux publics (Berg et Berg) et un privé (algéro-turc), avant que l’étude ne soit définitivement achevée, ce qui a suscité d’importants changements et des retards dans la réalisation des projets, aggravés par la pandémie liée à la Covid-19.
Initialement chargé de cette affaire, le magistrat instructeur près le tribunal de Chéraga avait auditionné et inculpé 45 personnes : des cadres dirigeants qui se sont succédé à la tête des établissements hôteliers concernés, mais aussi les responsables des sociétés de réalisation et des bureaux d’études.
Les mis en cause ont tous été placés sous contrôle judiciaire, avant que la chambre d’accusation près la cour de Tipasa ne décide de suivre la demande du parquet de les mettre sous mandat de dépôt. Au mois de mars dernier, le juge d’instruction s’est désisté du dossier au profit du pôle financier et économique de Sidi M’hamed, à Alger, territorialement compétent.
Il y a quelques semaines, le juge de la 3e chambre près cette juridiction a entamé la poursuite de l’instruction, en convoquant plusieurs prévenus. Selon nos sources, parmi les responsables ayant fait l’objet de mandat de dépôt se trouvent les anciens directeurs généraux du complexe de Sidi Fredj, de La Résidence Marina (H3), des hôtels El Marsa, Mazafran et Sables d’Or, ainsi que le président du groupe public HTT (Hôtelier, Tourisme et Thermalisme).
Il est à rappeler qu’en 2011, pour la rénovation et le réaménagement de l’EGT de Sidi Fredj, le Conseil des participations de l’Etat (CPE) a alloué une enveloppe financière de près de 600 millions de dinars. En 2014, il a bénéficié d’une 2e convention pour un crédit complémentaire destiné à l’hôtel El Marsa de l’EGT de Sidi Fredj, plafonnant ainsi le crédit global à plus de 700 millions de dinars (700 579 000,00 DA).
Pour ce qui est de l’opération de rénovation du complexe Mazafran, qui englobe aussi l’hôtel Sables d’Or, beaucoup d’anomalies ont été relevées par le rapport de la Cour des comptes, daté de juillet 2021, après plus de 5 ans du lancement des travaux. Fermé en 1998 pour des travaux de modernisation, l’hôtel Mazafran est baptisé Essafir après sa privatisation au profit du groupe éponyme koweïtien. Il reprend son nom, mais sa gestion reste entre les mains du groupe Safir, avant qu’il ne revienne définitivement au portefeuille du groupe public HTT, en juillet 2019.
La rénovation de l’hôtel Sables d’Or a elle aussi suscité des interrogations, notamment en ce qui concerne les lourds retards enregistrés dans l’achèvement des travaux de réalisation mais aussi en matière de consommation budgétaire. A ces anomalies s’ajoutent les dysfonctionnements dans les procédures de choix des entreprises de réalisation et surtout du respect du cahier des charges inhérent. Le magistrat instructeur de la 3e chambre du pôle financier de Sidi M’hamed, à Alger, s'attelle donc à démêler toute cette affaire qui risque de lever le voile sur un grand scandale.