La chambre criminelle près la cour d’Alger a rendu, hier, son verdict relatif au procès des auteurs présumés de l’assassinat de Djamel Bensmaïn. Ainsi 38 accusés ont écopé de la peine de mort, 6 d’une peine de 20 ans de réclusion, un seul d’une peine de 10 ans de prison, alors que 26 autres ont bénéficié de l’acquittement.
Baisser de rideau hier sur le procès des auteurs présumés de l’assassinat de Djamel Bensmaïn, le 11 août 2021, à Larbaa Nath Irathen, à Tizi Ouzou, après deux jours de délibérations, trois jours de débat et trois autres de plaidoiries de la défense des 93 accusés, et de la partie civile. Une tension pesante se fait sentir dès l’entrée des détenus dans la salle d’audience, encadrés par un imposant dispositif policier. Vers 10h30, la présidente entame le prononcé du verdict, sous un silence de marbre.
Elle commence par les décisions d’acquittement qui concernent 26 accusés, à savoir Madjid Guers, Yazid Yaici, Lyes Benane, Ismail Ait Rabah, Rabah Imerzouguen, Ferhat Debiane, Achour Habani, Mohand Mokrani, Riyad Boukhedach, Ahmed Yaici, Abdelaziz Benane, Ahmed Mhalem, Karim Hemad, Mohand Belkessam, Anis Khedraoui, Tahar Yehlali, Amghid Khelili, Mohand Oubelaid Moualek, Mouloud Madasi, Nadir Lounisi, Slimane Abdi, Syphax Maamar Chaouch, Youghorta Belkalem, Rachid Mamo, Ali Bouzria, ils retrouvent tous la liberté. Sans relever la tête une seule fois, elle prononce la peine de 3 ans de prison contre 14 accusés. Il s’agit de Youcef Amrane, Ramdane Belmadani, Athmane Houadi, Amokrane Hamraoui, Rabah Hamadou, Zakaria Meriouli, Bousaad Lakrouf, Nabil Chemaala, Sofiane Zayef, Ouardia, Islam Kidji, Mouloud Dahmani, Nacer Fridi, Abdennour Hamani et Billel Zrimi.
Au fur et à mesure que les peines augmentent, les visages se crispent et le cordon de sécurité se resserre autour des bancs, réservés aux accusés. Ali Benkhlifa est le seul accusé condamné à 10 ans de réclusion, alors que 6 autres écopent d’une condamnation de 20 ans de réclusion criminelle. Il s’agit de Tahar Khoualdi, Loucif Chemini, Hocine Khelili, Amirouche Moali et Syphax Khellili.
Le son strident d’une voix masculine provenant des bancs des accusés brise le silence. C’est celle d’Ali Bouzar, condamné à 10 ans de prison en première instance. Il sanglote, s’agite puis tente de se mettre debout. Les policiers lui demandent de se calmer. Mais en vain. Il hausse le ton mais la présidente poursuit la lecture des décisions.
«Si le verdict ne vous plait pas…»
Elle annonce la condamnation à mort contre 38 accusés : Aghiles Zetri, Chaabane Mostefai, Idir Ouardi, Madjid Benyoub, Ahmed Guers, Gaya Zine, Chaabane Mazari, Said Saadadou, Tayeb Trich, Mohamed Aliane, Lounis Maaloum, Belkacem Hadj Ali, Mokrane Molahcene, Said Ziane, Amrane Haddad, Ferhat Ferhat, Azouaou Hadjaz, Youcef Keddach, Mohand Oubelaid Benamar Moualek, Yacine Nechak, Mohamed Laskri, Ferhat Chellah, Hassane Saayoud, Fouad Hassayane, Faradj Moulahcène, Aziz Yaici, Lyes Dekani, Amar Icher, Nacer Mezadad, Mahrez Saadaoui, Ramdane Medjber, Youba Hakim Hadj Ali, Hassane Hamitouche, Omar Nekkiche, Mohand Ameziane Chaibi, Belaid Hammach, Nabila Merouane et Bouzar Ali. Ce dernier crie de toutes ses forces, suivi par d’autres accusés. Les policiers tentent de contenir la colère des uns et des autres.
La tension monte d’un cran. Le dispositif se renforce. La magistrate regarde en direction des accusés en ébullition. Elle ne se fait plus entendre. Les voix de plus en plus nombreuses résonnent dans la salle. «Si la décision ne vous plait pas, vous avez huit jours pour introduire un pourvoi», dit-elle, avant de se lever brusquement et de quitter la salle. L’audience est suspendue. L’ambiance est très électrique.
Les avocats s’éloignent des bancs des accusés, alors que les policiers arrivent en force. Ils ferment les fenêtres, puis demandent aux journalistes de quitter les lieux, pendant qu’une grande partie des avocats étaient déjà dehors où les familles étaient regroupées face à l’imposante juridiction. Un important cordon de sécurité les entoure et les empêche d’accéder au tribunal. Crises hystériques, sanglots et évanouissements, des scènes poignantes de mamans qui venaient d’apprendre les mauvaises nouvelles de leurs enfants.
Dans la cour du tribunal, c’est le branle-bas de combat. Les policiers courent dans tous les sens. Ils se préparent subitement à évacuer les accusés détenus. Les moteurs des fourgons cellulaires et les 4X4 qui les escortent grondent fortement. En quelques minutes le dispositif se met en branle derrière les premiers fourgons de l’administration pénitentiaire qui sortent du bâtiment.
Les nerfs sont à fleur de peau, la panique se lit sur les visages. Une vingtaine de minutes plus tard, les véhicules et leur escorte étaient déjà loin. L’audience reprend, sans les membres du jury, pour décider de l’action civile. La présidente a condamné les accusés Mouloud Dahmani, Nacer Faridi, Abdennour Hamani, Milad Zerdi, Amrane Haddad et Ferhat Ferhat, à un versement solidaire d’une somme de 3 millions de dinars, à Lyes Fekkar, le propriétaire de la Clio Campus saccagée, à l’entrée de la ville, le jour du crime, comme réparation du préjudice subi.
Elle a également sommé chacun des accusés condamnés à la peine capitale de verser la somme de 200 000 DA au Trésor public, au titre du préjudice subi. Les mêmes accusés doivent par ailleurs payer de manière solidaire un montant de 20 millions de dinars, destiné à la famille du défunt, en réparation du préjudice subi.
L’audience a été levée en fin de matinée. Dehors, les familles sont toujours face au tribunal. Les sanglots et les cris ne laissent personne insensibles, aussi bien parmi les policiers que parmi les passants et les avocats.
Certains leur ramènent de l’eau, d’autres tentent de les réconforter, mais en vain. Elles ne sont certainement pas prêtes à oublier cette journée et les autres passées depuis le début du procès, sous un soleil de plomb à attendre des nouvelles qui les rassurent. Pour beaucoup, la sentence a été ressentie comme un coup de massue sur la tête, pour d’autres, la joie de retrouver leurs enfants acquittés est immense. Elles ont vite quitté les lieux pour rejoindre la prison d’El Harrach, pour accueillir les leurs.