L’unité de laminage à chaud (LAC) et celle de revêtement par achèvement (RPA) de Sider El Hadjar ont enregistré en septembre une importante perte, estimée à plusieurs milliards. En effet, plus de 513 tonnes d’acier, transformées en bobines galvanisées, le plus cher produit sidérurgique du complexe, ont été classées rebut, c'est-à-dire un déchet ferreux (ferraille).
En cause, affirment plusieurs sidérurgistes, «le four du RPA, dans lequel s’effectue l’opération de galvanisation à chaud par immersion dans un bain de zinc en fusion à une température de 450°C, contenait de l’eau». Pire, importé en forte devise, le zinc perdu dans cette opération est de l’ordre de 165 unités, alors que, en juin 2023, le prix du zinc s'établissait à 2271 dollars la tonne, selon la directrice générale des mines au ministère de l’Energie et des Mines, Nadjiba Bourenane.
Qui a donné l’ordre de lancer cette «opération pilote» de production de bobines galvanisées, sachant que le four de l’unité RPA est inexploitable et nécessite désormais une longue opération de réfection ?
Une opération pilote produit-elle 60 bobines galvanisées, non seulement non conformes, mais classées rebut ? Qui assume cette importante perte au moment où le complexe se bat pour reprendre du poil face à une rude concurrence ? Des questions et plusieurs autres cherchent des réponses que seuls les résultats d’une enquête peuvent situer les responsabilités.
Parallèlement, l'étude des grands dossiers de la gestion antérieure de l’entreprise Sider El Hadjar se poursuit. Les limogeages aussi. En moins d’un mois, deux directeurs, l’un des approvisionnements de l’entreprise Sider El Hadjar, l’autre est celui des finances et de la comptabilité (DFC), ont été démis de leurs fonctions. Plusieurs autres cadres sont régulièrement convoqués par le pôle pénal financier et économique de Sidi M'hamed (Alger).
Ils sont cités, chacun en ce qui le concerne, dans le cadre d’une vaste opération judiciaire, dont l’objectif est d’assainir l’environnement, récupérer l’argent sale issu de la corruption des prestataires, avant le lancement d’un imposant programme de réhabilitation au grand bonheur de plus de 5500 travailleurs. Pour preuves, Sider El Hadjar va récupérer tous les équipements du complexe sidérurgique ETRHB Haddad de Berrahal (Annaba), à l’arrêt depuis 2019.
Cette décision a été prise suite au transfert de propriété de cette usine géante vers le portefeuille de l’Etat algérien, après l’incarcération de son ancien propriétaire, Ali Haddad. «Les équipements en question, dont un laminoir et une installation DRI, un ensemble de procédés d'obtention du minerai de fer préréduit avaient été fournis par le groupe italien Danieli.
Récupérés par les domaines publics en avril 2023, ils représentent les trois quarts des équipements livrés par le partenaire italien Danieli, dont la valeur est estimée à quelque 80 millions de dollars. La majorité des équipements fournis par l’italien est toujours exposée aux quatre vents dans les ports de Skikda et de Annaba», affirment des sources proches de cette affaire.
En avril 2023, l’Etat algérien a récupéré totalement le projet du groupe ETRHB de Ali Haddad dans la wilaya de Annaba. «Tous les équipements et le site de 134,33 ha représentant la superficie devant accueillir à Berrahal (Annaba) le projet d’un complexe sidérurgique algéro-italien, entre l’algérien ETRHB et l’italien Danieli, dont l’accord avait été signé en 2017, sont depuis cette date dans le giron de l’Etat.
Toutes les entraves juridiques, administratives et financières ont été levées, donnant lieu à une propriété totale aux domaines publics. Initialement agricole, toute la superficie a intégré le PDAU avant d’être déclassée et les fellahs indemnisés», confirment des sources proches de la direction générale des domaines publics.
En avril 2021, l’ancien ministre de l’Industrie, Mohamed Bacha, avait déclaré lors de sa visite à la zone industrielle (ZI) de Berrahal extension de Annaba : «Le site devant abriter le complexe sidérurgique de ETRHB Haddad en partenariat avec l’italien Danieli et son financement doivent profiter aux Algériens et c’est à l’Etat de trouver la meilleure formule pour sa relance.» Et c’est Sider El Hadjar qui va profiter de cette aubaine, venue à temps pour redorer le blason terni de la sidérurgie locale.