L’Algérie figurerait parmi les dix plus beaux pays du monde, selon des magazines spécialisés dans les destinations touristiques. Un célèbre écrivain-journaliste, Henry Wismayer, raconte récemment dans un reportage publié par le Washington Post, qu’il a été émerveillé par ce pays aux mille facettes.
C’est très flatteur et cela galvanise la fibre patriotique. Le pays continent, le plus grand d’Afrique, du monde arabe et du bassin méditerranéen, qui s’étend des doux rivages de la Méditerranée du sud au cœur du Sahara, est en effet une mosaïque de domaines biogéographiques aussi divers que variés.
On s’en rend compte en traversant du nord au sud et d’est en ouest les plaines côtières et intérieures, les monts boisés des deux Atlas séparés par les immenses dépressions où scintillent dans les sebkhas l’eau en hiver et le sel en été. Et puis le désert parsemé d’oasis miraculeuses, de mers de sable et de citadelles rocheuses habitées depuis l’aube de l’humanité sans avoir encore livré tous leurs secrets.
Lorsqu’on parle des atouts touristiques de l’Algérie, on énumère le plus souvent les sites culturels, La Casbah d’Alger, Tipasa, Djemila, Timgad, Ghardaïa, la Kalaâ des Béni Hammad, les anciennes mosquées et basiliques, les ponts suspendus de Constantine, Tlemcen, Béjaïa… Mais généralement ce sont les paysages dont il s’agit lorsqu’on parle de la beauté du pays.
Vue du ciel comme l’a fait le cinéaste écologiste Yann Arthus-Bertrand, l’Algérie est un pays «époustouflant». Il est surprenant, impressionnant, remarquable, admirable lorsqu’on le découvre sans préjugés, affirment des professionnels internationaux du voyage qui ne tarissent pas d’éloges sur la splendeur de l’Algérie.
Il se trouve toutefois que si les pouvoirs publics tentent, comme il est prétendu, de sauvegarder autant que possible les sites culturels classés de réputation mondiale, il n’en est pas de même pour les fabuleux paysages qui séduisent autant et seraient l’attractivité pour ces millions de touristes visés par les plans de relance de ce secteur. Autant, sinon plus, que les prestigieux sites du patrimoine culturel, les sites naturels de grande valeur esthétique doivent rapidement être placés sous protection rapprochée.
La côte algérienne, dont certains segments qualifiés de sublimes par des spécialistes de la nature en Méditerranée, sont les derniers témoins du rivage originel de cette mer. La «loi littoral» de février 2002, vieille de 20 ans, n’a pas réussi à les mettre à l’abri, même dans les aires protégées côtières.
L’extension linéaire des villes, l’urbanisation du rivage, la surfréquentation des espaces littoraux, les activités estivales dans les secteurs restés sauvages ruinent et hypothèquent les atouts sur lesquels se fonde cette énième relance du tourisme. Il faut même craindre leur intensification avec l’empressement qui accompagne généralement ces politiques épisodiques.
Ailleurs, dans les forêts, autour des plans d’eau, dans les sites et monuments naturels, fréquentés précisément pour leur attrait, la dégradation vient aussi d’aménagements, de défrichements, de constructions dites temporaires mais qui durent.
Ces éléments visuels qui se placent dans le paysage anéantissent des vues panoramiques de très grande qualité. Des paysages à couper le souffle sont ainsi défigurés par une route, une ligne électrique, une construction ou un terrain accordé en concession implantés sans attention pour l’esthétique, en travers d’un cliché qui vaut de l’or.