Par Docteur Rédha Younes Bouacida
Professeur d’université en sciences économiques, Algérie.
Il est couramment admis que les start-ups ou entreprises innovantes nouvellement créées, à fort potentiel de croissance, représentent des leviers de la croissance et jouent un rôle important dans le développement économique et social dans un pays.
En effet, elles ont un impact sur la création d’emplois, mais elles contribuent également à l’amélioration du niveau de vie de la société, car elles sont une source d’innovation technologique en offrant de nouvelles alternatives ou solutions aux consommateurs. En somme, les start-ups améliorent la productivité, modernisent la structure de l’économie, contribuent au progrès technique et à la compétitivité des marchés et créent de la richesse.
Issu de la langue anglaise, le mot «startup» signifie «entreprise qui démarre» ou «jeune pousse». Il a été popularisé dans les années 2010. Les activités de ces entreprises innovantes qui s’établissent souvent dans des incubateurs concernent le secteur des nouvelles technologies, du numérique, la Fintech, la Biotech, l’Agritech, la Health tech, etc. Le nombre des start-ups a augmenté notamment à partir des années 1990 avec l’avènement de l’économie de la connaissance et les nouvelles technologies de l’information et la communication.
Le terrain de jeu propre des start-ups est l’innovation disruptive ou de rupture, en expérimentant un nouveau produit ou service, dont la mise sur le marché provoque un bouleversement (ex : le smartphone qui a remplacé le téléphone portable classique depuis 2007).
Mais, la croissance des start-ups engage une forte prise de risque, notamment en matière de financement et les perspectives de marché incertaines, car elles sont à la recherche d’un business modèle rentable (appelé également modèle économique ou modèle d’affaires qui décrit clairement comment on va gagner de l’argent sur le marché) qui engendre la croissance.
En effet, contrairement à une entreprise traditionnelle qui commercialise un produit ou service tout à fait identifié sur un marché (optimisation du business model), l’aspect innovant de l’offre d’une start-up et de son business model rend difficile une adéquation viable avec le marché qui lui assure une croissance. Ainsi, une start-up, avant de devenir une entreprise, expérimente son business model et le teste sur le marché.
Autrement dit, le Product Market fit de la start-up (le moment où un produit ou service trouve avec succès sa cible de clients sur le marché) n’est pas encore pleinement résolu. Mais cela peut mettre des années et n’est pas donné à toutes les start-ups.
C’est la raison pour laquelle, le taux de mortalité de start-ups est particulièrement élevé.
Si la start-up réussit à établir son business model et gagne de nouveaux clients avec son produit ou service innovant, elle n’évolue plus d’une manière itérative. Son Product Market fit est désormais pleinement déterminé, car le produit ou service qu’elle propose aux utilisateurs s’achète, s’utilise et gagne des parts sur le marché. Mais pour se protéger de la concurrence sur le marché, il est nécessaire pour la start-up de faire évoluer son offre.
Dès lors, la start-up va parvenir à accéder à une croissance très rapide sur une période prolongée, car elle va réussir à faire vendre son innovation à une échelle supérieur. Souvent, une start-up se place en situation de devenir une scale-up après avoir bénéficié d’un tour de table de financement pour promouvoir sa croissance et augmenter son chiffre d’affaires.
De la sorte, elle va générer des gains importants ; la start-up passe au statut de la scale-up, un statut qui lui permet d’entrer dans une phase-clé du développement d’une entreprise innovante. Ainsi, depuis quelques années, le terme de «scale-up» est devenu présent dans le langage courant. Le mot «scale», issu de la langue anglaise, signifie «échelle». De ce fait, le statut de scale-up, aussi appelé «jeune pépites tech» désigne le changement d’échelle d’une entreprise, en acquérant la capacité à produire davantage et à réaliser ainsi plus d’économies d’échelle.
Une scale-up est donc une start-up qui est montée en puissance pour accélérer sa croissance de façon brillante. Elle possède désormais une croissance rapide et soutenue, significative, structurée, une validation et une réussite durables de son business model sur le marché, surtout en s’ouvrant à l’international pour accéder à une taille significative et prendre des situations centrales sur les marchés avant les concurrents.
On peut reconnaître la scale-up à travers différents critères : généralement, c’est une entreprise possédant moins de 10 salariés, avec une croissance annuelle supérieure à 20% au cours des trois dernières années, et réalisant un chiffre d’affaires annuel supérieur à un million de dollars.
Ainsi, la start-up passe au statut de la scale-up, car elle se transforme de façon rapide à différents niveaux : du recrutement, du produit ou service qui est devenu bien établi sur le marché et de la solidité de la base de clients, du déploiement de nouveaux partenaires commerciaux, d’un management vigoureux, d’opportunités de marché claires, d’ouverture sur de nouveaux marchés et expansion internationale et de maîtrise des finances pour réussir à affronter de nouveaux challenges. La croissance est ici assez rapide qu’une entreprise classique et demande une levée de fonds financiers conséquents.
Ainsi, après avoir obtenu le statut d’une scale-up, l’entreprise innovante en hyper croissance doit réussir un «elevator pitch» (argumentaire clair, en français) percutant afin de susciter l’attention des investisseurs ou des fonds de capital-risque dans le but d’obtenir un financement important pour soutenir des perspectives stimulantes en matière de développement.
Ensuite, il faut recruter de façon massive et réussir à attirer des personnes expérimentées afin de renforcer son staff et constituer une équipe compétente au sein de l’entreprise. Aussi, parvenir à intégrer rapidement ses nombreux nouveaux collaborateurs et diriger la complexité croissante de son organisation est d’une importance cruciale pour l’expansion de l’entreprise. A ce titre, la pérennisation d’une scale-up se base préalablement sur le niveau du capital humain et la structuration de la direction.
En effet, la gouvernance et le système de pilotage interne doivent évoluer d’une manière profonde sans brider l’innovation afin que le dirigeant puisse affronter la perte de proximité avec ses employés et contrôler avec ses gestionnaires la très forte croissance de l’entreprise (satisfaire des utilisateurs au fur et à mesure qui deviennent nombreux et variés, affronter des concurrents sur de nouveaux marchés, etc.).
Enfin, l’adoption d’une gestion maximale de l’entreprise, le développement d’un modèle économique scalable et la mise en place d’une vision claire et d’une stratégie à long terme sont assez indispensables pour atteindre les objectifs et s’ouvrir à l’international dans le but d’atteindre de nouveaux marchés et booster l’activité de l’entreprise. Ceux-ci vont permettre à la scale-up de satisfaire la demande de ses investisseurs, à savoir une hyper croissance dans la durée et une rentabilité à la hauteur de leurs attentes afin de pouvoir affronter de nouveaux défis.
Le passage d’une scale-up au statut d’une entreprise dites une «licorne» marque une étape déterminante dans la croissance d’une entreprise. Le statut d’une entreprise dites «licorne» représente en règle générale, une jeune entreprise de moins de 10 ans, non cotée en bourse et qui affiche une valorisation de plus d’un milliard de dollars. Elle possède une reconnaissance internationale comme leader dans son secteur d’activité.
Ainsi, en obtenant le statut de scale-up, cette dernière doit alors prouver sa capacité à l’échelle internationale et conserver une croissance exponentielle. Pour ce faire, la scale-up doit développer une stratégie commerciale solide, réaliser de l’innovation constante et une différenciation pour se démarquer de la concurrence, attirer des compétences expérimentées de haut niveau et maintenir une gestion efficace des ressources pour satisfaire des décisions stratégiques.
Lorsque la scale-up réussit à franchir ce cap, elle obtient le statut d’une entreprise licorne. Airbnb, Uber, Aircall, Blablacar, Spotify, Glossier, Zoom, Peloton, Slack pour ne citer qu’eux, sont des entreprises qui ont toutes commencé comme des start-ups, ensuite elles ont évoluées vers le statut de Scale-ups avant de devenir des licornes, des entreprises leaders du marché au niveau mondial.
Et le chemin ne s’arrête pas ici. Grâce à une volonté affichée d’atteindre des objectifs jalonnés dans le temps, une licorne peut passer au statut d’une multinationale, marquant une nouvelle étape dans la croissance et le développement d’une entreprise.
En effet, si une licorne développe son innovation, réussit à lever des fonds financiers conséquents, diversifie ses activités et prouve sa capacité à pérenniser son modèle économique et une compétitivité durable sur les marchés internationaux, elle devient une multinationale. Les Gafam américains (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) ou les BATX chinois (Baidu, Alibaba, Tencent, Xiaomi), les Big Techs, étaient tous, dans un passé récent, des start-ups avant de devenir aujourd’hui ds puissantes multinationales et maître du monde.
R. Y. B.
NB : Google, aujourd’hui Alphabet. Facebook, aujourd’hui Meta.