Beaucoup d’efforts et de moyens sont déployés par l’État algérien pour l’émergence du secteur de l’agriculture, qui vient en deuxième position après les hydrocarbures avec 14,7 % du produit intérieur brut. Mais cela reste insuffisant et loin des objectifs envisagés par les pouvoirs publics, pourtant l’Algérie était nommée à une certaine époque «le grenier de l’Europe». Pourquoi ça ne décolle pas et où réside exactement le problème ?
Cette question a été abordée, hier, lors de la journée d’étude intitulée «Le partenariat avec les exploitations agricoles et son impact sur le rendement du secteur agricole public», organisée par l’université Frères Mentouri Constantine 1, en collaboration avec l’Union nationale des industriels producteurs et transformateurs (UNIPT). De nombreux intervenants ont mis en exergue les défaillances et les contradictions enregistrées dans les textes juridiques régissant ce volet de partenariat. Ces failles ont engendré des contraintes et des conflits avec les investisseurs privés impactant le rendement des exploitations octroyées dans le cadre de la concession aux agriculteurs.
«La loi existante ne donne pas profit aux investisseurs qui signent des partenariats avec les agriculteurs bénéficiaires de concessions. Ces derniers, qui ont tous les avantages, se présentent comme le premier obstacle pour nous, provoquant des conflits et des blocages avec les investisseurs qui viennent injecter leur argent ou leur moyen dans ce créneau», a déclaré à El Watan Ali Guerfa, président UNIPT. Et de poursuivre que les héritiers de l’agriculteur, en cas de son décès, peuvent restituer tout le bien de leur parent. «Ce qui n’est pas normal. Donc pour investir notre argent, il nous faut des garanties», a-t-il dit.
Un constat approuvé par les différents intervenants, dont le notaire Abdelouahab Abdelmoumen à Constantine. Dans sa communication, il a estimé que les textes juridiques traitant le partenariat établi sur un bien de l’État ne sont pas clairs. Il s’agit, selon ses dires, d’un encadrement juridique très faible et léger de cette sérieuse question. M. Abdelmoumen, ainsi qu’autres intervenants, ont pointé du doigt l’efficacité de la loi 10-03 et le décret exécutif 10-326 établis en 2010.
Ambigus, le communicant les a qualifiés «d’un objet juridique non identifié». Ces dernières lois n’identifient pas clairement la nature du partenariat mentionné. D’ailleurs, de nombreuses contradictions ont été soulevées même au niveau des décisions de la justice et certains notaires se sont retrouvés impliqués. Dans la wilaya de Biskra par exemple, certains agriculteurs et investisseurs préfèrent les actes ou les contrats illégaux (Ourfi). Pour sa part, Hocine Djaber, notaire à Biskra, a recommandé d’aller vers la numérisation et le recensement précis comme une obligation afin de connaître la réalité sur terrain.
En se basant sur des statistiques fournies par l’Office national des terrains agricoles dans son analyse, M. Djaber avoue que le nombre des contrats enregistrés le 30 août 2023 est à 6 960 actes de partenariat inscrits de manière réglementaire s’étalant sur une superficie de 75 506 ha. Ce chiffre représente 2,7% du total des terrains agricoles de l’État. Pourtant, le ministre de l’Agriculture avait déclaré, en avril 2023, un nombre de 208 782 bénéficiaires de concessions sur une superficie de 2 312 740 ha.
Pourquoi cet écart ? «Il faut chercher les causes de tout cela. Est-ce lié aux contraintes législatives ou aux contradictions ou plutôt à la réticence les investisseurs ? Ce phénomène exige également une étude socio-économique sur l’acceptation du partenariat par l’agriculteur. Je propose également d’aller vers la cession au lieu de la concession», a-t-il suggéré.