Un consensus semble se dégager sur la nécessité de rompre avec les paradigmes du passé. Une évolution dans le débat public qui apporte comme une bouffée d’oxygène dans l’océan des certitudes qui ont plombé toute réflexion et toute démarche ces dernières années. Si l’échec est patent dans nombre de secteurs de la vie nationale, il doit être perçu comme étant collectif et non imputable à un cercle réduit qui détiendrait tous les centres de décision.
En chargeant régulièrement, d’une façon monocorde, les autorités centrales à propos de l’inertie prévalant dans le pays, on occulte allègrement les capacités à rompre le statu quo au niveau local, à engager une dynamique de développement et à inverser les courbes fatidiques qui accablent les citoyens. L’incompétence et le laxisme sont pratiquement légitimés à la base, quand on demande aux dirigeants de créer la prospérité à partir du néant, par un simple décret ou texte de loi.
Que peut faire un ministre du Commerce pour achalander les rayons des magasins quand la spéculation s’est démocratisée et la course au gain facile en lieu et place de la production est un sport national. Des ministres de l’Industrie ont été usés par l’invraisemblable question de l’importation de voitures de tourisme avec l’argent public quand le pays ne fabrique pas le moindre accessoire pour automobile.
Et l’on valide presque la thèse d’opérateurs trop pressés qui promettent des véhicules neufs pour moins d’un million de dinars, soit le prix de quelques pièces de rechange chez les grands constructeurs garantissant les normes de sécurité.
La mystification ne sera finalement pas l’apanage du «pouvoir» et l’attachement aux illusions perdues a imprégné de larges pans de la société.
Une économie productive et le développement doivent prioritairement être conçus et enclenchés au niveau des collectivités locales, où les exécutifs élus peuvent jouer pleinement leur rôle.
Il suffit de rompre avec les réflexes du passé qui consistent à attendre les inscriptions des projets par les autorités centrales et à meubler son agenda par des activités folkloriques et protocolaires d’une parfaite inanité.
Le mouvement associatif a largement montré sa capacité à assurer l’animation locale, à organiser les célébrations et les festivités en relation avec la mémoire et le patrimoine.
Il appartient aux assemblées élues à tracer un véritable programme de développement en travaillant de concert avec les porteurs de projets qui, le plus souvent, mobilisent leurs propres capitaux et ne réclament que la levée des blocages administratifs.
Des universitaires peuvent identifier les secteurs où les atouts sont déjà en place et la relance n’est qu’une question de «volonté politique» locale.
La démocratie participative permettra également de dépasser des obstacles au développement ayant entravé nombre de projets d’aménagement ou de réalisation de structures et d’équipements collectifs, et que l’on appelait naguère et improprement «oppositions citoyennes».
La rupture avec les paradigmes du passé, évoquée lors d’un séminaire organisé la semaine dernière à Alger autour des médias, interpelle vivement les professionnels de l’information, pareillement confrontés à des remises en cause lancinantes.
Apparu sur le plan médiatique à la fin de la première moitié du siècle dernier, le syndrome de la «misère» en Kabylie ou dans d’autres régions demeure solidement ancré alors que des initiatives positives et émancipatrices méritent intérêt et encouragement.