Organisation des structures de la présidence de la République : Une planification stratégique pour tenir compte des nouvelles mutations géostratégiques

01/10/2023 mis à jour: 08:52
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Le décret présidentiel numéro 23-331 du 10 Rabie El Aouel 1445 correspondant au 26 septembre 2023, signé par le président de la République, a pour objet de réorganiser les services de la présidence de la République et d’en fixer les attributions, l’objectif étant d’éviter de naviguer à vue au moyen d’une vision stratégique face aux nouvelles mutations géostratégiques mondiales et d’une situation interne complexe.
 

1. Outre les conseillers et d’un secrétariat particulier, la cheville ouvrière sur le plan économique de ce décret est le directeur de cabinet, assistés d’organes et de structures, de chargés de missions, de directeurs d’études, de directeurs, de chargés d’études et de synthèse, de sous-directeurs, de chefs d’études ainsi que de personnels administratifs et techniques. 

Il est chargé de suivre l’activité gouvernementale, de faire le bilan des activités des institutions, d’informer le président de la République sur la situation politique, économique, sociale et culturelle du pays, de son évolution, de lui fournir les éléments nécessaires à la prise de décisions et de réaliser toutes les études liées aux dossiers politiques, économiques, sociaux, culturels ou énergétiques, d’impulser leur mise en oeuvre et d’en évaluer l’impact. 

A ce titre, le directeur de cabinet est chargé d’étudier et de mettre en oeuvre des dossiers politiques et de relations internationales, de suivre l’activité gouvernementale, l’état de l’opinion publique sur les grandes décisions et de suivre le traitement et l’analyse des requêtes des investisseurs, opérateurs économiques et autres requêtes spéciales, en coordination avec les conseillers, la sécurité des communications et des télécommunications relevant du secrétaire général.

 En attendant les modalités du fonctionnement, devant éviter des doubles emplois et interférences ente les différentes structures et reposer sur de solides compétences, c’est une prise de conscience de l’urgence d’une planification stratégique liée au renouveau du système d’information au plus haut niveau de l’Etat, car la visibilité et la cohérence de la politique socio-économique font cruellement défaut. Je ne puis qu’adhérer à cette initiative, en espérant ne pas renouveler l’expérience mitigée lors de la création de grands départements à la présidence de la République, où chaque département devait coiffer plusieurs ministères, au début de la période du défunt président Chadli où moment où d’ailleurs j’exerçais la fonction de directeur général des études économiques à la Cour des comptes entre 1980/1983, la seule motivation de tout patriote étant les intérêts supérieurs de l’Algérie. Actions que nous avons toujours préconisées à travers nos différents audits durant près de 50 années au niveau des structures de l’État.
 

Cette présente contribution est une synthèse de toutes les directions d’audits que j’ai eu l’honneur de diriger entre 1974 à 2023 où j’ai mis en relief l’importance d’une visions stratégique pour l’Algérie (Audit sous la direction du Pr Abderrahmane Mebtoul auteur de 20 ouvrages et 700 contributions nationales/internationales : bilan de Sonatrach et politique énergétique

7 volumes 1974/1976 - même sujet MEM 2006 assisté du bureau américain Ernst & Young – 7 volumes et en 2015 assisté d’experts nationaux et cadres de Sonatrach sur la transition énergétique – Bilan du processus d’industrialisation 1965/1978 Ministère Industrie- Energie assisté –Alger – 6 volumes – direction audit sous la direction du Pr Abderrahmane Mebtoul «Réformes et place du secteur privé au sein de l’économie nationale» 1979, 8 vol MEM Alger – direction audit sur les surfacturations et le coût du BTPH en tant que directeur général des études économiques à la Cour des comptes 1980/1983 – direction audit sur l’optimisation des moyens de la DGSN cabinet DGSN 1997 - audit sur la revalorisation des salaire présidence de la République 2009 6 volumes – quatre audits sur l’évaluation du bilan des entreprises publiques en tant que président du Conseil national des privatisations 1996/1999 Ouvrage collectif sous la direction du professeur Abderrahmane Mebtoul «Les enjeux de l’Algérie : réformes et démocratie» 2 volumes Casbah Édition Alger - 2005 (520 pages) - Interview du Pr Abderrahmane Mebtoul - à Afrik Économie Paris décembre 2018 «Réformes en Algérie, pour un large front social anti-crise » – A. Mebtoul -Le poids de la sphère informelle produit de la bureaucratie et les enjeux géostratégiques Institut Français des Relations Internationales IFRI décembre 2013 réactualisé dans la revue stratégie IMDEP ministère de la Défense nationale octobre 2019- American Herald Tribune-USA - «Prof. Abderrahmane Mebtoul: Any Destabilization of Algeria would have Geo-strategic Repercussions on all the Mediterranean and African Space 28 décembre 2016 » – Dr. Abderrahmane Mebtoul: «Algeria Still Faces Significant Challenges 11 août 2016» – «Prof. Abderrahmane Mebtoul: «The Widespread Financial Scandals Affecting most Sectors of National Activity Threaten the Foundations of the Algerian Stat» -19 octobre 2019 -AfricaPress Paris: 23 juillet 2019- conférences 2019/ 2023- Ecole supérieure de Guerre/MDN, à l’Etat-major de la Gendarmerie nationale/MDN sur les trafics aux frontières – invitation ambassade USA et de l’Union européenne «Impact de la crise politique et économique mondiale, cours des hydrocarbures sur l’économie» - Différentes conférences à Bruxelles, Parlement européen Washington et à Paris
 

2. Toute planification stratégique doit tenir compte à la fois les mutations mondiales, de la morphologie interne de la société, de son histoire, de sa situation présente et de son évolution car tout projet de société étant porté forcément par des forces politiques, sociales et économiques, les réformes étant fonction des rapports de force au niveau de la société et non au sein de laboratoires de bureaucrates devant être à l’écoute des aspirations profondes de la société de la société.

 C’est pourquoi, il faut insister sur l’effort d’une information de vérité, accessible à toute la population, pour montrer l’opérationnalité de l’action gouvernementale au profit des générations présentes et futures. Le défi 2023/2030 pour l’Algérie est la refondation de l’Etat passant renvoyant à un nouveau mode de gouvernance dont le fondement est la liberté au sens large pour une société participative et citoyenne, impliquant une réelle décentralisation autour de grands pôles régionaux. Les responsables algériens s’adapteront-ils à ce nouveau monde dynamique en perpétuel mouvement, n’existant pas de modèle statique, par une nouvelle politique économique tenant compte des nouvelles filières mondiales axée sur la transition numérique et énergétique . L’action économique de la nouvelle organisation de la présidence doit définir clairement les objectifs stratégiques et les actions opérationnelles datées auxquelles doit s’atteler le gouvernement afin d’établir un bilan des réalisations et des insuffisances de chaque département ministériel qui s’articulent autour de cinq axes : premièrement, comment se pose le problème ; deuxièmement quelles sont les contraintes externes (engagements internationaux de l’Algérie) ; troisièmement, quels sont les contraintes sociales, financières et techniques internes ; quatrièmement, quels sont les choix techniquement possibles et les ensembles de choix cohérents et quelles sont les conséquences probables de ces choix ; cinquièmement, quelles méthodes de travail choisir qui permettent de déterminer les paramètres (moyen et long terme) et les variables (court terme) dont dépend un système complexe.
 

Après avoir décomposé la difficulté en éléments simples, il convient de se poser des questions et apporter des réponses opérationnelles, loin des théories abstraites, réalisations physiques et plan de financement sur chacun des éléments : Quoi ? Qui ? Où? Quand ? Comment ? Combien ? Pourquoi? Comment faire ? L’on devra distinguer dans la hiérarchisation les projets capitalistiques dont le seuil de rentabilité, si le projet est lancé en 2023, ne sera rentable qu’à l’horizon 2028/2030 des projets hautement capitalistiques, donc au bout de cinq à sept années et pour les projets faiblement capitalistiques (PMI/PME) au bout de 2/3 années - C’est dans ce cadre qu’ils ‘ati d’encourager les industries de l’avenir d’avenir : la santé, l’alimentation, l’écologie, l’hygiène, l’éducation, la recherche, l’innovation, la sécurité, le commerce, l’information, la culture ; et bien d’autres, ces segments étant capables d’augmenter leur productivité, et d’améliorer sans cesse leur capacité de satisfaire la demande sociale nouvelle, fonction de nouveaux comportements, devant éviter ces assainissements à répétition des entreprises publiques revenues à plus de 80% à la case départ, un véritable gouffre financier, où selon les données du premier ministère (source APS) 250 milliards de dollars ont été consacrées durant les trente dernières années à fin 2020, supposant une réorientation de la politique industrielle,
 

3. Le grand défi pour l’Algérie, devant éviter de vivre sur l’illusion de la rente éternelle des hydrocarbures, existant un lien entre sécurité et développement est la relance économique fondée sur la bonne gouvernance et la valorisation du savoir, afin de réduire le taux de chômage, 14/15% et le taux d’inflation, 9/10% ( source FMI-2022). 

L’Algérie possède en 2023 des marges de manoeuvres sur le plan macro-financier, la dette publique totale globale est estimée en 2022 à 63% du PIB, mais selon le FMI, l’Algérie est le pays arabe le moins endetté en 2023, son taux d’endettement extérieur étant de 1.6% par rapport à son PIB avec des réserves de change qui ont évolué de- 2013 à 194,0 milliards de dollars, à 60 milliards de dollars en 2022 et se situerait entre 82/85 milliards de dollars fin 2023. Mais ce cadre financier dépendant de la rente des hydrocarbures est éphémère sans de profondes réformes structurelles.

 L’action en faveur des réformes est globalement formée de cinq segments qui fondent le processus opérationnel de mise en oeuvre : l’administration qui constitue la cheville ouvrière par son importance stratégique, la société civile/syndicats, les citoyens dans leur diversité, les partis politiques et les opérateurs publics et privés. C’est une entreprise d’envergure consistant principalement à réorganiser les structures institutionnelles, sociales et économiques autour de huit axes directeurs : premièrement, le champ des partis politiques et de la société civile, le mouvement qui ont de moins en moins d’audience auprès de la société ; deuxièmement, la réforme des institutions centrales et locales impliquant la débureaucratisation, et une réelle décentralisation autour de grands pôles économiques régionaux; troisièmement, revoir le système information au sens large avec la numérisation qui n’est qu’un moyen qui en ce XXIe siècle, car posséder la bonne information, c’est le cœur du pouvoir même; quatrièmement, la promotion de la femme signe de la vitalité de toute société ; cinquièmement, la réforme de la justice par l’application et l’adaptation du droit tant par rapport aux mutations internes que du droit international ; sixièmement, adapter le système éducatif, centre d’élaboration et de diffusion de la culture et de l’idéologie de la résistance au changement et à la modernisation du pays où la déperdition du primaire au secondaire et la baisse du niveau devient alarmant ; septièmement, la réforme du secteur de l’énergie avec le primat à l’efficacité énergétique et un nouveau modèle de consommation, dont un nouveau management stratégique de Sonatrach, lieu de production de la rente pour plus de transparence dans sa gestion ; huitièmement, la réforme du foncier agricole et industriel du système financier (banques, fiscalité, domaine, douane) qui est un préalable essentiel à la relance de l’investissement public, privé national et étranger, les banques publiques et privées étant au coeur d’importants enjeux de pouvoir entre les partisans de l’ouverture et ceux de préservation des intérêts de la rente.
 

En conclusion, l’Algérie ne peut revenir à elle-même que si les faux privilèges sont bannis et les critères de compétences, de loyauté et d’innovation sont instaurés comme passerelles de la réussite et de la promotion sociale. 

Ainsi, s’impose un État régulateur (non État gestionnaire) au moyen d’une planification stratégique fondée sur la moralisation de la société, la lutte contre la bureaucratie et la corruption qui accentuent le divorce État-citoyens et constituent un frein à l’investissement national ou international créateur de valeur ajoutée.
Pour réussir les réformes, l’Algérie a besoin de nouvelles intermédiations politiques, sociales, culturelles et économiques, loin des aléas de la rente, afin d’éviter un affrontement direct forces de sécurité citoyens en cas de malaise social. 

Un regard critique et juste doit être posé sur la situation de l’Algérie, sur ce qui a déjà été accompli de 1963 à 2023, et de ce qu’il s’agit d’accomplir entre 2023/2030 au profit exclusif d’une patrie qui a besoin de se retrouver et de réunir tous ses enfants autour d’une même ambition et d’une même espérance, la sécurité nationale et le développement économique et social du pays.

 

Par Abderrahmane Mebtoul
Professeur des Universités
Expert international
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