Le syndicat des transporteurs SNTT affilié à l’UGTA, beaucoup plus connu pour représenter les chauffeurs de taxi, compte aujourd’hui plusieurs adhérents dans le domaine du transport collectif par bus, là où régnait une certaine anarchie. Il est un interlocuteur de taille vis-à-vis de la direction mais ambitionne également de représenter l’ensemble de la corporation pour plus d’efficacité.
A propos de direction, le nouveau responsable n’a pris ses fonctions qu’il n’y a à peine quelques mois, le temps de s’acclimater. «Nous avons beaucoup d’espoir avec la venue d’un nouveau directeur qui nous a promis de nous rencontrer pour débattre de tous les sujets concernant le transport, car nous avons aussi des propositions à soumettre dans le but de régler les problèmes», indique Kateb Belkacem, secrétaire national du syndicat.
A défaut d’avoir un chiffre exact du nombre de bus en circulation à Oran, il situe le nombre à quelques milliers (peut-être deux) à l’échelle de la wilaya. «L’opération de numérisation toujours en cours, nous aidera à mieux gérer le secteur» précisant que, «autant les opérateurs ont des efforts à faire autant la direction a un rôle à jouer en imposant des règles mais en répondant à certaines doléances exprimées par les operateurs».
Beaucoup parmi ces derniers sont convoqués par la commission qui sanctionne les atteintes à la réglementation alors que ce sont parfois les chauffeurs qu’ils ont embauché qui en sont responsables. «Nous sommes pour la création d’un brevet de chauffeur de bus, un peu comme un deuxième permis qui peut lui être retiré en cas de dépassements graves, car, jusque-là, un chauffeur licencié peut très bien être embauché ailleurs», ajoute le même cadre syndical montrant toute une liste de gens qui ont été convoqués. En effet, ce sont les privés qui ont presque le monopole du transport urbain.
Une situation qui peut paraitre paradoxale vu la taille de l’agglomération oranaise, un groupement urbain qui s’étend sur plusieurs communes dont Es-Senia et Bir El Djir et même Sidi Chahmi. N’ayant pas, durant de longues années, un interlocuteur unique, la gestion de ce secteur a toujours constitué un véritable casse-tête au grand dam des usagers. Les griefs sont nombreux.
Des arrêts intempestifs, des bus qui s’éternisent dans les arrêts intermédiaires allant même dans certains endroits jusqu’à bloquer la circulation, des receveurs qui ne se gênent pas de sortir du bus pour siroter un café et fumer une cigarette, des tenues vestimentaires souvent non adaptées, des receveurs qui ne donnent pas de tickets au payement des places alors que c’est une assurance en cas de conflit et la liste est longue.
A tout cela, il faut ajouter parfois des transvasements d’un bus à l’autre des usagers en milieu des trajets pour maximiser les gains, etc.
On peut également ajouter la qualité des véhicules, parfois vétustes ou mal entretenus pour certains d’entre eux. La situation était telle que, en prévision des Jeux méditerranéens de 2022, tous ont été sommés de passer par la case lavage. C’est ce qui a été fait et le résultat a été frappant, du moins de l’extérieur, car les intérieurs sont comme on peut le constater encore aujourd’hui, aussi déplorables.
Cette injonction, même décidée pour répondre à une conjoncture, démontre le souci pour les autorités de donner une belle image de la ville.
Une image écornée aussi par le non-respect des règles. C’est l’exemple de la nouvelle gare routière de Hai Es Sabah (ou Sidi Maarouf) toujours boudée par les détenteurs des lignes qui desservent cette direction. Flambant neuve et offrant toutes les commodités d’accueil, elle dessert pour l’interwilayas six wilayas voisines mais devait faire la jonction avec le transport urbain.
«Boudée en partie par les transporteurs de l’interwilayas qui préfèrent toujours l’ancienne gare routière (celle-ci devant prendre en charge toutes les autres grandes lignes nationales), les opérateurs du transport urbain ne veulent pas venir jusque ici alors que les emplacements de stationnement leurs sont réservés, préférant stationner dans des cours à l’intérieur du quartier Hai Es Sabah.
Conséquence : les usagers qui viennent d’autres wilayas, lorsque les transporteurs respectent les règles, se retrouvent à faire de long trajets à pied pour prendre un bus urbain», explique le gérant de la station. Une station fonctionnelle aujourd’hui mais qui a dû d’abord gagner une bataille judiciaire avant de pouvoir entrer en service.
Son gérant veut juste que la réglementation pour laquelle elle a été construite soit appliquée car «il y a du travail pour tout le monde». Historiquement à Oran, le transport urbain privé a proliféré suite à la mise en faillite au début des années 1990 de l’ancienne RCATUO (Régie communale autonome du transport urbain d’Oran).
Il s’est étendu avec les dispositifs de lutte contre le chômage notamment l’ANSEJ. Contrairement à Alger où la RSTA (régie publique de transport) a continué à fonctionner, à Oran, ce n’est que bien plus tard dans les années 2000 qu’une autre entreprise publique a été créée. Mais la nouvelle entreprise, l’ETO en l’occurrence, n’est dotée que d’un nombre réduit de bus, certes de qualité mais dont le nombre ne représente qu’une infime partie du nombre global des bus en circulation.
«L’entreprise ETO, en élaborant une stratégie de marketing, à commencer par l’uniforme obligatoire et l’hygiène des véhicules, en veillant à la ponctualité et la régularité des passages au niveau des arrêts de bus, tend à offrir un service de qualité à ses clients en instaurant une image de marque qui la distingue de l’opérateur privé.
Cependant, le nombre réduit de véhicules représente une contrainte majeure dans sa capacité de recouvrement au niveau du territoire du groupement urbain d’Oran», est-il noté dans une étude d’un binôme du CRASC (Centre de recherche en anthropologie sociale et culturelle) datant de 2022 et intitulée «Les modes de transport urbain à Oran au défis d’une ville et de sa population». Le défi reste toujours à relever.