28 ans après son lâche assassinat par les sanguinaires intégristes, l’amour et l’engouement que portent les Oranais au grand dramaturge algérien Abdelkader Alloula n’a pas perdu une ride.
Ainsi jeudi dernier, le théâtre régional d’Oran a inauguré, à la grande joie d’un public venu nombreux, un centre de documentations et d’archives théâtrales, appelé plus commodément «centre de ressources théâtrales» qui s’apparente à un «musée Alloula» tant il regorge de documents et autres livres ayant appartenu à ce grand dramaturge algérien, assassiné le mois de mars de l’année 1994. «On va travailler pour que ce soit un centre de ressources théâtrales de dimension nationale», nous a déclaré Mourad Senouci, le directeur du TRO, qui a précisé que ce petit musée comporte plus d’un millier de documents, réuni par la fondation Abdelkader Alloula et qui a été remis au théâtre.
Parmi ces documents, on trouve les textes de théâtre ayant appartenu en propre à Alloula, ses textes de scénarios, ses différents press-book, des photos de lui sur scène, les vidéos de ses pièces, mais encore des thèses, mémoires, recherches et autres contributions qui ont été consacrées, au fil des décennies, au défunt dramaturge, et ce, qu’ils aient été réalisés en Algérie ou à l’étranger. «Nous avons même reçu un livre espagnol sur Alloula», dit Mourad Senouci.
Ce Centre a la particularité d’abriter également les documents personnels de Abdelkader Alloula : sa carte syndicale et même sa bibliothèque personnelle ! Cela donne d’ores et déjà au lieu, fraichement inauguré, une âme en bonne et due forme. On apprend aussi que le Centre de recherche en anthropologie sociale et cultuelle (CRASC) a aussi fait don à ce nouveau centre plusieurs livres et travaux de recherche qui ont pris pour objet le théâtre algérien d’une manière générale. «On a aussi reçu une soixantaine de DVD de différentes pièces algériennes qui sont passées dans différents festivals». Mourad Senouci nous apprend aussi Mme Nadjet Khadda, épouse du défunt Mohamed Khadda, devra envoyer à ce centre tous les archives qu’elle a en sa possession de la collaboration Khadda-Alloula. Cet espace sera donc ouvert non seulement aux chercheurs et aux étudiants mais aussi au simple public qu’il aura le loisir de venir le visiter à sa guise.
Pour l’accès, qui sera gratuit, le problème va être réglé en organisant des rendez-vous réguliers (probablement hebdomadaires, voire, le cas échéant, quotidiens), et ce, afin de permettre à des essaims de visiteurs de découvrir le lieu en groupe. Un numéro de téléphone, une adresse électronique et une page facebook seront crées à cet effet pour permettre à tout un chacun de s’informer aisément sur les horaires des visites.
On apprend que tous ces documents (excepté les livres personnels issus de la bibliothèque de Abdelkader Alloula) devront être couplés en plateforme numérique. «On a déposé des demandes de soutien pour pouvoir faire ça, si ça marche, d’ici juillet, on lancera un compte ‘Centre de ressources théâtrales’. Ainsi, tout ce qui est texte, photos, vidéos et recherches sera en numérique», explique le directeur du théâtre qui précise que l’idée est de permettre l’accessibilité à n’importe quel chercheur qui se trouve dans un autre pays et, par ricochet, faire une promotion optimale de la mémoire Alloula. Il nous informera aussi qu’une association mostaganémoise devra, le 24 mars prochain, faire don à ce centre des copies de documents du dramaturge Abderahmane Kaki. Ainsi donc, par l’inauguration de cet espace, l’objectif est la préservation de la culture algérienne à travers le théâtre, mais encore rassembler, répertorier, classer et archiver le fonds documentaire de l’œuvre de Abdelkader Alloula et enfin encourager et soutenir les troupes et coopératives théâtrales de jeunes à travers leurs projets de créations. Mme Alloula, présente à l’inauguration, a pris la parole sur la scène du théâtre face à un public venu nombreux.
Elle a ainsi manifesté son émotion d’avoir partagé avec le public ce beau moment «où Alloula revient chez lui». «Le fonds documentaire Alloula est enfin au théâtre Abdelkader Alloula. Je n’y croyais plus ! Je suis très émue !», a-t-elle témoigné.