De nombreuses dérives ont été commises par des journalistes du web, voulant à tout prix faire le buzz et l’exclusivité.
Afin d’assurer sa survie, voire sa pérennité, la presse algérienne, particulièrement écrite, n’a d’autre alternative que de s’adapter et s’aligner à cet environnement des nouveaux médias. Ces derniers ont su fidéliser une grande partie du public et du lectorat à leurs contenus, avec la maîtrise des nouvelles technologies et de l’intelligence artificielle.
En Algérie, ce secteur est appelé à s’inspirer de l’expérience des autres pays arabes, pour cerner cette situation qui risque de connaître des dérives, si elle n’est pas maîtrisée et réglementée.
Notons à titre d’exemple le cas de la Tunisie, qui connaît une forte «émigration collective» de la presse écrite vers la presse électronique. Le Dr Jalel Tlili, chercheur tunisien en sociologie de l’information et de la communication, a établi une enquête sur des organes de presse en Tunisie pour déterminer les facteurs et les conséquences de cette migration.
Parmi les facteurs dévoilés, il a cité la hausse du prix du papier, la concurrence sur internet en l’absence d’éthique et de déontologie, la propagation du journalisme alternatif et les gens qui ne lisent plus la presse écrite. La situation est devenue difficile avec la prolifération des chaînes télévisées et la fin du soutien de l’Etat à la presse écrite.
«L’expérience de la Tunisie en matière de presse électronique a commencé avant 2011, avec la publication des informations sur les réseaux sociaux et qui ont été récupérées par des mouvements opposés au pouvoir. La révolution a accéléré le rythme de la presse électronique, où on compte aujourd’hui 23 organes francophones, 20 sites arabophones, et 4 excellentes revues d’investigation.
Cette expérience a été menée par une génération motivée par les événements politiques et les mouvements sociaux et qui s’est retrouvée au chômage. Les réseaux sociaux et ces nouveaux médias ont offert un espace pour la liberté d’expression pour ces jeunes», a déclaré à El Watan Dr Jalel Tlili, en marge du colloque international sur les nouveaux médias tenu à Constantine.
Et de poursuivre que la presse écrite n’a pas su aller vers les gens et les mouvements, tout en restant traditionnelle. «Il s’agit d’habitus comme disait Pierre Bourdieu. Un comportement intériorisé par les journalistes depuis l’autoritarisme. Il a fallu l’arrivée d’une autre génération appropriée aux nouvelles technologies, développant la presse électronique en Tunisie qui est considérée comme son refuge», a-t-il souligné.
Former un journaliste complet
Mais les conséquences risquent d’être fâcheuses. Ces jeunes journalistes recrutés, sans aucune notion de l’éthique journalistique, sont parfois exploités et mal rémunérés. De nombreuses dérives ont été commises par des journalistes du web, voulant à tout prix faire le buzz et l’exclusivité. M. Tlili estime que le support des écrits journalistiques est en train de changer du papier vers le numérique.
Par ailleurs, l’écrivain et journaliste jordanien Ramzi Al Ghuzwi a insisté sur l’importance de la déontologie journalistique à l’ère de l’intelligence artificielle. «Le tapis risque d’être tiré sous les pieds de la presse d’aujourd’hui.
Nous devons accompagner cette nouvelle ère des réseaux sociaux, des nouvelles technologies et surtout de l’intelligence artificielle en améliorant nos performances, en développant et en changeant ce qui va avec la nouvelle structure de la société dans le domaine de la communication. Sinon, nous raterons le train», a avisé Ramzi Al Ghuzwi lors d’un entretien avec El Watan.
Et de souligner qu’un journaliste doit avoir de nombreuses compétences. Le journaliste doit être un bon rédacteur d’article, avoir des interférences avec les nouveaux médias, être souvent présent sur les réseaux sociaux avec une capacité d’influencer les utilisateurs.
Cela sans bafouer la déontologie journalistique et sans se laisser emporter par l’effet de la fausse célébrité exagérée. Notre interlocuteur a recommandé à ce qu’on forme un journaliste complet, qui sait faire le montage, le commentaire, la vidéo et autres, au lieu de recruter toute une armée pour un seul travail.